Gagner en souveraineté française et européenne face à la Chine en matière de panneaux photovoltaïques en se dotant d’une capacité de production locale. À l’image de l’isérois Verkor qui va faire construire à Dunkerque (Nord) une gigafactory de batteries et à Grenoble son centre de R & D, la société lyonnaise Carbon, portée par Pascal Richard et Pierre-Emmanuel Martin, se lance sur le marché du photovoltaïque. "L’Europe est dépendante depuis longtemps de l’Empire du Milieu, un constat mis en exergue par la crise sanitaire et la réorientation du pays sur son marché domestique. Nous observons depuis, des prix en fortes hausses et des difficultés d’approvisionnement majeures", résume Pascal Richard.
À horizon 2025, Carbon souhaite délivrer 5GW de panneaux photovoltaïques et atteindre les 15GW produits en 2030. Pour cela, la start-up veut ériger une usine dédiée à la fabrication de lingots de silicium, wafers (matériaux semi-conducteurs) et cellules photovoltaïques à prix compétitifs.
Montant estimé de l’opération : 1,5 milliard d’euros. "Nous procéderons en fin d’année à une première levée de fonds et réaliserons les premières études d’ici 2023 avant d’installer d’ici 2024 une ligne pilote pour produire plusieurs centaines de mégawatts. En 2025, nous souhaitons démarrer la production dans notre usine qui sera située en France", assure Pascal Richard, qui évoque la création de 2 000 emplois directs et 4 000 indirects à terme.
Financements multiples
Sur un marché du solaire en forte croissance – 29 GW installés en Europe en 2021, 60 GW attendus pour 2025 et 100 GW pour 2030 – Carbon voit une place à prendre et pense avoir trouvé l’équation pour être compétitif. "Les prix des modules atteignent des planchers, et le transport représente 10 % du prix. En produisant en France, la masse salariale est inférieure à ces 10 % et on crée des bénéfices environnementaux en relocalisant", se justifie le président.
Reste à trouver 1,5 milliard d’euros. La société compte s’adosser à un ou plusieurs industriels du verre, de l’aluminium ou du silicium et compléter cela avec des financiers et des aides publiques régionales, nationales et européennes. "On discute déjà avec des industriels", confirme-t-il, espérant obtenir des financements dans le cadre du plan d’investissement France 2030.
Les deux associés connaissent bien la filière solaire et le domaine des énergies renouvelables. Pascal Richard, ancien d’Alcatel, a notamment créé la filiale française du fournisseur d’équipements à énergie solaire (onduleurs), SMA à Saint-Priest (Rhône) – et Pierre-Emmanuel Martin est le président fondateur de Terre et Lac, exploitant de centrales solaires et de la start-up My Energy Manager.
Stratégie de marché globale
Alors qu’ils travaillent déjà avec le Centre international de recherche sur l’énergie solaire ISC Konstanz basé en Allemagne et les Franco-Belges de l’Institut Becquerel, les associés comptent mobiliser toute la filière européenne. "Pour réussir, nous devons déployer une stratégie de marché percutante. Nous adresserons aussi bien les grands énergéticiens que les assembliers et intégrateurs pour fournir aux premiers des solutions photovoltaïques complètes et pour les seconds des cellules photovoltaïques", explique le président de Carbon, qui veut justement stimuler toute la filière et préserver le savoir-faire des assembliers en Europe.
