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Armor : "Une ETI nantaise qui rachète un leader américain, c'est un signe d'espoir pour l'industrie française"
Interview Nantes # Industrie # Fusion-acquisition

Hubert de Boisredon PDG  "Une ETI nantaise qui rachète un leader américain, c'est un signe d'espoir pour l'industrie française"

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En rachetant Iimak, son principal concurrent sur le marché américain, le groupe industriel nantais Armor renforce son activité Transfert Thermique, qui représente 80 % de son chiffre d'affaires. Hubert de Boisredon, PDG d'Armor, met en perspective cette acquisition structurante pour l'entreprise.

Hubert de Boisredon, PDG d'Armor — Photo : © OIOO studio - BOISSAYE LIONEL -

Vous venez de racheter Iimak, le principal concurrent d’Armor en Amérique du Nord. Quel est le sens de cette acquisition ?

Cette opération est destinée à renforcer notre activité Armor Industrial Coding and Printing, qui représente 80 % de notre chiffre d’affaires. Elle porte sur la conception et la fabrication de rubans transfert thermique qui sont utilisés dans l’industrie pour imprimer des données variables de traçabilité sur les étiquettes et emballages souples : code-barres, numéros de lot… Cette acquisition fait sens d’un point de vue stratégique. Armor est leader mondial sur ce marché. Mais notre leadership s’exerce en Europe et en Asie, pas sur le marché américain qui est le plus important du monde. Iimak, qui est notre concurrent historique, nous procure donc une belle complémentarité géographique, mais aussi produit. Le nouvel ensemble Armor Iimak propose la gamme la plus complète du marché. Iimak nous apporte également son site d’enduction de Buffalo, dans l’état de New York, doté de technologies proches des nôtres, car nées de la même licence. L’activité transfert thermique du nouvel ensemble atteint 322 millions d’euros pour 1 650 salariés. J’ai recruté pour piloter cette nouvelle entité Christian Lefort, ancien directeur général d’Evolis. Il aura pour mission de mener à bien l’intégration d’Iimak dans Armor et de développer le nouvel ensemble.

Avec cette acquisition, Armor change de dimension et étend son implantation internationale ?

Avec le rachat d’Iimak, le chiffre d’affaires d’Armor passe de 274 millions d’euros en 2020 à 372 millions (pro forma) pour 2 450 salariés. Iimak, c’est 450 salariés pour un chiffre d’affaires d’environ 102 millions d’euros. En 2002, Iimak avait essayé de racheter Armor. Aujourd’hui, nous sommes trois fois plus gros qu’eux et c’est nous qui les rachetons. Depuis dix ans, nous enregistrons une croissance de 8 à 10 % par an sur un marché qui progresse globalement de 4 à 5 % par an, porté par des exigences de traçabilité toujours plus importantes, encore renforcées par la crise sanitaire. Mais la croissance d’Armor est également organique. Elle est le fruit de nos investissements dans notre outil industriel pour développer la productivité, via notamment des machines à grande vitesse, dans l’innovation pour élargir notre offre produit et notre largeur de gamme et dans l’expansion internationale, avec l’acquisition d’unités de découpe dans les pays émergents, inspirée de notre modèle de co-industrialisation.

Comment fonctionne ce modèle de croissance ?

Nous fabriquons dans notre usine de La Chevrolière, près de Nantes, dans une petite unité en Chine et, maintenant, à Buffalo aux États-Unis de grandes bobines encrées, appelées jumbos, qui sont ensuite débitées en plus petits rouleaux, adaptés à la demande locale dans une vingtaine de sites de découpe à travers le monde. L’objectif est de pouvoir livrer tous nos clients dans un délai de trois à cinq jours au maximum. C’est pourquoi nous allons poursuivre notre stratégie de maillage du monde entier avec de nouvelles unités de découpe, en saisissant toutes les opportunités de croissance externe nous permettant de nous rapprocher de nos clients finaux. Nous ciblons plus particulièrement l’Asie, l’Amérique Latine et l’Afrique, où la croissance est très forte. Nous avons, par exemple, ouvert une petite unité au Kenya, un pays qui accueille des usines délocalisées de Chine en raison de la hausse du coût de la main-d’œuvre dans ce pays. Nous avons fait le choix de nous y implanter tôt pour les accompagner dans leur croissance.

Ce modèle prouve-t-il que l’on peut être compétitif en produisant en France ?

Oui, c’est un message d’espoir pour l’industrie française. Le rachat d’Iimak par Armor montre qu’il est possible pour une ETI française de racheter un leader nord-américain, qui plus est en sortie de crise. La pandémie nous a renforcés, car nous avons capitalisé sur les investissements réalisés tout au long de ces années pour assurer une logistique parfaite. Cela a fait la différence avec la Chine qui a misé sur des prix bas, mais dont les failles logistiques ont été révélées au cours de cette pandémie. Cela nous conforte dans notre stratégie d’investissement à long terme dans les compétences, la qualité et la robotisation. Nous espérons ainsi donner envie à d’autres ETI de franchir le pas pour réaliser des acquisitions structurantes.

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