Burger & Cie tire les enseignements du passé pour préparer l’avenir. "Nous poursuivons la stratégie de diversification que mon père [Bertrand Burger, NDLR] a mise en place. Il avait une vision globale. Nous voulons diversifier chaque marque pour qu’elle dispose de ses propres ressources", explique Paul Burger, l’actuel président de Burger & Cie. Avec sa sœur Lou, directrice générale, ils se partagent la tête de l’entreprise sur la base d’une présidence tournante depuis 2021. Fondée en 1847 dans la vallée de Sainte-Marie-aux-Mines par la famille Burger toujours aux manettes, la société produisait à l’origine des pièces en bois pour les machines à tisser. La PME gravite toujours dans l’univers du bois et semble plus que jamais faite de bois vert. Entre 2020 et 2022, le chiffre d’affaires global des quatre marques de l’entreprise – Booa, Grad, Jardipolys et Kordo - a grimpé de 84 à 120 millions d'euros. Booa conçoit et commercialise des maisons en bois, Grad fabrique des terrasses à clipser, Jardipolys commercialise des éléments d’aménagement pour les jardins et Kordo produit des garde-corps et des escaliers en aluminium et en bois. Dans le même intervalle, les effectifs ont presque doublé, passant de 249 à 400 salariés.
Numérique et multicanal
Lorsque Bertrand Burger arrive à la tête de Burger & Cie en 1980, l’entreprise est vieillissante. Il est urgent de revoir le fonctionnement pour garantir sa pérennité. "La tendance était à la spécialisation. Mon père a assaini la société en faisant beaucoup de substitutions d’activités", résume Bertrand Burger. La scierie est abandonnée, Burger & Cie se concentre sur la menuiserie industrielle en kits (balustrades, volets, escaliers…), dans un premier temps à destination de la grande distribution. La deuxième étape de la stratégie consiste en une diversification à la fois des produits et de la clientèle. Burger & Cie rachète plusieurs entreprises de distribution à partir des années 1990. Parmi ces acquisitions figure le distributeur polonais Jardipolys en 2009, qui devient une marque dédiée à l’aménagement du jardin. Puis en 2010, Burger & Cie lance une marque originale, le constructeur de maisons en bois Booa. En 2016, l’entreprise rachète la société bas-rhinoise Grad et son brevet de terrasses à clipser. "Cette stratégie de diversification est réussie, estime Paul Burger. Nous avons quatre familles de produits avec chacun une équipe dédiée. C’est la fin d’une phase".
Une autre phase s'ouvre notamment avec le numérique, désormais au cœur de la stratégie de Burger & Cie. La crise sanitaire est passée par là et a accéléré la transition numérique de l'entreprise. Une vingtaine de salariés s’y consacrent actuellement pour l’ensemble de la société, contre une seule personne il y a seulement deux ans. "Le numérique permet la diversification du chiffre d'affaires à travers le multicanal [le marketing et la distribution via plusieurs canaux de diffusion, NDLR] mais aussi celle des produits. Il donne une plus grande visibilité à nos marques. Ce faisant, il pousse vers la numérisation de toute l’entreprise jusqu’au process de la relation client", souligne Paul Burger. Une entreprise qui fait feu de tout bois avec quatre marques en forte croissance.
Les maisons Booa en forte croissance
Celle des maisons en bois Booa est spectaculaire. Le chiffre d'affaires de cette marque de Burger & Cie qui regroupe 160 salariés, a crû de 50 % entre 2021 et 2022, passant de 30 à 45 millions d'euros. Le carnet de commandes laisse augurer un chiffre d'affaires de 54 millions d'euros en 2023. Pour Paul Burger, la réussite de la formule tient à deux atouts : le rapport qualité-prix et le design. "La croissance est énorme et va se poursuivre mais il faut déjà se préparer à ce que le marché change. Même si nous nous positionnons sur une offre moyenne à haut de gamme, nous sommes sensibles à l’évolution des politiques publiques qui vont dans le sens du petit collectif", analyse Guillaume Cauderlier, directeur général délégué financier de l’entreprise.
Jusqu’à présent, Booa concevait, fabriquait et vendait des maisons. La marque veut désormais se développer dans le petit collectif de deux étages - "80 % du marché d’habitation", selon Guillaume Cauderlier - et le tertiaire. Trois premiers édifices en charpente métallique et habillage bois ont vu le jour en Alsace, un cabinet d’expertise-comptable, une crèche et les bureaux d’un transporteur. Booa se dirige aussi vers l’industrialisation de la construction avec des modules 3D complets et sur-mesure. La formule permet d’allier qualité et rapidité de fabrication et résout les difficultés à dénicher une main-d’œuvre qualifiée sur site. Paul Burger et son équipe sont convaincus qu’elle peut chambouler le marché du bâtiment. "Il s’agit d’une véritable révolution technologique qui va plus loin dans le hors site, avance le président. Avec l’accès pour tous à un logement de qualité à un meilleur prix". Il est prévu d’agrandir l’usine de Châtenois (67), ouverte en 2016.
Grad se déploie à l'international
Avec Grad, l'activité de Burger & Cie prend une couleur internationale. Le système haut de gamme et breveté de terrasse clipsable garantit à l’entreprise un "avantage concurrentiel", affirme Guillaume Cauderlier. Lors de son achat, il y a sept ans, Grad affichait un chiffre d'affaires de 10 millions d'euros. En 2022, il s’est établi à 24 millions, dont 10 à l’export. La direction de Burger et Cie escompte 33 millions d'euros en 2023, dont la moitié à l’étranger. Les marchés allemand, britannique et états-unien sont particulièrement ciblés. "Dans ces pays, la main-d’œuvre est chère. Or, notre système demande trois fois moins de temps pour la pose", explique Paul Burger. Grad compte notamment quinze collaborateurs en Allemagne, neuf dans le reste de l'Europe et cinq aux USA. Avec la création d’une filiale en 2021 et 2022 en Allemagne, en Grande-Bretagne et aux USA, Burger & Cie est désormais un groupe international. Et la bonne forme de cette activité de terrasses clipsables amène l'entreprise alsacienne à investir dans de nouveaux sites de productions. Une usine de 8 000 m² est ainsi en train de voir le jour en Alsace. Une autre pourrait être créée aux Etats-Unis.
Jardipolys cultive sa clientèle
Jardipolys, la marque d’équipements extérieurs et de mobilier en bois (bacs a fleurs, carrés potagers…) de Burger & Cie, a réalisé en 2022 un chiffre d'affaires de 35 millions d'euros. Ceci malgré la perte d’un gros client, qui représentait à lui seul 10 millions d'euros de recettes annuelles. La preuve que la stratégie à l’œuvre porte ses fruits, selon Paul Burger et Guillaume Cauderlier. "Jardipolys connaîtra quand même la croissance en 2023 grâce à la diversification vers une nouvelle clientèle", assure le second. La marque est à l'heure actuelle essentiellement distribuée dans les grandes surfaces. Dès cette année, la direction espère tirer 3 millions d'euros de la vente directe sur internet. Ce nouveau canal de distribution permet de diversifier la ligne et de proposer une offre plus qualitative. À l’heure actuelle, 10 % des produits Jardipolys sont fabriqués au siège social. La direction envisage d'intégrer la fabrication de nouveaux produits de moyenne gamme sur le site.
Dernière activité de Burger & Cie : la marque Kordo, lancée en 2021 et qui pèse 15 millions d'euros de chiffre d'affaires. Celle-ci réunit les activités anciennes de production de garde-corps et d’escaliers en aluminium et en bois destinés à la grande distribution. Kordo réalise près de la moitié de son activité pour deux grandes enseignes, Leroy Merlin et Kingfisher. L’objectif est de doubler le chiffre d'affaires dans les trois ans à venir en étendant la clientèle aux professionnels de la construction et à l’e-commerce.
