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Low-tech, usine distribuée : CPM Industries en route vers l’éco-durabilité
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Low-tech, usine distribuée : CPM Industries en route vers l’éco-durabilité

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Concepteur et fabricant en chaudronnerie et mécanique industrielles, CPM Industries explore de nouveaux modèles industriels éco-durables. La PME normande se met à la low-tech et va ouvrir un laboratoire de mécanique au grand public et aux entreprises.

Spécialiste du prototypage et de la petite série pour outillage sur-mesure, CPM Industries va investir plus de 850 000 euros pour un projet d’agrandissement de 800 m2 de son site industriel de Saint-Romain-de-Colbosc — Photo : DR

Fondé en 1990, CPM Industries est en train d’expérimenter de nouvelles façons de faire de l’industrie. La PME familiale normande s’ouvre ainsi à la low-tech et aux nouveaux modèles industriels éco-durables. Lutter contre la sophistication technologique et militer pour plus de simplicité, c’est le contrepied industriel pris par ce concepteur et fabricant en chaudronnerie et mécanique industrielles, basé à Saint-Romain-de-Colbosc, en Seine-Maritime. "Nous avons intégré les préceptes de l’éco-conception au sein de notre bureau d’études, ce qui n’est pas toujours facile à faire accepter au client", explique Élise Hauters, cogérante de CPM Industries avec son frère Benoist Panchout. Faire comprendre au client la juste fonctionnalité d’un outil en répondant uniquement à l’usage, soit le contraire du tout technologique, c’est la démarche éco-durable qu’entend suivre Élise Hauters, soucieuse de l’impact environnemental de son entreprise qui emploie 36 salariés et affiche trois millions d’euros de chiffre d’affaires : "L’objectif est de lutter contre l’obsolescence, refuser d’automatiser ce qui ne le nécessite pas. L’automatisation a son intérêt mais pas partout, il y a des domaines où le geste humain reste plus économique", soutient la dirigeante.

Intégrée entièrement dans ses process, la démarche d’éco-conception permet à l’entreprise de simplifier les phases de conception par la standardisation des éléments, "en faisant en sorte qu’une fonction puisse servir à plusieurs usages", précise la dirigeante de l’entreprise spécialiste de la fabrication d’outillages et de chaudronnerie fine pour les secteurs de l’aéronautique ou encore de l’automobile.

Ouverture d’un laboratoire de mécanique

"Nous voulons développer des ateliers de fabrication par soi-même. L’ambition est de développer un réseau d’usines distribuées, c’est-à-dire plusieurs petits sites comme le nôtre répartis sur le territoire afin de constituer un réseau d’usine de proximité", explique Elise Hauters, codirigeante de CPM Industries — Photo : © armelvrac

CPM Industries va ouvrir un laboratoire de mécanique au printemps 2024, dédié au développement de l’innovation mécanique. Un investissement de 300 000 euros sur une surface de 200 m² pour un lieu dont la première ambition est d’accueillir les clients de l’entreprise dans un milieu connecté à la production du site industriel afin de finaliser la mise au point des projets : "L’idée est d’équiper le laboratoire d’outils facilement manipulables pour pouvoir réaliser du proto-paillasse (pré-validation d’un concept technique, NDLR) et valider des solutions techniques, afin d’éviter de revenir sur la fabrication des produits en cours de production", précise Élise Hauters. Une version miniature d’un atelier de chaudronnerie avec des équipements plus légers, comme une cintreuse manuelle au lieu d’une cintreuse numérique, ou encore une table ergonomique pour le montage : "Un lieu hybride entre une salle de techno et un véritable atelier de production en chaudronnerie", précise Élise Hauters.

Le projet de laboratoire a aussi une visée pédagogique avec l’accueil de collégiens pour leur faire découvrir la mécanique. Avec au programme, une réflexion autour de la conception d’un projet, puis la réalisation de celui-ci : "L’idée est de susciter la curiosité autour d’un gros mécano, en créant une mini-usine accessible en petits groupes de 12. Un lieu de transmission du savoir pour le jeune public, sans perturber la production du site", s’enthousiasme la dirigeante de CPM Industries, qui souhaite susciter des vocations grâce à sa démarche. Menée en partenariat avec l’Éducation Nationale et avec le soutien de la Région Normandie, celle-ci s’inscrira dans un parcours d’orientation des collégiens.

Vers la fabrication distribuée

Avec son laboratoire innovant, l’entreprise souhaite également proposer pendant les week-ends des ateliers destinés à un public soucieux de participer à la fabrication de ses outils ou projets. "Nous voulons développer des ateliers de fabrication par soi-même. Nous proposons ces ateliers et outils pour le montage, et les associations, particuliers ou professionnels viennent développer chez nous des projets low-tech. Avec des outils simples d’usage, comme une petite tronçonneuse à tubes, une cintreuse manuelle, des imprimantes 3D, ou encore des tables de montage, sous la supervision d’un responsable de CPM pour des projets en open source".

Le spécialiste du prototypage et de la petite série pour outillage sur-mesure va ainsi investir plus de 850 000 euros pour un projet d’agrandissement de 800 m² de son site industriel de Saint-Romain-de-Colbosc — Photo : © armelvrac

Cette démarche s’avère importante pour la dirigeante qui voit dans ce modèle une partie de l’avenir du développement de l’industrie. "C’est une nouvelle façon de travailler. L’ambition est de développer un réseau d’usines distribuées, c’est-à-dire plusieurs petits sites comme le nôtre répartis sur le territoire afin de constituer un réseau d’usines de proximité. En démontrant que c’est possible et que d’autres entreprises prennent exemple sur nous comme des garages ou des PME. Et rendre la low-tech plus accessible au grand public, en mettant nos capacités industrielles au service de ce type de produits. Une façon de professionnaliser la low-tech, les produits ainsi fabriqués étant assurables et conforme à la législation grâce à notre homologation professionnelle qui engage notre responsabilité", précise Élise Hauters.

La dirigeante compte notamment travailler sur ce sujet avec l’association rouennaise Les Vagabonds de l’énergie qui fait la promotion des énergies intermittentes (sources de production d’énergie renouvelable correspondant à des flux naturels, qui ne sont pas disponibles en permanence comme le solaire et l’éolien) et de la low-tech (ensemble des technologies utiles, durables et économiques visant la sobriété énergétique et matérielle, NDLR).

CPM Industries veut ainsi s’inscrire dans une nouvelle tendance qui annonce une transformation des modèles de production sur le territoire, les micro-usines ayant pour fonction de s’adapter aux ressources locales et de produire à la demande. Pour cela, la PME normande a postulé en mars dernier pour un projet expérimental d’usine distribuée, suite à un appel à projets de l’Ademe.

Augmenter la production de 50 %

CPM Industries mène une politique volontariste de féminisation de son effectif. Près d’un tiers des salariés sont des femmes au sein de l’entreprise. — Photo : © armelvrac

CPM Industries cherche aussi à développer ses capacités de production, le spécialiste du prototypage et de la petite série pour outillage sur-mesure va ainsi investir plus de 850 000 euros pour un projet d’agrandissement de 800 m² de son site industriel de Saint-Romain-de-Colbosc. Un investissement prévu au premier semestre 2024 qui devrait permettre à la PME d’augmenter de 50 % ses capacités de production. La dirigeante ne fait pas l’impasse sur les nouvelles technologies qui peuvent s’avérer très utiles pour "limiter les surcoûts et obtenir un avantage compétitif". L’entreprise s’est ainsi dotée de moyens de réalité virtuelle capables de permettre au client d’identifier en amont de la production les éventuelles options manquantes et les conflits en environnement de travail. "Lors des phases avancées de projets, nous nous sommes rendu compte qu’il fallait parfois revoir la copie. L’utilisation de la 3D nous permet d’aller plus loin avant de faire des modifications coûteuses en phase de fabrication".

Une production plus durable

La dirigeante veut accompagner sa démarche éco-responsable via les énergies renouvelables. Un projet de champ photovoltaïque de 700 m² est ainsi en développement pour couvrir jusqu’à 70 % des besoins en électricité de l’entreprise. Une cuve de récupération des eaux pluviales sera également installée sur le site à destination du process industriel, ainsi que pour les sanitaires.

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