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Champ’Ionne va injecter plus de 11 millions d’euros pour produire des champignons de Paris en Haute-Marne
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Champ’Ionne va injecter plus de 11 millions d’euros pour produire des champignons de Paris en Haute-Marne

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À Chevillon (Haute-Marne), Champ’Ionne, rattachée au groupe Meyer, s’est lancée dans la culture de champignons de Paris. Un projet qui va nécessiter d’embaucher 200 personnes, pour mettre jusqu’à 2 000 tonnes de champignons par an sur le marché.

Plus de soixante cueilleurs ont déjà été recrutés. L’objectif est d’atteindre les 100 d’ici avril — Photo : Julia Guinamard

Dans ce qui était autrefois une usine de tubes, Champ’Ionne s’est lancé dans une nouvelle culture : les champignons de Paris. Installé à Chevillon, en Haute-Marne, le site de production appartient au Groupe Meyer, l’un des derniers distributeurs du marché de Rungis au capital 100 % familial. Cette nouvelle activité a nécessité un premier financement de 8,5 millions d’euros qui seront complétés par 3 millions d’euros, afin d’augmenter la production d’ici 2025.

Des fonds propres et des aides publiques

Apportés en partie en fonds propres par le groupe Meyer, ces investissements ont été soutenus par le groupement d’intérêt public de Bure-Saudron, la Chambre de commerce et d’industrie Meuse Haute-Marne et le Fonds européen de développement régional.

La première phase du projet a permis de créer 18 cellules de production de champignons de Paris. Chacune des chambres produit en moyenne entre 8 et 9 tonnes par phase de plantation, à raison de huit rotations par an. Ce qui représente 72 tonnes de champignons par an et par chambre, soit près de 1 300 tonnes pour l’ensemble des 18 cellules. "Ces chiffres restent théoriques. Ils dépendent de la pousse des champignons et de la rapidité des cueilleurs. Il peut y avoir des disparités entre deux cellules", souligne Sébastien Maltot, le directeur général de Champ’Ionne.

Jusqu’à 2 000 tonnes par an

Les cellules seront mises en production au fur et à mesure de la constitution des équipes de cueilleurs, dont les recrutements ont commencé depuis décembre. "Nous réalisons les embauches petit à petit pour que les nouveaux puissent être d’abord intégrés avec des anciens afin de favoriser une meilleure formation", explique Sébastien Maltot, directeur général de Champ’Ionne. Les 18 chambres seront opérationnelles d’ici avril. La seconde étape du projet prévoit l’ouverture de neuf cellules supplémentaires, ce qui devrait augmenter la production de quelque 650 tonnes, portant la production du site à environ 2 000 tonnes par an.

Si l’entreprise préfère rester discrète sur le chiffre d’affaires prévisionnel, le business semble intéressant : avec un cours du champignon de Paris qui oscille entre 3,55 et 4,2 euros le kilo d’après les données du Réseau des nouvelles du marché, la production des 18 cellules pourrait représenter environ 5 millions d’euros. La seconde phase achevée, ces chiffres pourraient grimper jusqu’à 8 millions d’euros.

La seconde étape du développement de Champ’Ionne prévoit l’ouverture de neuf cellules supplémentaires, portant la production du site à environ 2 000 tonnes par an — Photo : Julia Guinamard

Pas de problème de recrutement

Plus de soixante cueilleurs ont déjà été recrutés. L’objectif est d’atteindre les 100 d’ici avril. Au terme des deux phases, 200 personnes seront embauchées. "Nous recevons beaucoup de CV. Nous sommes dans une région sinistrée par le départ de nombreuses fonderies, situés à une quinzaine de kilomètres du quartier prioritaire de Saint-Dizier, le Vert au Bois", explique Sébastien Maltot. Ces opportunités de travail sont donc bienvenues.

Par ailleurs, Champ’Ionne travaille en partenariat avec une association d’accompagnement de personnes handicapées, Le Bois l’Abbesse. "Nous prenons des personnes aux handicaps légers. Nous avons par exemple un ancien fondeur qui a été brûlé à 80 %. Il ne peut plus travailler à proximité de la chaleur et pour lui la température fraîche des champignonnières est parfaite", détaille le directeur général. Le recrutement est également facilité par un travail qui ne demande pas de technicité particulière, mis à part de la dextérité et de la finesse. Des compétences retrouvées majoritairement chez les femmes, qui composent 80 % des équipes.

Une dynamique d’économie circulaire

La première enveloppe de 8,5 millions d’euros couvre la partie génie climatique pour l’ensemble des champignonnières. "Nous avons des systèmes de régulation de température, d’humidité et de CO2 prévues pour 27 chambres", indique Sébastien Maltot. Les 3 millions restants serviront donc seulement à la construction de neuf nouvelles cellules.

"Nous savons déjà que nous ne pourrons pas répondre à l’ensemble de la demande. Nous sommes donc très confiants pour notre rentabilité."

Chacune des salles est composée de quatre travées en métal qui grimpent sur six niveaux, ce qui représente 500 m2 de culture. Un procédé quasi-industriel qui fait que Champ’Ionne n’est pas considéré comme agriculteur. Toutefois, elle n’est pas non plus identifiée comme un industriel. "Il y a un trou dans la raquette. Par exemple, pendant le Covid, nous n’avons pas reçu d’aide", pointe le directeur général.

Par ailleurs, bien que les champignons ne soient pas labellisés bio, leur production n’utilise aucun produit phytosanitaire et s’inscrit dans une démarche d’économie circulaire. Les substrats, composés de paille, de fumier et de fientes, sont récupérés auprès d’agriculteurs locaux. Et, une fois qu’ils ne peuvent plus servir à la production de champignons, ils sont redonnés aux agriculteurs pour être utilisés en engrais ou en combustible pour les méthaniseurs.

Après des délocalisations, hausse de la demande française

La demande de champignons de Paris produits en France augmente en moyenne de 4 à 5 % par an. "Quand nos 27 champignonnières seront en activité, nous couvrirons à peine 2 % du marché. Nous savons déjà que nous ne pourrons pas répondre à l’ensemble de la demande. Nous sommes donc très confiants pour notre rentabilité", confie Sébastien Maltot.

En effet, la production des champignons de Paris a souffert des délocalisations. "La France a été le troisième producteur mondial, mais aujourd’hui 80 % de la consommation française vient de Pologne", indique le directeur général. Le groupe ne déroge d’ailleurs pas à la règle et vend également des champignons polonais, une gamme qu’elle compte bien garder. "Les productions françaises et polonaises représentent deux segments de vente différents. La première est vendue plus cher, la seconde en marque repère", détaille le directeur général.

En France, il existe actuellement seulement sept unités de production de champignons de Paris sous le modèle de Champ’Ionne, c’est-à-dire qui ne produisent pas dans une cave naturelle, comme ce fut historiquement le cas en Touraine.

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