Lactalis réclame un milliard d’euros à Eurofins dans l’affaire du lait infantile contaminé aux salmonelles
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Lactalis réclame un milliard d’euros à Eurofins dans l’affaire du lait infantile contaminé aux salmonelles

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C’est l’un des dossiers sanitaires les plus retentissants de ces dernières décennies. À partir de 2017, une trentaine de nourrissons tombent malades, à cause de salmonelles présentes dans de la poudre de lait infantile. Aujourd’hui, le fabricant, le groupe mayennais Lactalis, impute la responsabilité de l’affaire à la défaillance des laboratoires du groupe Eurofins, au cours de milliers d’analyses qui n’avaient rien révélé.

L’usine Célia de Craon a été au cœur d’une contamination aux salmonelles dans de la poudre de lait infantile. Lactalis attaque aujourd’hui le laboratoire d’analyses — Photo : Archives

Nouveau rebondissement dans l’affaire de la poudre de lait infantile contaminée aux salmonelles qui a défrayé la chronique depuis 2017 : Lactalis évalue son préjudice à plus d’un milliard d’euros et attaque les laboratoires Eurofins pour obtenir compensation. Le groupe industriel laitier reproche à deux laboratoires de ne pas avoir été en mesure de détecter les salmonelles présentes dans ses produits.

C’est l’information révélée ce lundi 20 novembre par le site d’investigation L’Informé. Le groupe laitier lavallois aurait lancé une procédure en mars. L’assignation déposée devant le Tribunal de commerce de Paris vise deux filiales d‘Eurofins, dont le plus important laboratoire en microbiologie, basé à Saint-Herblain. C’est de Nantes qu’a démarré l’expansion d’Eurofins Scientific, dont le siège est aujourd’hui au Luxembourg et représente 6,7 milliards de chiffre d’affaires en 2022, avec 62 000 collaborateurs dans 900 laboratoires et 62 pays. Le groupe est par ailleurs leader mondial de la bio-analyse pour le secteur agroalimentaire.

"Pas possible qu’il y ait eu zéro test positif"

Pour Lactalis, malgré les 28,3 milliards de chiffre d’affaires, 85 500 collaborateurs et plus de 270 usines dans 52 pays, l’affaire des salmonelles a pesé. Elle a nui à son image, à ses marques. La gestion de crise par l’industriel a été par la suite vivement critiquée. Ce qui a incité le très discret groupe mayennais à communiquer davantage.

Le 1er février 2018, le PDG de Lactalis, Emmanuel Besnier, s’exprime pour la première fois depuis le début de la crise dans un entretien accordé au journal Les Echos. Il reconnaît alors des "alertes" dans l’environnement industriel, qui aurait été gérées. Il reconnaît aussi que le scandale allait coûter "des centaines de millions d’euros" à son groupe. Avant de pointer du doigt, sans le nommer, le laboratoire à qui Lactalis diligentait les analyses… en l’occurrence, Eurofins. "Nous nous posons beaucoup de questions sur la sensibilité des analyses faites par ce laboratoire. Nous avons beaucoup de mal à comprendre comment 16 000 analyses réalisées en 2017 ont pu ne rien révéler. Nous avons des doutes… Ce n’est pas possible qu’il y ait eu zéro test positif."

"Leur stratégie de défense… se défausser"

Il faudra attendre un mois, le 6 mars, pour que la réplique de Gilles Martin, patron d’Eurofins, apparaisse dans le même titre. Le PDG du groupe d’analyses biologiques défend "la fiabilité" des tests effectués pour le compte des dirigeants de Lactalis. "Dans leur stratégie de défense, ils essaient comme ils peuvent de se défausser", signe-t-il.

C’est en avril 2017 qu’un premier cas de nourrisson contaminé aux salmonelles avait été signalé. Des lots de boîtes de poudre de lait infantile avaient été rappelés pour la première fois le 1er décembre. Suite à un audit, l’usine de Craon, en Mayenne, était mise à l’arrêt à compter du 8 décembre. Les rappels se multiplieront rapidement, jusqu’à ce que l’ensemble des boîtes soient rappelées, quelle que soit la date de fabrication. L’usine sera un temps à l’arrêt, douze millions d’euros seront engagés et la tour de séchage numéro un "définitivement condamnée" début 2018. Lactalis chiffrera par la suite les pertes directes à "300 millions d’euros".

Le 16 février dernier, le groupe Lactalis et la société Célia qui gère l’usine de Craon ont été mis en examen pour tromperie aggravée et blessures involontaires ; et pour inexécution de mesures de retrait et rappel, communique alors le groupe. 300 parents ont porté plainte. 38 victimes de ces salmonelles sont avérées.

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