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Perturbé par la crise du Covid-19, l’emploi cadre repartira de l’avant mais en ordre dispersé en 2021
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Perturbé par la crise du Covid-19, l’emploi cadre repartira de l’avant mais en ordre dispersé en 2021

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L’emploi cadre façon puzzle. Après un an de crise du coronavirus, l’Apec dresse un bilan et des perspectives pour le moins contrastées des projets de recrutements des entreprises en 2021. Et pour cause, l’épidémie du Covid-19 devrait laisser derrière elle un marché du travail à deux vitesses, entre solide reprise pour les uns et grosse déprime pour les autres.

Les embauches de cadres ont moins reculé que prévu en 2020, selon l’Apec. Mais le redémarrage pourrait être plus ou moins laborieux cette année, en fonction des régions, des secteurs… et de l’âge des candidats — Photo : ©alotofpeople - stock.adobe.com

À écouter l’Apec, le marché de l’emploi cadre ressortira de la crise du coronavirus comme le ferait une voiture accidentée du garage. Après la panne de l’an dernier, les embauches devraient redémarrer doucement en 2021. Mais à regarder de plus près sous le capot, c’est une reprise à deux vitesses qui va se jouer cette année.

Sortie de route contrôlée en 2020

Premier enseignement (et soulagement) : les recrutements de cadres se sont moins réduits que prévu en 2020. L’Apec en a compté 228 700, en baisse de 19 % en un an. C’est aussi près d’un quart de moins que ce que l’association prévoyait avant la pandémie (l’équivalent de 67 900 embauches non-concrétisées). Mais dans son enquête la plus récente, menée en septembre, elle anticipait un effondrement annuel encore plus fort, proche de 40 %. Au final, l’impact du Covid-19 s’avère donc moins grave que prévu, "comparable à ce que nous avions connu lors de précédentes crises", souligne le directeur général Gilles Gateau.

En 2020, les entreprises ont même réussi à créer des postes de cadres (+37 000 au total, moitié moins qu’en 2019 quand même). Un solde positif rendu possible par la baisse des destructions d’emploi (-8 %). L'Apec y voit l’effet combiné de la crise elle-même, qui freine les démissions et projets de mobilité. Mais aussi et surtout, des aides aux entreprises, dont l’activité partielle, qui ont, eux, limité les licenciements. "La grande question pour 2021 sera de savoir ce qui va se passer avec l’arrêt annoncé de ces dispositifs…", s’interroge Gilles Gateau.

Redémarrage en ordre dispersé en 2021

Et ce n’est pas la seule incertitude qui pèse sur cette année. L’Apec prévoit un rebond "encore modeste" pour 2021. Les 247 000 embauches de cadres attendues correspondent ainsi à une hausse de 8 % en un an, mais un recul de 12 % par rapport à 2019. Plus inquiétant, et comme le laissait entendre Pôle emploi, plus tôt dans la semaine, cette reprise en demi-teinte ne concernera pas tout le monde. Le marché de l’emploi cadre menace même de se disloquer, tiraillé entre ses moteurs traditionnels, déjà prêts à se rallumer, et d’autres secteurs ou territoires, eux, toujours éteints.

La Bretagne accélère, l’Occitanie cale

Au niveau régional, "il y a d’énormes disparités, comme on n’en a probablement plus connu depuis très longtemps", signale Gilles Gateau. La preuve par les extrêmes. Début 2020, l’Apec voyait en l’Occitanie la locomotive des recrutements de cadres. Un an plus tard, la région fait figure de voiture-balai. Elle est la seule à afficher une baisse des projets d’embauche (-1 %, après -29 % l'an dernier). Le Covid-19, et la crise de l’aéronautique, sont passés par là, avec "des répercussion importantes chez les sous-traitants, dans les services à forte valeur ajoutée (ingénierie, informatique)", déplore Gaël Bouron, responsable adjoint des études.

Tout l’inverse de la Bretagne. Stables en 2020, les recrutements devraient y progresser de 9 %, bien aidés par une épidémie moins aiguë et des secteurs moins exposés (comme l’agroalimentaire ou la cybersécurité). Résultat, elle serait la seule à dépasser son niveau d’avant-coronavirus. Même les "places fortes de l’emploi cadre" (Île-de-France, Auvergne Rhône-Alpes, Hauts-de-France) ne feront pas mieux, en dépit d’un taux de croissance plus élevé en 2021 (+10 à 11 %).

Des secteurs à géométrie variable

Constat identique au niveau sectoriel. La reprise se fera sur plusieurs rythmes. À toute vitesse dans les domaines habituellement les plus dynamiques (+16 % pour l’informatique, +14 % dans le juridique, comptabilité et conseil, +13 % pour l’ingénierie et R & D). Au pas, voire à bout de souffle dans d’autres. C’est le cas, sans surprise, pour l’industrie des transports (-8 %) ou l’hébergement-restauration (-20 %).

Les jeunes au bord de la route

Ultime distorsion du marché mise en lumière par l’Apec, la crise du Covid-19 pénalise les plus âgés (-27 % d'embauches par rapport à 2019, pour les cadres avec plus de 20 ans d’expérience), comme les plus jeunes (-16 %). Pour ces derniers, les effets sont multiples et déjà visibles. Ils sont ainsi moins nombreux à avoir trouvé un travail, douze mois après leur diplôme (69 % des Bac +5 sortis en 2019 sont en emploi, soit 16 points de moins que leurs prédécesseurs) ; moins souvent en CDI (59 % des cas, -10 points) ; et moins bien rémunérés (31 000 euros annuels en moyenne, 1 000 de moins qu’auparavant).

Seule bonne nouvelle, "pour l’instant, il n’y a pas de phénomène massif de déclassement, avec des jeunes qui occuperaient un emploi non-cadre, éloigné de leur formation", note Gilles Gateau. Mais "très clairement, on aura un phénomène d’embouteillage dans les prochains mois, entre les promotions 2019 et 2020 moins bien insérés et celle de 2021 qui arrive, le tout avec un volume d’embauches qui n’est pas celui de l’avant-crise". Le coronavirus n’a donc pas fini de gripper la mécanique du marché de l’emploi cadre.

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