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"Nous levons 4,7 millions d'euros pour accélérer vers l'industrialisation de la production de nos microalgues"
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Véronique Raoul présidente d'Inalve "Nous levons 4,7 millions d'euros pour accélérer vers l'industrialisation de la production de nos microalgues"

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La start-up niçoise Inalve vient de boucler un tour de table de 4,7 millions d’euros pour financer l’ultime étape avant le déploiement de ses unités de production de microalgues. Objectif : fournir à grande échelle l’aquaculture et les écloseries de poissons et crevettes, auxquelles elle apporte "une solution unique au monde", selon sa présidente Véronique Raoul.

Depuis 2022, Véronique Raoul est la présidente de la deeptech niçoise Inalve — Photo : Olivia Oreggia

Inalve vient de réaliser une levée de fonds. À quoi ce financement servira-t-il ?Inalve vient en effet de lever 4,7 millions d’euros auprès de Blue Forward Fund géré par Seventure Partners, et du fonds PSIM géré par Bpifrance dans le cadre de France 2030. Cette enveloppe permettra de financer la création d’un site de production à l’échelle industrielle. En commençant par un démonstrateur, avant de démultiplier nos unités de production en réponse aux besoins des marchés. Ce qui supposera de doubler nos équipes pour atteindre un effectif de près de 20 personnes fin 2024.

Où comptez-vous implanter ces futures unités de production ?

La première usine sera en région Sud. Je souhaite qu’elle soit à proximité de la métropole de Nice car c’est là que vivent les équipes actuelles. Mais c’est très compliqué car s’il y a une forte volonté d’accueillir l’industrie, le foncier est rare et cher ce qui en fait un élément bloquant. Nous sommes en recherche depuis plusieurs mois, mais si aucune piste sérieuse et viable n’émerge dans les toutes prochaines semaines, nous serons obligés d’envisager des alternatives.

Le foncier est l’un des problèmes majeurs de notre département, comment espérer trouver l’espace nécessaire ?

Notre culture se faisant hors sol, nous pourrions nous installer sur les terrains qui ne sont plus exploitables en agriculture conventionnelle car pollués par exemple. Mais les règles liées aux PLU (Plan Local d’Urbanisme, NDLR) nous en empêchent, ce qui est selon moi une aberration. Il faut une volonté politique pour qu’ils restent à vocation agricole et soient constructibles, permettant ainsi le développement d’activités comme les nôtres. Sachant que le besoin est urgent, c’est une excellente opportunité de démontrer que les services de l’État sont capables d’agilité et de réactivité pour soutenir le programme national de réindustrialisation et de souveraineté alimentaire.

Quel marché adresse Inalve ?

Dès que j’ai repris (en 2022, NDLR), j’étais très focalisée sur l’enjeu alimentation. Sur 8 milliards d’êtres humains, moins de 5 milliards mangent à leur faim. Et demain, il faudra en nourrir le double. L’aquaculture est un secteur clé, reconnu par la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, NDLR) pour répondre à cet enjeu, avec un moindre impact carbone et un meilleur rendement protéique que d’autres secteurs.

Il y a plusieurs étapes dans l’aquaculture, la première, appelée écloserie, étant l’élevage des larves de crevettes, de poissons ou de bivalves. Leur nourriture naturelle, dans les océans, ce sont précisément les microalgues.

Créée en 2022, Inalve produit des microalgues sur biofilm — Photo : PixelsFromMars

Qu’apporte alors Inalve aux écloseries ?

Jusqu’alors, les producteurs des écloseries étaient obligés soit de se contenter des produits de substitution disponibles sur le marché, mais dont ils ne sont pas satisfaits, soit de fabriquer eux-mêmes des microalgues. Cela implique de mobiliser toute l’année de la main-d’œuvre qualifiée et de l’espace, et entraîne donc des coûts importants.

Nous sommes aujourd’hui les seuls au monde à pouvoir commercialiser des microalgues vivantes sous forme concentrée. Notre offre leur permet de remplacer une production complexe et coûteuse par une petite bouteille qui peut être stockée au frigo pendant deux mois, pour être utilisée le jour J. Ainsi nous simplifions la logistique, sécurisons la production et augmentons la productivité des écloseries aquacoles, premier maillon essentiel pour rendre l’aquaculture plus performante.

Vous parlez d’avantages pour l’environnement, quels sont-ils ?

Dans tous les autres systèmes de production, peu d’algues sont fabriquées dans beaucoup d’eau. Inalve permet d’économiser l’eau – notre procédé de culture en consomme 80 % de moins que les autres - mais aussi de réduire de 60 % l’impact de la culture des microalgues sur le changement climatique. Enfin, car la biomasse récoltée est naturellement concentrée, cela permet de nourrir les larves de la même manière que dans la nature, à savoir avec des microalgues vivantes, garantissant ainsi la naturalité de la chaîne alimentaire

Où se trouvent vos clients ?

Le marché est mondial, regroupé par espèces : les crevettes en Amérique du Sud et Asie du Sud-Est, la daurade et le bar en Turquie et en Grèce, le tilapia en Asie… Mais nous travaillons aussi avec des gens qui veulent rapatrier ces productions localement, en Europe et en France en particulier. Notre objectif est en effet d’avoir un impact le plus positif possible en favorisant une production et une consommation responsables, et particulier régionales.

Avez-vous déjà d’autres marchés en ligne de mire ?

Il y a d’autres marchés potentiels : les compléments alimentaires, les cosmétiques ou encore la dépollution de l’eau en complément de l’agriculture conventionnelle. Nous avons donc beaucoup de sujets à adresser mais nous nous concentrons d’abord sur les écloseries, un marché clé pour nourrir sainement toute la population mondiale demain tout en préservant la planète.

Nice # Agriculture # Agroalimentaire # Levée de fonds # Innovation