Plan de résilience : comment fonctionne le nouveau prêt garanti par l’État adapté à la crise russo-ukrainienne ?
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Plan de résilience : comment fonctionne le nouveau prêt garanti par l’État adapté à la crise russo-ukrainienne ?

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À moins de trois mois de sa disparition, le prêt garanti par l’État accouche d’une nouvelle variante : le "PGE résilience". Cette nouvelle déclinaison doit permettre aux entreprises d’emprunter plus pour surmonter au mieux les multiples conséquences de la guerre en Ukraine sur leur trésorerie. Explications.

Pour espérer obtenir le nouveau "PGE résilience", les entreprises en mal de trésorerie du fait de la crise russo-ukrainienne vont devoir vite prendre rendez-vous avec leur banque… et négocier avec leur conseiller — Photo : Memyjo

La famille du prêt garanti par l'État (PGE) s’agrandit encore. Après ses variantes sectorielles pour l’aéronautique et le tourisme, le PGE se décline, à partir du 8 avril, dans une version "résilience" - du nom du plan de soutien aux entreprises dégainé à la mi-mars pour contrer les effets de la crise russo-ukrainienne. En accord avec les banques et la Commission européenne, le gouvernement a d'ailleurs revu sa copie.

Le plafond relevé, mais le mode de calcul modifié

Le "PGE résilience" sera ainsi, en apparence, plus généreux. Le plafond d’emprunt a été fixé à 15 % du chiffre d’affaires de l’entreprise, contre 10 % initialement prévus. Le tout cumulable avec les 25 % du prêt "historique", celui créé au début de la crise sanitaire.

Ceci étant, le chiffre d'affaires dont on parle n’est plus le même. Il ne s’agit plus de prendre celui de 2019 comme référence, mais de retenir "le chiffre d’affaires annuel moyen au cours des trois dernières années", explique le ministère de l’Économie. Ce qui inclut donc potentiellement le trou d’air subi en 2020, voire 2021, sous l’effet du Covid-19.

Un "PGE résilience" ouvert à tous, mais sur attestation

Deuxième particularité : ce PGE est a priori ouvert à toutes les entreprises, sans condition de taille ni de secteur. Sauf que, dans les faits, il sera orienté vers celles qui sont "pénalisées, dans leur trésorerie, par les conséquences économiques de la guerre en cours, qu’elles soient directes (pertes de contrat avec la Russie, Biélorussie ou Ukraine) ou indirectes (hausse des coûts des intrants et de l’énergie, difficultés temporaires d’approvisionnement…)", insiste Bercy.

Pour le prouver, là encore, pas de critères qualitatifs prédéfinis par l’État. Mais le dirigeant devra produire une sorte de déclaration sur l’honneur. Cette "attestation sur une base déclarative" lui servira à "certifier" qu’il subit bien les contrecoups de la guerre en Ukraine. "Sa banque pourra juger aussi de cet impact, ou non. C’est sur cette base, au cas par cas, qu’elle décidera d’octroyer le PGE résilience", poursuit le cabinet de Bruno Le Maire. En somme, tout se jouera donc dans le bureau de la banque, entre le dirigeant et son conseiller, en fonction de leur lecture commune de la situation financière de l’entreprise.

"Aucune entreprise viable ne sera laissée sur le bord de la route sans accompagnement."

De quoi restreindre la distribution de ce nouveau financement ? Oui, assume le ministère de l’Économie : avec ce prêt garanti, "on vise beaucoup, beaucoup moins d’entreprises qu’il y a deux ans", car le choc de la crise géopolitique actuelle est considéré comme plus contenu et inégalement réparti que celui provoqué par la pandémie de Covid-19. Ce ciblage renforcé était aussi une "exigence stricte" de Bruxelles. En conséquence de cette ligne de conduite, le taux de refus des dossiers par les banques, actuellement à 2,9 %, pourrait nettement grimper dans les prochaines semaines.

Une durée inchangée, mais un délai très court pour en profiter

Pour le reste, le "PGE résilience" reprend toutes les caractéristiques de son grand frère : durée initiale de six ans, avec différé d’amortissement d’une ou deux années, garantie de l’État accordée par Bpifrance, avec une tarification inchangée et la promesse des "principaux réseaux bancaires […] de [le] proposer à prix coûtant sur la durée totale du prêt", indique le communiqué de presse du gouvernement. Les récents aménagements supplémentaires pour décaler le remboursement devraient aussi s’appliquer. Même la date d’échéance pour demander ce PGE est identique : les entreprises ont jusqu’au 30 juin pour démarcher les banques.

Et après ? Le gouvernement avait évoqué un successeur à ce dispositif pour le second semestre 2022. Ce n’était qu’une promesse de campagne, reconnaît aujourd’hui Bercy. Le cadre européen autoriserait bien une telle prolongation jusqu’au 31 décembre, mais, au niveau français, il faudrait en repasser par la loi pour aller à ce terme. Le sort du PGE après le 30 juin sera donc entre les mains de la majorité élue lors des prochaines élections législatives.

Peu d’inquiétudes sur le remboursement des PGE actuels

D’ici là, les entreprises ne devront pas attendre non plus de nouveaux gestes sur les échéances de leur ancien PGE. Sur ce point, le ministère de l’Économie s’est montré ferme et optimiste : il n’y a "pas de difficultés systémiques de remboursement", balaye Bercy. Preuve en est, le taux de défaut, calculé par la Banque de France, serait en baisse continue, désormais évaluée à 3,1 %. "Un chiffre extrêmement faible et similaire à celui des autres prêts de trésorerie à court et moyen terme." Par ailleurs, 48 % des bénéficiaires auraient remboursé au moins en partie leur emprunt (dont 16 % complètement).

Rassuré pour la majorité des 700 000 PGE distribués, Bercy se veut aussi rassurant pour ceux qui n’arriveraient pas à en assurer le remboursement. "Le gouvernement a toujours tenu une ligne très claire sur le sujet : aucune entreprise viable ne sera laissée sur le bord de la route sans accompagnement", martèle le cabinet de Bruno Le Maire. Mais pas question d’aller au-delà des ajustements actés en début d’année.

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