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Glaces Los Pistoleros : « L'objectif est de sauver les meubles »
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Glaces Los Pistoleros : « L'objectif est de sauver les meubles »

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Michaël Bensaid a cofondé l’entreprise Los Pistoleros à Cannes, en 2015, avec deux amis. Depuis, le fabricant et distributeur de glaces artisanales et naturelles inspirées des "paletas" mexicaines n’a cessé de croître, vendant près d’un million et demi de bâtonnets en 2019. Mais il subit aujourd’hui de plein fouet l’impact de la crise du coronavirus. Ultra-saisonnière, l’activité dépendra des touristes qui se font encore attendre.

Los Pistoleros, cofondé par Mickael Bensaid, a vendu près 1,5 million de glaces fabriquées à Cannes en 2019. Aujourd'hui, l'entreprise est en difficulté face à la crise — Photo : Olivia Oreggia / Le JDE

« Nous avons repris peu à peu, il y a un peu plus d’une semaine. Nous n’avons eu aucune activité pendant le confinement, tous nos clients étaient fermés. La mise en place habituelle en grandes surfaces n’a pas pu se faire puisqu’il nous était interdit d’accéder aux magasins. Tout est à présent décalé. Beaucoup de clients n’ont pas encore repris alors que d’autres, à l’image de certains snacks, nous ont dit qu’ils ne rouvriraient pas cette année. La demande dépend des touristes. Nous devrions être fixés la semaine prochaine avec le début des vacances scolaires. La clientèle locale ne suffira pas. Pour nous, tout se joue maintenant, sur les deux mois qui arrivent. Dans la région, un millier de campings vendent nos glaces. Seule la moitié a rouvert. Il y a aussi les cinémas, les théâtres, les parcs d’attractions comme OK Corral dans les Bouches-du-Rhône, les musées comme le Musée Océanographique de Monaco… certains ont rouvert mais reçoivent encore trop peu de visiteurs. »

« Nous avons demandé à être placés en redressement judiciaire »

« Depuis le début de cette crise, on entend beaucoup parler des bienfaits du local, des circuits courts… consommer local, c’est le moment ! Nous fabriquons nos glaces au Cannet, près de Cannes. Nous sommes face à des géants du secteur, des multinationales comme Miko ou Nestlé qui ont les reins bien plus solides que nous. Je ne me plains pas pou autant, je sais qu’il y a bien pire que nous en ce moment. Les difficultés sont réelles mais nous ne sommes pas inquiets pour autant quant à la pérennité de notre entreprise. En 2019, nos résultats ont été moins élevés que dans nos prévisions alors que nous avions engagé de gros investissements dans nos outils de production et recruté davantage pour nous permettre de passer un cap. Nous avons alors demandé à être placés en redressement judiciaire. La procédure a été engagée début 2020 et se passe bien. Cette année devait nous permettre de remplir de nouveau les caisses, nous devions être en capacité de financer le développement de notre gamme de glace en bacs et en pots, ce ne sera pas le cas. Nous continuons à travailler sur ces projets et d’autres nouveaux produits, mais leur réalisation est forcément décalée à l’année prochaine ou dans deux ans.

« D’une trentaine de salariés en 2019 nous sommes passés à une douzaine »

Nous étions une trentaine à travailler au plus fort de l’été en 2019. Nous sommes une douzaine aujourd’hui. Certains sont encore en activité partielle et ne reprendront que la semaine prochaine. Mais je ne m’interdis pas de refaire appel au chômage partiel en septembre si nécessaire. Nous avons tout de même dû prendre quelques saisonniers pour venir donner un coup de main sur certains postes. Chacun fait un peu plus que d’habitude, nous tentons de compenser avec le travail. Mais en ayant un effectif réduit de moitié, si on reçoit d’un coup une commande importante, nous ne pourrons pas suivre en production. Nous essayons évidemment de produire plus, mais nous ne pouvons pas prendre trop de risques. Nous avons trop peu de visibilité. Il nous faudra fonctionner à flux tendu pour éviter les sur stocks. La situation est délicate : d’un côté, nous devons faire face à l’incertitude de nos clients qui veulent éviter de trop stocker, et à celle de nos fournisseurs de l’autre côté. Je dois par exemple faire face à des retards de livraison de cartons d’emballage commandés en février et que je n’ai toujours pas reçus. Chaque maillon de la chaîne est impacté. Tout est bouleversé ! Nous n’avions fait que croître depuis la création de Los Pistoleros en 2015 et nous avions de belles perspectives pour 2020. Avant le confinement, nous avions ainsi signé avec Carrefour et Casino mais il n’y a pas eu de précommandes, je ne sais pas encore si cela aboutira. »

« Le retard cumulé n’est pas rattrapable. Le plus difficile à gérer reste l’incertitude. »

« En 2019, nous avions réalisé plus de 1,3 million d’euros de chiffre d’affaires. Nous visions 1,6 million d’euros en 2020. Si nous réalisons entre -30 et -40 % de notre activité, nous serons déjà très contents ! Le retard cumulé n’est pas rattrapable. Le but est de sauver les meubles. Le plus difficile à gérer reste l’incertitude. Il y a encore trop de choses à éclaircir. Heureusement, il y a eu des dispositifs comme le chômage partiel, mais nous attendons toujours des réponses sur le décalage des loyers ou sur les délais de paiement ou la prise en charge des factures d’électricité qui représentent, avec nos congélateurs et machines de production, environ 1 500 à 2 000 euros par mois. Il y a encore tellement de flou. »

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