Ils sont résolus à bousculer les usages des bouteilles et flacons en verre. Les créateurs d’Eco In Pack, Martin Calmettes et Pierre-Olivier Bouvry, prêchent pour le réemploi dans les secteurs qu’ils connaissent bien. "Le packaging c’est 40 à 50 % du poids environnemental en parfumerie et spiritueux. Fabriquer une bouteille en verre émet autant de CO2 que la transporter sur 7 000 km de route. Nous voulons promouvoir un modèle circulaire et aider les industriels à opérer ce virage", explique Martin Calmettes. Les deux ingénieurs en packaging sont passés par Givenchy, Bulgari puis Rémi Cointreau pour l’un, LVMH, MakeUpForever pour l’autre. "Nous mesurons parfaitement combien le packaging est crucial pour les marques, combien il pèse financièrement et environnementalement aussi."
Dimension inclusive
En 2021, soutenus par l’Ademe, BPI et la Région, ils créent un atelier pilote d’expérimentation du lavage de bouteilles, principalement de vin, spiritueux et sirops pour commencer. "Même si c’est tout un système que nous souhaitons mettre en place - de collecte, tri, lavage, redistribution - (appelé "dispositif Clean Bottle", NDLR), ce n’est ni la collecte ni la redistribution qui pose problème. Mais le lavage." À raison de 500 bouteilles par heure, le process hôte les étiquettes, efface les numéros de lot, nettoie et remballe en palette des bouteilles de toutes les formes, triées par catégorie. "Hors de question d’encourager la standardisation. Nous avons des bordelaises, des bourguignonnes, des modèles spécifiques, etc." Le tri et la manipulation sont effectués par les travailleurs de deux Esat, dont l’association Arche qui héberge l’atelier pilote d’Eco In pack. "Nous souhaitions une dimension inclusive", sourit Martin Calmettes.
Industrialisation et levée de fonds
Deux ans plus tard, démonstration est faite que le process ne génère aucun défaut. "C’est important de rassurer." La demande trépigne déjà. "Beaucoup de metteurs en bouteilles sont intéressés, parfois échaudés par les politiques de certains verriers. Plusieurs seraient prêts à nous acheter tous nos stocks moyennant que l’on soit prêt." Pour la collecte, des partenariats ont été conclus avec des déchetteries, des grossistes qui livrent et débarrassent les cafés-hôtels-restaurants, des festivals comme Bordeaux fête le vin, qui brassent des centaines de milliers de bouteilles". Le principe étant toujours de soustraire la matière à la poubelle, fut-elle destinée ensuite au recyclage. "Selon l’Ademe, le réemploi équivaut à -76 % de la consommation d’énergie par rapport à du verre recyclé."
Passer de 500 000 bouteilles
à 6 voire 7 millions
Pour répondre à l’enjeu Eco In Pack (six collaborateurs) espère lever 2,5 millions d’euros d’ici septembre et monte en puissance. "De 500 000 bouteilles par an, nous allons passer à 6 voire 7 millions l’an prochain grâce à notre première ligne industrielle, installée chez notre partenaire Bernadet, spécialisé dans les décors de bouteilles en verre (5,5 M€ CA, 90 salariés). Nous l’alimentons en bouteilles, il opère et nous lui payons la prestation." C’est ce modèle qu’Eco In Pack veut multiplier pour impliquer la filière. À la clé, un prix "vite compétitif" pour les industriels et un marché colossal pour Eco In Pack. "En France, nous consommons 4,5 milliards de bouteilles de vin et spiritueux. Avec les bières et sirops c’est 19 milliards. Si l’on cumule toutes les initiatives de réemploi actuelles, nous n’avons qu’une capacité de 100 millions de bouteilles !" Sans même aborder le marché de la parfumerie auquel Eco In Pack compte aussi s’intéresser.
