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Hervé Kratiroff (Solexia) : "Notre ambition est de faire des vins haute couture"
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Hervé Kratiroof président et cofondateur de Solexia "Notre ambition est de faire des vins haute couture"

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Solexia, cofondé et présidé par Hervé Kratiroff, a finalisé cet été l’acquisition du domaine viticole des Terres de Velle en Bourgogne. Une acquisition passion mais aussi stratégique pour le fonds indépendant d’investissement entrepreneurial lyonnais initialement spécialisé dans l’agroalimentaire.

Hervé Kratiroff, président et fondateur du fonds d’investissement lyonnais Solexia — Photo : Gilles Cayuela

Vous venez de reprendre un domaine viticole en Bourgogne. De quel domaine s’agit-il ?

Avec mon associé Eric Versini, nous avons repris le domaine des Terres de Velle, qui se trouve à Auxey-Duresses (Côtes d'Or). Ce domaine emploie 4 salariés et exploite 7 hectares de vignes dont 6 en pleine propriété et un en fermage. Ce domaine possède les plus belles appellations de la Côte de Beaune parmi lesquelles on trouve : Volnay Premier Cru, Meursaut Premier Cru, Puligny-Montrachet Premier Cru ou encore Chassagne-Montrachet Premier Cru. Et puis, nous avons aussi un grand cru avec un Corton-Charlemagne en pleine propriété. Ce qui est assez extraordinaire. Au total, chaque année, 16 vins sont élaborés à partir des récoltes de ce domaine qui a été construit à partir de 2009 par un investisseur et par le couple de gérants qui va poursuivre l’aventure avec nous.

Vous parlez de domaine "construit" : que voulez-vous dire ?

L’investisseur a racheté des vignes pour constituer son domaine au fil des années. En 2018, il a même racheté le domaine Dublère. Mais n’étant pas passionné par les vins de Bourgogne et ne souhaitant plus investir, il a émis le souhait de céder le domaine. De notre côté, cela faisait une quinzaine d’années que l’on cherchait à prendre un domaine en Bourgogne : Côte de Beaune ou Côte de Nuits exclusivement. Cette volonté est d’abord le fruit d’une passion que nous avons pour les vins de Bourgogne, des vins que l’on aime boire. Nous aurions pu acheter depuis longtemps un domaine dans le Beaujolais ou le Languedoc mais ces vins ne nous fascinent pas. Avec le domaine des Terres de Velle, nous avons trouvé des vins qui nous enivrent.

Quelles ambitions portez-vous pour ce domaine ?

Notre ambition est de faire des vins "haute couture". Ce sera la clé de voûte et le sens de toutes les décisions que nous prendrons à l’avenir tant au niveau de la viticulture que de la vinification ou de la distribution. Là où l’ancien propriétaire assemblait trois parcelles de Meursault, nous allons faire trois Meursault différents car nous avons la conviction que c’est une idiotie d’assembler des Luchet avec des Grand-Charrons. Ce sont des terroirs trop éloignés. Nous avons une vision très claire de l’esthétisme des vins que l’on souhaite faire. L’idée va être de mettre en valeur les climats du domaine à travers des cuvées parcellaires.

Et en termes de business, quels sont vos objectifs ?

Aujourd’hui, le domaine fait environ 800 000 euros de chiffre d’affaires. Nous voulons l’amener autour des 2 millions d’euros. Nous avons une clientèle à l’export importante (60 %) et une belle marge de progression. Nous faisons 40 000 bouteilles par an environ quand le millésime est bon, 30 000 s’il n’est pas "top". Nous avons ciblé une vingtaine de pays dans lequel nous avons identifié l’importateur le plus qualitatif à nos yeux. Très souvent, c’est celui qui importe le Romanée Conti (vin le plus recherché au monde, NDLR). C’est avec ces gens-là que nous avons envie de travailler et à qui nous avons envie de proposer nos vins. Or, si sur 30 000 bouteilles à l’année vous en avez 20 000 qui partent à l’export, cela fait à peine 1 000 bouteilles par pays. Ce n’est rien !

Votre fonds d’investissement Solexia est, à l’origine, plutôt spécialisé dans l’agroalimentaire. Pourquoi avoir repris un domaine viticole ?

Cette acquisition est certes avant tout le fruit d’une passion mais elle s’inscrit aussi dans une logique patrimoniale. Aujourd’hui Solexia repose sur deux branches : la branche historique agroalimentaire et la branche patrimoniale avec notre hôtellerie privative de luxe qui s’appelle le WOL. Cette offre d’hôtellerie privative est née en plein Covid avec l’acquisition de villas et résidences de luxe sur 4 sites : Le Golfe de Saint-Tropez, Saint-Barth, Val d'Isère et Megève. Aujourd’hui, nous comptons 46 chambres et notre objectif est d’atteindre les 100 chambres avec la même stratégie que celle que l’on a sur la branche agroalimentaire de Solexia.

C’est-à-dire ?

En privilégiant un développement sur plusieurs sites pour limiter les risques. Le pôle agroalimentaire de Solexia représente quasiment 130 millions d’euros en 2023, répartis sur 10 sites. Et non une seule société qui pèserait 130 millions d’euros.

Pourquoi cette diversification dans l’hôtellerie de luxe ?

L’agroalimentaire est notre cœur de métier. Nous avons acheté des entreprises sur des niches qui fonctionnent très bien et qui génèrent de l’excédent de cash-flow. Notre réflexion, c’est : qu’est-ce que l’on fait de cet excédent ? Racheter d’autres entreprises dans l’agroalimentaire ? Oui, mais nous ne pouvons pas faire plus d’une opération par an et encore ! Il faut intégrer l’entreprise, la gérer et surtout la trouver. Nous avons donc eu l’envie de réinvestir ces excédents de cash-flow dans quelque chose de plus patrimonial. Nous avons alors décidé d’investir dans l’immobilier de luxe avec une vraie vision managériale puisque les salariés qui sont en CDI chez WOL logent tous dans les propriétés que nous avons achetées. Il faut aussi replacer le contexte des taux d’intérêt de l’époque. Placer nos excédents de cash-flow dans des portefeuilles financiers nous aurait rapporté zéro rémunération sauf à prendre de très gros risques. Or, notre métier, ce n’est pas de gérer des produits financiers mais d’être des entrepreneurs.

Quelle va être la suite pour Solexia ? Une nouvelle acquisition dans l’agroalimentaire ?

Oui, nous sommes en plein dedans. L’opération devrait être finalisée et dévoilée en début d’année prochaine.

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