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Les laboratoires Théa à la conquête du marché américain
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Les laboratoires Théa à la conquête du marché américain

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Spécialisés dans les médicaments pour l’ophtalmologie, les laboratoires clermontois Théa réussissent à combiner innovation et croissance à l’international. Comment le groupe familial met en œuvre sa stratégie d’exportation en Europe et, depuis peu, sur le continent américain.

Henri Chibret, fondateur, et Jean-Frédéric Chibret, président actuel des laboratoires Théa à Clermont-Ferrand — Photo : François Berrué Photographe

Chaque seconde, un flacon de son collyre sans conservateur Abak est vendu dans le monde. Propriété de la famille Chibret, le groupe indépendant Théa (1 663 salariés, 683 M€ de CA en 2021), basé à Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme), a fait du développement international le moteur de sa croissance. Aujourd’hui, 75 % de ses ventes de médicaments et dispositifs médicaux pour l’ophtalmologie sont réalisées hors de France, en Europe de l’ouest et de l’est, au Canada et en Amérique du Sud (Chili, Mexique, Pérou). Au total, 35 filiales et une quarantaine de distributeurs commercialisent les produits de Théa dans le monde.

Vendre à grande échelle

Dans un secteur où l’innovation est un facteur majeur de compétitivité, il est nécessaire d’amortir les investissements R & D (plus de 10 % de son chiffre d'affaires) sur un marché élargi. Il a par exemple fallu dix ans - et 10 millions d’euros d’investissement - pour mettre au point Mydrane, un médicament qui permet de dilater plus rapidement la pupille avant l’opération de la cataracte.

"En permanence, nous arbitrons entre l’allocation de nos ressources pour le développement de nouveaux produits d’une part et l’implantation de nouvelles filiales, de l’autre. Nous avons besoin à la fois de sortir des nouveaux produits et de les vendre à grande échelle", explique Jean-Frédéric Chibret, président des laboratoires Théa.

Depuis 2020, le groupe auvergnat adresse le marché américain, qui représentera déjà un volume d’affaires de 100 millions d’euros cette année, accélérant la croissance du chiffre d’affaires qui devrait atteindre 800 millions d’euros en 2022 (+17 %). "C’est le plus gros marché mondial, soumis à une forte pression concurrentielle. Les barrières à l’entrée et les risques sont très élevés d’un point de vue réglementaire et assurances", décrit Jean-Frédéric Chibret.

Utiliser les distributeurs locaux

Complexe et coûteuse, la stratégie d’approche du marché américain peut s’appuyer sur les expériences accumulées par le laboratoire clermontois depuis ses débuts à l’export en 1996, date de la première filiale en Espagne, moins de deux ans après le lancement de la société.

La stratégie la plus efficace vise à contacter leur cible de médecins ophtalmologues via des distributeurs bien implantés dans le pays ou par la force commerciale d’entreprises du secteur dont Théa connait déjà les produits. D’où le choix de racheter des distributeurs bien implantés et de créer des joint-ventures avec des entreprises locales. En Europe, de nombreuses filiales ont été créées suite au rachat de distributeurs locaux (Italie, Pologne et Tchéquie) ou de joint-ventures (Royaume-Uni, Grèce, Irlande).

Pourtant aux États-Unis, en 2019, Théa commence par créer une filiale près de Boston. Orientée sur le marché BtoB (prescription via les ophtalmologues), elle noue les premiers contacts avec le milieu médical et les sociétés savantes. Mais créer une structure à partir de zéro est risqué. L’expérience a été tentée en Suisse en 2001 et en Allemagne en 2005. "C’est très long d’obtenir la confiance des ophtalmologues. Au début, nous avons perdu de l’argent et dû recapitaliser plusieurs fois nos entités dans ces pays avant de devenir rentables", confie le dirigeant.

Racheter les gammes d’un concurrent

Pour passer à la vitesse supérieure, mieux vaut se faire connaître auprès de sa cible via une offre de produits locaux déjà approuvés. D’où l’idée de racheter, en mars 2022, une gamme de sept produits du groupe américain Akorn et de créer la joint-venture T&S avec la société suisse Similasan, qui réalise 50 millions de dollars de chiffre d'affaires aux États-Unis.

La formule avait déjà été testée et validée en 2004 lorsque le groupe Théa s’est implanté aux Pays Bas en faisant l’acquisition des produits ophtalmiques de Belpharma. Quelques années plus tard, l’opération est réitérée à plus vaste échelle avec le rachat des gammes au niveau mondial de Novartis, permettant de créer des filiales en Autriche, en Turquie et dans 4 pays nordiques (Danemark, Suède, Norvège et Finlande). "Cette option a l’intérêt de vous donner immédiatement une assise locale, avec des équipes et des produits existants", appuie Jean-Frédéric Chibret.

Coûts d’adaptation des médicaments

Aux États-Unis, le package Akorn inclut les 50 salariés des services marketing et commercial et la force de frappe d’une quarantaine de visiteurs médicaux locaux réalisant un chiffre d’affaires de 60 millions de dollars. Ainsi, Théa se dote d’un outil commercial pour vendre ses propres produits, qui doivent toutefois passer au préalable par les fourches caudines de l'administration. Pour obtenir le feu vert de l'agence des médicaments en vue de commercialiser son premier médicament pour le glaucome, elle a dû débourser 3 millions d’euros.

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