Comment l'État compte accélérer l'implantation de sites industriels et logistiques en France
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Comment l'État compte accélérer l'implantation de sites industriels et logistiques en France

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Priorité à la souveraineté. Dans sa course à la réindustrialisation, relancée par la guerre en Ukraine, le gouvernement fait un ultime effort, avant la fin du quinquennat, pour simplifier encore la vie des porteurs de projets industriels. L’objectif est double : identifier un maximum de sites prêts à l’emploi et compresser au minimum les délais de l’administration.

À l’heure des "méga usines", comme celle projetée par Verkor, dans les batteries électriques, à Dunkerque, l’État part à la recherche de sites de grande taille — Photo : DR

Accélérer encore. Redécouvertes à la faveur de la crise du Covid-19 et de la guerre en Ukraine, la souveraineté industrielle et l’indépendance énergétique doivent être amplifiées, ont martelé les membres du gouvernement, lors de la présentation du "plan de résilience". Or, pour y parvenir, il faut faciliter l’implantation de nouvelles usines sur le territoire, sans pour autant sacrifier les exigences environnementales. C’était déjà l’objectif de la loi dite ASAP de décembre 2020. Des mesures visiblement insuffisantes : l’exécutif a décidé de remettre sur le métier l’ouvrage de la simplification administrative, et toujours aussi vite que possible.

Deux dispositifs pour accroître le foncier disponible

Pour approfondir sa démarche, le gouvernement a pioché dans un rapport de janvier 2022 de Laurent Guillot. L’ancien dirigeant du groupe Saint-Gobain entendait justement s’attaquer aux "deux écueils" des porteurs de projets industriels et logistiques en France : "les délais réels des procédures administratives, qui s’écartent significativement des délais réglementaires, et le foncier immédiatement disponible […] qui va se raréfier avec l’objectif de zéro artificialisation nette des sols à horizon 2050". Pour répondre à ce double enjeu, le gouvernement veut approfondir deux dispositifs existants.

• Accentuer la logique des "sites industriels clés en main"

D’abord les sites "clés en main". Imaginé en 2019, ce label vise des terrains prêts à l’emploi, dans la mesure où plusieurs procédures administratives (liées à l’urbanisme, l’archéologie préventive et l’environnement) y ont déjà été menées par anticipation. Au total, 127 lieux ont été retenus en 2020 et 2021. Insuffisant : l’État va élargir sa sélection grâce à des "relèves régulières de propositions émanant des collectivités locales".

En contrepartie, le respect des critères sera renforcé pour les sites déjà labellisés, car certains ne respectent pas le cahier des charges, déplore le rapport de Laurent Guillot, d’où le "risque de dégrader la confiance des porteurs de projet dans ce dispositif". Ces industriels et logisticiens seront "mieux [orientés] vers des sites à plus faibles enjeux environnementaux", promet le gouvernement, sans plus de précision.

Prochainement, un appel à propositions "Grands sites" va être lancé pour trouver trois à cinq lieux de plus de 300 hectares capables d’accueillir des "méga projets". À l’ère des "gigafactories" de batteries électriques ou d’hydrogène, l’idée est de combler un trou béant dans la raquette des sites "clés en main" : la superficie moyenne des projets lauréats des premières promotions oscillait en effet entre 22 et 34 hectares.

• Réorienter le "fonds friches" vers les activités économiques

Deuxième pilier de ces actions, le fonds friches. Créé par le plan de relance, pérennisé depuis, cet outil de réhabilitation de terrains exploités par le passé semble davantage profiter à la construction de logements que d’usines. D’où la volonté affichée de rééquilibrer au profit des activités économiques. Ni le rapport Guillot ni le gouvernement n’expliquent toutefois comment. Mais l’enjeu est de taille : "entre 90 000 et 150 000 hectares" de friches industrielles attendent de reprendre vie.

Trois mesures pour réduire les délais administratifs

Pour accélérer les implantations industrielles et logistiques, l’État doit aussi revoir sa propre copie. Car il y a urgence : la France souffre du grand écart "entre les délais théoriques et réels de ses procédures". Laurent Guillot l’estime à +8 mois pour un projet d’usine soumis à autorisation environnementale et +4 mois pour un site logistique sujet à enregistrement. En la matière, le gouvernement envisage trois mesures en particulier.

• Moins de requêtes complémentaires

Objectif "zéro demande de pièces complémentaires" en amont des autorisations environnementales. C’est le cap préconisé par Laurent Guillot. L’exécutif ne va pas jusque-là, mais promet une circulaire pour exiger à l’administration de "limiter au maximum" ses requêtes additionnelles. Ce qui passera par une "densification" des échanges avant le dépôt formel des dossiers par l’entreprise, "pour gagner en efficacité et en rapidité". L’idée, défendue dans le rapport, est de transformer ces échanges préalables en véritable "phase de pré-recevabilité".

• Plus de suivi dans les préfectures

Cette reprise en main passera aussi par les préfectures. "Un sous-préfet à l’investissement sera nommé dans chaque région", annonce le gouvernement. Sa mission consistera à "suivre les projets" et "animer les différents services responsables", le tout avec "un objectif d’amélioration de l’accompagnement" des acteurs économiques.

• Encore une réforme des autorisations environnementales

À plus long terme, une nouvelle réforme des autorisations environnementales est envisagée. Un "travail technique" va être lancé sur le sujet. Il s’agirait, en l’occurrence, pour les services de l’État, de lancer plus tôt l’enquête publique, réaliser une seule étude de recevabilité et mener de front plusieurs aspects de la procédure. Le tout, encore une fois, pour compresser les délais, de 9 à 6,5 mois, espère Laurent Guillot.

Une telle réforme ne devrait toutefois pas voir le jour avant 2024, tempère l’ancien dirigeant. Ces démarches ont déjà beaucoup changé récemment, et perturbé tout autant l’administration que les porteurs de projets eux-mêmes.

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