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La coopérative légumière Sica nourrit de nouvelles ambitions
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La coopérative légumière Sica nourrit de nouvelles ambitions

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Après une année 2019 historique, la Sica de Saint-Pol espère continuer sur sa lancée malgré un exercice 2020 perturbé par la crise du coronavirus. La fin de l’année verra la mise en service de sa nouvelle plateforme logistique, un projet de près de 50 millions d’euros qui doit permettre à la coopérative légumière de gagner de nouveaux marchés.

— Photo : Sica

Pour la Sica de Saint-Pol, l’année 2020 devait déjà être bien remplie avec la mise en service, à l’automne, de sa nouvelle plateforme logistique à Vilar Gren, à l’entrée de Saint-Pol-de-Léon. La crise du coronavirus ne devrait pas retarder cette livraison. Un soulagement pour la coopérative légumière et ses 800 producteurs qui attendent cet équipement depuis septembre 2011.

À l’époque, la coopérative obtenait un premier permis de construire pour la réalisation de cette plateforme. Le chantier démarrait le mois suivant, mais fut interrompu en novembre en vertu de la loi littoral. Après huit ans de bataille juridique, les travaux ont pu reprendre en 2019. Ceux-ci sont aujourd’hui en cours d’achèvement.

Entre 47 et 50 millions d’euros investis

« Il faut absolument que l’on rentre dans ces locaux cet automne, à la fin de la saison des tomates (de mai à novembre environ, NDLR) », explique Marc Keranguéven, le président de la Sica. Toutes les machines de tri, lavage et conditionnement doivent en effet y être déplacé pour que tout soit prêt pour la saison suivante. L’installation se fera ainsi au fil des saisonnalités des fruits et légumes de la coopérative jusqu’au printemps 2021.

L’investissement, chiffré entre 47 et 50 millions d’euros par la Sica, doit permettre à la coopérative de gagner en compétitivité et ainsi gagner des parts de marché en Europe. « Aujourd’hui, un camion charge en moyenne 5 à 7 palettes par station. Soit 5 stations pour effectuer un chargement complet. Demain, nous pourrons limiter ces déplacements et cela générera 47 % de camions en moins sur les routes. 60 % des volumes seront regroupés sur 65 000 m² (17 ha de terrain) à Vilar Gren. Nous optimisons la logistique, limitons le coût du transport, et répondons aussi à la demande de traçabilité des consommateurs », résumait le président au moment de la reprise des travaux. À côté de Vilar Gren, la Sica, qui couvre le Nord-Finistère de Plougonvelin à Lanmeur dans les Côtes-d’Armor, conserve tout de même des stations « filles » éloignées de Saint-Pol pour la presqu’île de Plougonvelin, et des stations spécialisées (lavage, conditionnement…) ainsi que celles de Cleder et Lanmeur.

2019, meilleure année depuis 10 ans

D’ici quelques mois, l’entreprise possédera l’outil à la hauteur de ses ambitions, confirmées par une très bonne année 2019 (exercice comptable du 1er novembre 2018 au 31 octobre 2019). « C’est notre meilleure année depuis 10 ans, se félicite Marc Keranguéven. Nous avons réalisé 220,6 millions d’euros de chiffre d’affaires, soit une progression de 14 % ! »

Si l’horticulture progresse de 9 % grâce aux ventes en pépinières, ce sont bien les légumes qui portent principalement cette performance avec +17 % entre 2018 et 2019. L’échalote, par exemple, progresse de 96 %, les pommes de terre primeurs de 80 %. « Attention, pour certains segments, 2018 avait été une mauvaise année, ce qui explique de telles hausses, tempère le président. Mais le bio affiche une belle année avec + 20 %, les salades passent pour la première fois la barre des 10 millions d’euros de chiffre d’affaires. » Parmi les moins bonnes performances, on trouve la chute du chiffre d’affaires des fraises de 28 %. « C’est dû à des conversions de producteurs vers les tomates, après plusieurs mauvaises années, indique-t-il. Mais 2020 s’annonce meilleure pour la fraise. »

Un début 2020 encourageant

2020 justement. La Sica a été en première ligne face à l’épidémie du coronavirus. Le 22 avril, le président de la République venait même visiter une exploitation de la coopérative pour saluer l’effort de « ceux qui nourrissent la France ». Face à la crise, elle s’en sort plutôt bien avec une hausse de 8 % de son chiffre d’affaires de l’activité légumière au 31 mai 2020.

« Cela a été plus compliqué pour l’horticulture qui a vu ses ventes stoppées nettes avec la fermeture des jardineries », note Olivier Sinquin, le directeur de la Sica. 50 % du chiffre d’affaires de l’horticulture se fait au printemps. Un coup dur avec une perte de 3 millions d’euros en mars, 2,1 millions en avril, mais rattrapé en mai avec une hausse de 2,3 millions d’euros. « Dans l’ensemble, notre activité se porte plutôt bien même si des produits ont souffert », résume Marc Keranguéven, qui souligne aussi la capacité d’adaptation dont a fait preuve toute la filière, des producteurs, aux négociants et transporteurs en passant par les 141 salariés de la Sica.

La coopérative a aussi vu augmenter significativement le nombre de colis de légumes commandés sur Amazon au début du confinement. « Nous avions lancé cette expérimentation sur la « market place » d’Amazon fin 2019. C’était une opportunité de tester l’e-commerce, rappelle le président. Nous avions fait 100 colis en trois mois, nous sommes passés à 100 par jour au moment du confinement ! » La fermeture des plateformes Amazon au bout de quelques semaines pour mettre en place des mesures barrière a cependant cassé cet élan. « Nous sommes quand même à 5 à 10 colis par jour. Sur l’e-commerce, on ne s’interdit rien. Certains producteurs ont même tenté des ventes via Facebook pendant la crise », remarque Marc Keranguéven.

Diversifier les canaux de commercialisation

Car la Sica veut innover pour vendre mieux ses produits. Pour Marc Keranguéven, les bonnes performances sont liées au marché, en progression, mais aussi à la capacité de la Sica à diversifier ses canaux de commercialisation. Elle utilise toujours de façon majoritaire le système de cadran (système d’enchères électroniques) mis en place dans les années 60 pour unir les producteurs face aux acheteurs en restant maîtres des prix pratiqués. « Le cadran représente toujours 70 % de nos ventes, mais nous nous sommes adaptés pour aller chercher de nouveaux clients, plus directement. » La télématique du cadran a été renforcée pour répondre aux exigences des acheteurs d’engagement au-delà du quotidien. La Sica a ainsi accéléré sur la vente à distance, avec +15 % d’acheteurs en plus en un an. « Pendant la pandémie, cela nous a aussi permis de continuer, même si quelques acheteurs sont revenus assez vite en salle plutôt que de réaliser les achats de chez eux », note le président.

Pour tester de nouveaux canaux, comme Amazon ou la vente directe, la Sica a créé une filiale commerciale dédiée : Fresh’Nov. « L’idée est de capter les nouvelles opportunités. Nos clients habituels ont besoin de volumes importants, que nous n’avons pas forcément sur de nouvelles gammes. C’est ce qui s’est passé avec les légumes anciens par exemple », explique Marc Keranguéven. Un moyen de court-circuiter les gros négociants, parfois frileux sur les nouveautés proposées. « Ce n’est pas le but, mais si des acheteurs se présentent, nous ne pouvons pas leur dire non et nous trouvons des solutions pour leur vendre nos produits. Nous avons par exemple en ce moment des demandes d’un ou deux clients pour une gamme de fruits rouges. » La coopérative cherche donc des producteurs pour satisfaire cette demande, en direct. « 2019 a conforté nos choix d’aller de l’avant et d’innover. Même si 2020 a été perturbée, nous avons la ferme intention de tracer un chemin d’optimisme et de perspectives pour nos producteurs », conclut le président de la Sica.

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