Coronavirus : avec le déconfinement, l'économie française repart de l'avant
# Conjoncture

Coronavirus : avec le déconfinement, l'économie française repart de l'avant

S'abonner

Ce n’est pas encore le retour à la normale tant attendu, mais le déconfinement a bel et bien permis un « très net » redémarrage de l’activité au mois de mai. De quoi redonner un peu d’optimisme à l’Insee. Mais juste un peu, car la France ne devrait pas échapper à une récession à deux chiffres ce trimestre. Et la persistance d’incertitudes majeures jette une ombre sur la perspective d'un redressement rapide.

Le secteur de la construction est à l'image de toute l'économie française après le 11 mai, selon l'Insee : l'activité y a fortement repris, mais à un niveau encore bien inférieur à ce qu'elle était avant la crise du coronavirus — Photo : Nicolas Robin

Pas si pire… mais pas reluisante non plus. Dans son point de conjoncture du 17 juin, l’Insee dépeint une situation économique toujours sombre, mais y apporte deux lueurs d’espoir : la reprise est au rendez-vous du déconfinement… et la crise pourrait être moins grave qu’elle ne l’est déjà.

Le déconfinement de l’économie a bien eu lieu

Dans quelles proportions les entreprises allaient-elles redémarrer au sortir du confinement ? C’était l’une des principales inconnues qui pesait jusqu’ici sur les perspectives de redressement de l’économie. D’où les appels répétés, de Bercy à l’Élysée, à accélérer le retour au travail. Finalement, « la reprise économique est très nette depuis la mi-mai », se réjouit l’Insee, qui vient confirmer un constat déjà dressé par le ministère du Travail.

• Un retour d'activité oui, à la normale non

La perte d’activité ne cesse ainsi de se résorber, et s’avère même moins profonde que prévu : de -16 % en mars et -29 % en avril (au lieu de -35 % anticipée au début de la crise), elle passe à -22 % en mai. Pour juin, l’institut s’attend à une amélioration, plus forte encore, de 10 points. L’économie tournerait alors à 88 % de son niveau habituel, soit 2 points de mieux que dans la précédente estimation. Ce qui « s’explique notamment par le bon déroulement du déconfinement sur le plan sanitaire et le desserrement graduel des mesures d’endiguement de l’épidémie ».

Reprise de l’activité ne rime toutefois pas encore avec retour à la normale. D’autant que tous les secteurs ne sont pas logés à la même enseigne. La construction, par exemple, redresserait la barre en juin (+21 points en un mois), mais resterait un tiers sous son niveau habituel. La fabrication de matériels de transport (à -38 %) et l’hébergement-restauration (-35 %) tourneraient encore plus au ralenti.

• Des signaux encourageants

Pour autant, au niveau global, l’industrie (à -15 %) et les services (à -13 %) remontent la pente. Dans le tertiaire, l’Insee voit même poindre une lumière au bout du tunnel : « L’assouplissement réglementaire annoncé le 14 juin (par le président de la République, NDLR) pourrait entraîner une remontée, plus rapide que durant le mois écoulé, de l’activité économique de certaines branches particulièrement affectées par la crise. »

Tout aussi encourageant, « le rebond post-11 mai » de la consommation des ménages est jugé « particulièrement vif (avec une perte limitée à 7 % par rapport au niveau d’avant crise, contre -31 % en avril) ». Et même « durable », au vu de la prévision de -5 % pour juin.

En conséquence de ces ajustements, la chute du PIB pourrait être légèrement moins brutale qu’attendu au deuxième trimestre : -17 %, au lieu de -20 %.

Les mesures de soutien à l’économie ont atténué le choc

Autre point de satisfaction de l’Insee : les mesures prises par l’État auraient bel et bien limité la casse chez les acteurs économiques. Sans complètement parvenir à les préserver des conséquences de la crise du Covid-19.

Ainsi, en avril, les entreprises ont subi un effondrement de leur valeur ajoutée de 35 % et une contraction de leur taux de marge de 9 points par rapport à son niveau d’avant-coronavirus. Mais, relativisent les auteurs, l’inflexion de ce dernier indicateur a été limitée par l’activité partielle, le fonds de solidarité et les exonérations de charges.

« L’économie a certes été mise provisoirement en sommeil, mais dans des conditions qui rendent un redémarrage possible. »

Même conclusion pour les entrepreneurs individuels, qui auraient tout de même été privés d’un quart de leur revenu en avril. Les ménages n’en auraient perdu, eux, que 2,7 %, grâce aux « prestations sociales habituelles, allocations-chômage ou journalières, et celle, plus exceptionnelle, du dispositif d’activité partielle ».

En conclusion, l'Insee finit sur cette note d’espoir : « Une économie placée sous anesthésie, comme nous l’avions décrite en avril, c’est une économie certes mise provisoirement en sommeil, mais dans des conditions qui rendent un redémarrage possible. »

Les incertitudes demeurent pour la suite de l’année

Pas question pour autant de verser dans un optimisme béat. La situation reste fragile, marquée par des incertitudes majeures. L’Insee en dresse une liste rapide et néanmoins révélatrice.

Dans l’industrie, « une demande internationale toujours en berne et d’importants stocks à écouler » risquent de ralentir le retour à la normale. D’autant que « les cicatrices seront sans doute plus profondes » dans certains secteurs, comme l’aérien et l’automobile.

• Des questions nombreuses, une seule certitude

Plus globalement, la fiabilité des prévisions actuelles est remise en cause par une somme de paramètres encore difficiles à évaluer. Quel est l’impact réel des règles sanitaires sur la productivité ? L’investissement des entreprises va-t-il repartir, alors que leur trésorerie se réduit ? Qu’en sera-t-il de la consommation des ménages, au moment où le chômage les menace et les destructions d'emplois explosent ? Et comment la pandémie va-t-elle évoluer au niveau mondial ?

Face à ces questions sans réponse, l’Insee n’a qu’une certitude : « À très court terme, c’est l’évolution de la situation sanitaire qui conditionne la vitesse de reprise de l’économie - tout comme elle l’a auparavant précipitée dans la crise. » Les entreprises françaises n’ont donc pas fini de vivre avec le virus.

# Conjoncture