Produire de la farine de fèves pour remplacer les produits carnés dans nos assiettes, il fallait y penser. À Vandœuvre-lès-Nancy (Meurthe-et-Moselle), le laboratoire de recherche et développement C&DAC a décidé, en initiant ce projet, d’aller au-delà de son métier originel, le conseil aux industriels de l’agroalimentaire.
Les industriels face à un "dilemme environnemental"
Créée en 2017, cette société de 8 salariés est passée maîtresse dans l’art de substituer des protéines végétales aux protéines animales à l’origine de 14,5 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre. Afin de produire elle-même de la farine de féverole, une légumineuse de la famille des fèves, elle prévoit de lever cette année 1,5 million d’euros. "Les industriels désireux d’utiliser des alternatives végétales sont face à un dilemme environnemental : Ils sont contraints d’importer leurs matières premières de l’autre côté de la planète : amande, coco, soja, etc.", analyse Élise Bourcier, présidente de C&DAC.
Un objectif de 500 tonnes par an en vitesse de croisière
D’où l’idée de travailler avec des coopératives agricoles françaises comme Probiolor, Unéal ou encore Vivescia pour trouver un nouveau débouché aux féveroles, un protéagineux produit en France, mais principalement utilisé en alimentation animale. "Notre savoir-faire nous place à l’interface entre les mondes agricole et industriel. Nous maîtrisons en effet les procédés de fermentation qui rendent possible l’utilisation de la féverole en agroalimentaire", livre la dirigeante.
La levée de fonds auprès de business angels, de banques privées et publiques vise à acquérir des équipements de transformation de la graine (fermentation, broyage, conditionnement), ainsi qu’à préparer la commercialisation des farines. C&DAC produirait dans un premier temps 30 tonnes par an, avec l’objectif de 500 tonnes par an en vitesse de croisière. Dans sa cible, figurent les marchés de la biscuiterie, des alternatives aux produits carnés et de la panification.
Ecosystème nancéien
Petite fille d’agriculteur, la fondatrice de C&DAC ne se voit pas comme une militante, mais explique plutôt suivre le sens de l’histoire, "la recherche d’aliments bons pour la santé et bons pour la planète". Or, rappelle-t-elle, "en France, l’industrie agroalimentaire est composée à 98 % d’un tissu de petites et moyennes entreprises. Celles-ci ont besoin d’être guidées pour améliorer le bilan écologique de leurs produits". Cette Meusienne diplômée de l’école d’ingénieurs AgroParitech a trouvé à Nancy le terreau nécessaire à la maturation de son projet. Ses débuts ont été doublement bien balisés par l’Université de Lorraine, d’abord au travers du Pôle entrepreneuriat étudiant lorrain, puis via l’Incubateur lorrain.
Le laboratoire de R & D est par ailleurs hébergé sur la plateforme technologique "Sciences du vivant et santé" du Grand Nancy, au Technopôle de Brabois, aux côtés des sociétés Biolie (spécialisée dans les cosmétiques biosourcés) et EntoInnov (farines d’insectes). En Lorraine, le charcutier industriel Berni a eu recours aux services du laboratoire pour mettre au point des grillades végétales, Dongé pour stabiliser et conserver une recette de brie de Meaux à la truffe, et Les Fous de terroirs pour réduire la liste des ingrédients d’un pétillant à la mirabelle.
