Finistère
Marc Keranguéven (Sica) : « La plateforme logistique de Vilargren devrait être opérationnelle en 2021 »
Interview Finistère # Agriculture

Marc Keranguéven président de la Sica de Saint-Pol Marc Keranguéven (Sica) : « La plateforme logistique de Vilargren devrait être opérationnelle en 2021 »

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Après sept ans de batailles juridiques, les travaux de la plateforme logistique de la coopérative légumière Sica de Saint-Pol, dans le Finistère, ont redémarré. Une bonne nouvelle malgré une baisse du chiffre d’affaires en 2018 car le projet est crucial pour la compétitivité de l’entreprise.

Selon Marc Keranguéven, président de la coopérative légumière bretonne Sica, "la situation de l'entreprise serait meilleure aujourd’hui" sans le retard pris dans la construction de la plateforme logistique de Vilargren — Photo : Sica

2018 a été marquée par le redémarrage des travaux de la plateforme logistique de Vilargren à Saint-Pol-de-Léon. Comment le projet a-t-il évolué ?

Marc Keranguéven : Aujourd’hui, on peut dire que ça a avancé. Pour rappel, sans revenir dans le détail, le projet a commencé en décembre 2007. Les travaux ont démarré en octobre 2011 et ont été arrêtés un mois plus tard suite aux recours déposés. Un autre permis a été déposé en novembre 2015. De nouveaux recours ont été déposés contre le PLU et le permis de construire. En octobre 2018, les jugements nous ont été favorables. Les travaux ont donc redémarré en novembre.

Le projet a évolué. L’investissement devrait être entre 55 et 60 M€, mais rien n’est finalisé. Le terrain représente 38 hectares pour un bâtiment de 7 hectares. On espère y entrer en 2021, pas en bloc mais au fil des saisons des produits.

Ce site logistique va-t-il changer votre organisation ?

M.K. : Aujourd’hui, un camion charge en moyenne 5 à 7 palettes par station. Soit 5 stations pour effectuer un chargement complet. Demain, on pourra limiter ces déplacements et cela générera 47 % de camions en moins sur les routes. 60 % des volumes seront regroupés à Vilargren. Nous optimisons la logistique, limitons le coût du transport, et répondons aussi à la demande de traçabilité des consommateurs.

Côté producteurs, avec le transfert de la station, il y aura des perdants et des gagnants avec des exploitations qui seront plus éloignés ou plus proche de Vilargren. Nous conservons des stations « filles » éloignées de Saint-Pol pour la presqu’île de Plougonvelin, et des stations spécialisées (lavage, conditionnement…) ainsi que Cleder et Lanmeur.

Le retard a-t-il coûté beaucoup à la coopérative ?

M.K. : Nous avons perdu de l’argent, c’est sûr, mais nous n’avons pas chiffré. Si on avait pu faire la plateforme plus tôt, la situation de la Sica aurait été meilleure aujourd’hui. Surtout, tous les arguments des opposants ont été rejetés. Pour moi, il s’agissait de recours abusifs. Nous avons été beaucoup critiqués, mais je rappelle que la Sica, ce sont 650 exploitations – la plupart familiales. On vit au pays, sur nos terres, on n’est pas là pour tout casser. On tient compte du cadre dans lequel on vit.

Quel bilan tirez-vous de l’année écoulée au niveau de la production ?

M.K. : 2018 a été assez contrastée. Les volumes vendus sont stables mais le chiffre d’affaires, de 194 millions d’euros, est en baisse de 5,4 %. L’horticulture est stable mais l’activité légumes est, elle, en baisse de 6 % à 159 M€ de chiffre d’affaires. Un chiffre qui se maintient quand même en moyenne sur dix ans.

Vous avez aussi un problème récurrent sur le marché des échalotes ?

M.K. : Le chiffre d’affaires a été divisé par quatre par rapport à la saison 2016-2017. Les prix sont dérisoires. Il y a un manque de volonté des politiques français et européens, qui ne veulent pas faire la différence entre l’échalote traditionnelle que l’on fait, où tout est fait à la main, et celle de semis, où le travail est mécanisé. Ce n’est pas le même produit, selon nous. On soutient que l’on ment aux consommateurs. Et ces produits pèsent sur le marché.

Quelle est votre stratégie pour contrer ces mauvaises années successives sur certains légumes ?

M.K. : Nous continuons à mettre l’accent sur la diversification : potimarron, légumes anciens, etc. Le potimarron, on n’en parlait pas il y a dix ans. La Bretagne a des atouts pour cette culture. Sur les légumes anciens, nous travaillons avec Prince de Bretagne pour mieux communiquer. Nous sommes trop peu connus sur ce type de produits. Dans les années 70 et 80, nous étions présents avec trois produits : la pomme de terre, l’artichaut et le chou-fleur. Aujourd’hui, ils ne représentent que 30 % de la production. Si nous ne nous étions pas diversifiés, nous ne serions plus là.

Le bio est-il aussi un axe de croissance ?

M.K. : La section évolue tous les ans. Elle représente 7 % de notre chiffre d’affaires en 2018, contre 5 % l’année précédente. C’est un marché porteur. 39 producteurs de la Sica sont aujourd’hui certifiés, sept sont en conversion. Et nous avons de nombreuses demandes. Nos deux techniciens de la section reçoivent un appel par semaine en moyenne d’un producteur en conventionnel en réflexion. C’est potentiellement 50 autres producteurs qui pourraient évoluer vers le bio.

Aujourd'hui c’est un phénomène de mode, mais nous faisons du bio depuis vingt ans à la Sica, avec deux producteurs précurseurs. En bio, le volume a été multiplié par quatre en dix ans. La demande est là, les producteurs sont là. Le chiffre d’affaires net producteurs (8,55 M€ au total) est en hausse de 3 M€. Aujourd’hui, c’est le troisième chiffre d’affaires de la coopérative !

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