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L'État ressort une version simplifiée de son aide aux entreprises les plus gourmandes en énergies
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L'État ressort une version simplifiée de son aide aux entreprises les plus gourmandes en énergies

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Le guichet nouveau est arrivé. Le gouvernement a levé le voile sur les nouveaux contours de sa subvention aux activités les plus gourmandes en gaz et en électricité. Cet énième effort de simplification ne règle toutefois pas tous les problèmes rencontrés par un dispositif jusqu’ici décrié par les entreprises.

Critiquée pour sa complexité, l’aide de l’État aux activités énergivores vient de ressortir dans une version que le gouvernement estime plus "simple" et plus "rapide" que ses précédentes moutures — Photo : ArcelorMittal

On oublie tout et on recommence, encore. L’aide aux entreprises les plus gourmandes en énergie (re)fait peau neuve, dans une version qui se veut plus "efficace", "simple" et "rapide". À vrai dire, il sera difficile de faire pire que le dispositif précédent. Jugé bien trop complexe, il a été largement boudé depuis son lancement : sur les 3 milliards d’euros prévus pour cette aide dans le "plan de résilience", l’État n’en a distribué que 0,4 % en moins de cinq mois, selon Le Parisien. Soit 12 millions d’euros. Une goutte d’eau, alors qu’au même moment, pourtant, la flambée des prix mettait le feu aux poudres dans les entreprises.

Cette fois, le ministère de l’Économie espère avoir trouvé la bonne formule, grâce à une série de simplifications, promises de longue date… mais pas rétroactives. Autrement dit, elles ne sont valables que pour les demandes visant les dépenses de gaz et d’électricité à partir de septembre. Les anciens critères, plus restrictifs, restent donc en vigueur pour les périodes précédentes, de mars à août. Autre précision : les changements annoncés ce week-end, de manière étonnamment discrète, au vu des attentes et des besoins, doivent encore être confirmés par décret.

Un "guichet" d’aides à trois étages

Présenté désormais comme un "guichet", le dispositif se décompose toujours en trois étages. Le premier, plafonné à 4 millions d’euros (contre 2 M€ jusqu’à présent), se veut plus généraliste, quand les deux autres, limités respectivement à 50 et 150 millions (au lieu de 25 et 50 M€), ciblent davantage les ETI et grandes entreprises les plus gourmandes en énergie et exposées à la concurrence internationale.

Pour les heureux élus, le ministère de l’Économie promet, dans le premier cas, de couvrir "50 % de l’écart entre la facture 2021 majorée de 50 % et la facture 2022, dans la limite de 70 % de la consommation 2021". Dans les deux tranches supérieures du guichet, le taux de prise en charge passe à, respectivement, 65 et 80 %.

La subvention de base rendue plus simple et accessible

En attendant, le premier échelon du guichet, limité donc à 4 millions d'euros, concerne bien toutes les entreprises, créées avant le 1er décembre 2021, dès lors qu’elles remplissent deux conditions sur la période 2022 visée par leur demande : le tarif, auquel elles ont payé leur gaz ou leur électricité a augmenté d’au moins 50 % (et non plus 100 %) par rapport au prix moyen payé en 2021 ; leurs dépenses énergétiques pèsent plus de 3 % de leur chiffre d’affaires de l’an dernier (auparavant, c’étaient les factures 2021, et non 2022, qui étaient rapportées au CA 2021).

Plus besoin, en revanche, de subir des pertes d’exploitation, ni même un recul de son EBE : ce critère, "très compliqué à calculer, a été retiré, car il était pénalisant pour les PME", a expliqué le ministre de l’Économie Bruno Le Maire, le 21 novembre, sur France Info. De même, le dossier se veut plus facile à monter : fini le recours obligatoire à un expert-comptable ou un commissaire aux comptes. Les seules pièces justificatives exigées par l’administration sont "uniquement" les factures d’énergie concernées, une fiche de calcul de l’aide (disponible sur le site impots.gouv.fr), le RIB de l’entreprise, ainsi qu'"une déclaration sur l’honneur attestant que [la société] remplit les conditions et l’exactitude des informations déclarées", assure Bercy. Autre engagement du ministère : la réactivité. Le dépôt des dossiers pour septembre et octobre s’est ouvert le 19 novembre, avec quelques jours de retard sur le calendrier prévu. Mais "les versements interviendront dans deux à trois semaines", a promis Bruno Le Maire à la radio.

Les aides plus généreuses restent plus difficiles à obtenir

Las, ces efforts de clarté et de simplicité ne se retrouvent pas vraiment aux étages supérieurs du dispositif. Dans le cas de ces "aides renforcées", la procédure n’ouvrira d’abord que "fin novembre" et la liste des secteurs autorisés à solliciter l’aide maximale de 150 millions d'euros n’est pas encore connue.

Mais au-delà de ce délai et du flou qui en découle, la complexité vient plutôt des critères d’éligibilité. Le premier est identique à celui retenu pour l’aide de base, à savoir que le prix de l’énergie supporté par le demandeur doit avoir été multiplié par 1,5 par rapport à la moyenne de l’an dernier.

La deuxième condition évolue : cette fois, ce sont les dépenses de gaz et d’électricité de 2021 qui doivent s’élever à plus de 3 % du chiffre d’affaires 2021. Sinon, il est possible de prendre comme référence le premier semestre 2022. Dans ce cas, les coûts supportés de janvier à juin doivent dépasser de plus de 6 % le chiffre d'affaires réalisé sur cette même période.

Enfin, le critère de l’EBE est, ici, bel et bien maintenu : pour espérer toucher jusqu’à 50 ou 150 millions d’euros, les entreprises devront justifier d'"un excédent brut d’exploitation soit négatif [au moment de la demande], soit en baisse de 40 %" par rapport à l’année passée. Un seuil que Bruno Le Maire trouvait trop élevé fin octobre. Mais sa tentative d’obtenir son abaissement à 30 %, auprès de la Commission européenne, a visiblement échoué.

Les PME exclues du guichet électricité en 2023

Dernière subtilité, et non des moindres : la prise en charge des factures de gaz, quel que soit le niveau d’indemnisation appliqué, restera ouverte à tous jusqu’au 31 décembre 2023. En revanche, sur la partie électricité, les TPE-PME ne pourront plus se tourner vers le guichet dès le 1er janvier prochain. À cette date, en effet, le nouvel "amortisseur" du gouvernement est censé prendre le relais.

Reste à savoir désormais si ces différentes solutions répondront mieux aux besoins des entreprises et aux multiples alertes de leurs représentants. Rien n’est moins sûr, dans la mesure où les uns et les autres appelaient à d’autres réponses, notamment un plafonnement des prix de l’énergie (mais ces réformes semblent bloquées au niveau européen) ou la généralisation du "bouclier tarifaire" (mais ce retour à une forme de "quoi qu’il en coûte" reste exclu par le gouvernement).

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