Un chantier naval en Lorraine, qui l’eut cru ? Sans accès à la mer, la région n’est pas vraiment un territoire présent sur ce domaine d’activité. Et pourtant, Étienne Malher, entrepreneur lorrain dans le domaine du matériel médical, a fondé en 2020 la Société Lorraine d’Innovation Nautique (SLIN) dans le but de fabriquer des bateaux près de Nancy.
"Suite à la vente de ma société, MS Techniques, à Saint-Gobain, j’ai souhaité me tourner vers mes premières passions, à savoir la construction navale", confie ce discret dirigeant qui a injecté 200 000 € dans la SLIN afin de fabriquer des bateaux localement.
La présentation du Mirabelle 16
Près de trois ans après la constitution de sa nouvelle société, un premier bateau s’apprête à être dévoilé au public lors du salon nautique Grand Pavois à la Rochelle, en septembre 2023. "Il s’agit d’un voilier monocoque de grande dimension, 16 mètres par 6 mètres, à destination de grands voyages de plaisance", précise Eric Prang, l’ingénieur nantais qui a conçu le bateau pour le compte de la SLIN. "C’est un bateau bardé d’innovations technologiques et dont le prix de vente se situera autour de 2 millions d’euros", précise son concepteur. Nominé pour le prix du voilier de l’année 2024, ce premier navire est toutefois qualifié de "concept boat", de l’aveu d’Étienne Malher.
Un premier marché à Mayotte
En parallèle de la fabrication de ce gros voilier de plaisance, la SLIN s’attaque à un autre genre de bateau, destiné cette fois au transport de passagers : l’Heliodive. Il s’agit d’un catamaran qui fonctionne à l’énergie solaire et qui, là encore, sera pour la première fois assemblé en Lorraine. "L’idée originale de ce bateau est d’utiliser le processus d’anodisation, un revêtement utilisé sur les mâts de bateaux pour accroître leur résistance, et de l’appliquer à l’ensemble de la structure du catamaran", indique Eric Prang qui a également travaillé sur ce deuxième projet. L’anodisation se déroulera au Pays Bas, puis l’assemblage en Lorraine.
Autre particularité, ce bateau est pensé pour être envoyé en pièces détachées par conteneurs, afin d’être monté dans le pays de destination par un chantier naval local. "Cela permet de réduire les coûts de transport et d’être ainsi fortement compétitif", renchérit l’ingénieur, qui qualifie ce navire d'"Ikea-Boat".
Un premier modèle a déjà trouvé preneur pour un hôtel à Mayotte qui cherchait un moyen de transport pour acheminer ses hôtes jusqu’à son établissement. "Ce premier marché se situe autour d’un million d’euros", indique Étienne Malher. "Pour cette première commande, l’Heliodive sera entièrement monté en Lorraine, puis testé sur la Moselle en accord avec le port de Frouard (près de Nancy, NDLR). Ensuite nous le démonterons pour l’expédier à notre client", raconte le dirigeant.
Il ne faut toutefois pas s’imaginer un chantier naval avec l’ensemble des compétences en Lorraine : "Nous jouons un rôle de maître d’œuvre, en mobilisant les savoir-faire spécifiques partout en France, et en réalisant l’assemblage localement", explique Étienne Malher. Toutefois des premières entreprises locales sont mobilisées, à l’image des menuiseries Vibrac, société installée en Meurthe-et-Moselle, en charge de l’aménagement intérieur du Mirabelle 16.