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Premiers pas pour la taxe carbone aux frontières de l’Europe
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Premiers pas pour la taxe carbone aux frontières de l’Europe

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Le Mécanisme d’ajustement carbone aux frontières (MACF) vient d’entrer en vigueur au 1er octobre pour certains produits importés par l’Union européenne. D’abord appliquée sans taxation jusqu’en 2026, cette taxe carbone aux frontières vise à accélérer la décarbonation, tout en limitant les distorsions de concurrence avec les pays tiers.

Dans un premier temps, le MACF portera sur certaines marchandises fortement exposées au risque de fuite de carbone : acier/fer, ciment, aluminium, engrais azotés, hydrogène, électricité — Photo : jovannig

La taxe carbone aux frontières de l’Union européenne entre en application. Officiellement appelé "mécanisme d’ajustement carbone aux frontières" (MACF), ce dispositif va imposer une taxe carbone à certains produits importés. Il va ainsi aligner le prix du carbone payé pour les produits importés dans l’UE avec celui payé pour les produits européens. Adopté par le Conseil des ministres européen EcoFin en mars 2022 et pilier du paquet Fit for 55 de l’Union Européenne, le MACF va se mettre en musique progressivement. Effectif depuis ce 1er octobre 2023, il s’applique dans une phase transitoire sans paiement de taxe, jusqu’en 2026. Les entreprises importatrices doivent se faire connaître puis déclarer leurs importations. À partir de 2026, elles paieront une taxe sous forme d’achat de certificats MACF. Le montant de la taxe sera calculé en fonction du mode de production et pourra varier selon le pays d’origine (s’il applique déjà une taxe carbone).

Disparition des quotas gratuits

Le MACF va remplacer les quotas gratuits, alloués dans le cadre du marché carbone européen (SEQE-UE). Sa montée en puissance sur neuf ans, de 2026 à 2034, accompagnera la diminution progressive des quotas gratuits.

Dans un premier temps, le MACF portera sur certaines marchandises fortement exposées au risque de fuite de carbone : acier/fer, ciment, aluminium, engrais azotés, hydrogène, électricité. Ces secteurs représentent environ la moitié des émissions industrielles dans l’UE. La Commission européenne compte élargir ensuite à d’autres secteurs, notamment le raffinage et la chimie.

Les "fuites de carbone" désignent le phénomène selon lequel la mise en œuvre de mesures climatiques contraignantes pour réduire les émissions de gaz à effet de serre dans une seule région du monde entraîne une augmentation des émissions de gaz à effet de serre dans le reste du monde. "Que l’on produise en Europe ou sur d’autres continents, un même prix du carbone doit s’appliquer", argumente la ministre Agnès Pannier-Runacher, qui pointe également les conséquences des fuites de carbone sur la désindustrialisation : "C’est une question de concurrence équitable : les entreprises européennes qui respectent des normes environnementales exigeantes ne doivent pas être pénalisées par rapport à celles qui délocaliseraient leurs productions".

Par ailleurs, cette taxe carbone aux frontières pourrait rapporter environ trois milliards d’euros à l’Union Européenne d’ici 2030.

Effet pervers

Toutefois, ce nouveau mécanisme suscite des appréhensions. En juin dernier, l’institut Rexecode pointait notamment que le MACF "présente des lacunes majeures qui pourraient menacer la compétitivité de l’industrie européenne et française". En cause, un effet pervers pour les exportateurs européens : "Les entreprises européennes utilisant les produits concernés comme consommation intermédiaire paieront le prix du carbone importé et ce surcoût se répercutera en cascade, tandis que les produits transformés à partir des mêmes produits hors d’Europe ne supporteront pas cette taxe carbone". La fin des permis CO2, alloués aujourd’hui gratuitement, aurait également des conséquences. Ils pèsent l’équivalent de 4 milliards d’euros en France, d’après Rexecode.

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