Côtes-d'Armor
La Coop des Masques : "J'en veux aux plus gros sociétaires qui n'ont pas commandé chez nous"
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La Coop des Masques : "J'en veux aux plus gros sociétaires qui n'ont pas commandé chez nous"

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La Coop des Masques à Grâces a été placée en liquidation judiciaire ce 12 octobre, laissant un passif de quatre millions d’euros. Le président du conseil d’administration de l’entreprise, Christophe Winckler, pointe du doigt l’État, qui a encouragé un investissement lourd et continuerait d’acheter 95 % de ses masques en Chine, et de gros sociétaires qui n’ont pas soutenu l’activité de la coopérative.

La Coop des Masques a été placée en liquidation judiciaire ce 12 octobre 2022 — Photo : Matthieu Leman

La Coop des Masques, installée à Grâces (Côtes-d'Armor) a été placée en liquidation judiciaire ce 12 octobre 2022 par le tribunal de commerce de Saint-Brieuc. L’entreprise avait été créée en juillet 2020 pour participer au mouvement de réindustrialisation de la France et produire des masques chirurgicaux et FFP2 pour lutter contre la propagation de la Covid.

La coopérative avait connu des difficultés en septembre 2021, neuf mois après le début de la production. En mal de trésorerie, elle avait lancé un appel dans les médias pour écouler un stock de six millions de masques. L'appel avait finalement été entendu. "Jusqu’en mars 2022 nous avons eu une activité soutenue, autour de 200 000 euros mensuels, suffisants pour faire vivre l’entreprise", explique Christophe Winckler, président du conseil d’administration de la coopérative. "Mais à partir d’avril 2022 et la fin de l’obligation de porter des masques dans les lieux publics, nous sommes retombés à des ventes qui ne rapportent que 20 000 à 50 000 euros par mois."

Si le dirigeant reconnaît quelques erreurs de gestion - "qui ont été ajustées"- au lancement du projet, deux raisons principales ont mené à la liquidation de l'entreprise. Premièrement l’achat d’une machine de production du matériau filtrant des masques, ou meltblow. "Un achat que l’État avait fortement encouragé mais qui s'est avéré être une erreur stratégique." D’une valeur de 3,5 millions d’euros, elle a été subventionnée par l’État à hauteur d’1,2 million d’euros mais le remboursement du reliquat a plombé la trésorerie de la coopérative. L’outil n’a pas pu être mis en fonction, faute de commandes suffisantes de masques.

Un passif de 4 millions d’euros

Deuxièmement, l'absence de commandes, qui représente la raison principale de l’échec de l’aventure, qui laisse un passif de quatre millions d’euros. "Je suis très en colère contre l’État et quelques gros sociétaires de la coopérative : ce sont eux qui nous ont coulés", accuse Christophe Winckler. "L’État continue de commander plus de 95 % des masques chinois. La clause d’origine géographique qui, en donnant la préférence aux masques d’origine européenne, nous avait permis de remporter des appels d’offres d’hôpitaux publics a été effacée des nouveaux appels d’offres comme ceux de l’hôpital d’Agen ou du groupement des Hauts-de-France." Le dirigeant cite également celui de la préfecture de Paris en septembre. "Nous avions proposé un prix de 2,70 la boîte, ils ont choisi une offre d’un fabricant chinois à 1,10 euro."

Le dirigeant en veut également aux plus gros des 2 067 sociétaires de la Coop des Masques "qui, pour une raison que je ne comprends pas, n’ont pas commandé chez nous. En particulier le Groupe Vyv, premier sociétaire avec 300 000 euros d’investissement, qui n’a commandé en tout que pour 20 000 euros de masques."

"Le modèle était pertinent", soutient le président du conseil d’administration de la coopérative, qui reconnaît avoir "énormément de regrets", notamment pour les 13 salariés restants, ainsi que pour les 2 000 "petits" sociétaires, qui avaient investi entre 50 et 200 euros. Et salue les collectivités comme Rennes, Brest, Quimper et beaucoup d’autres qui ont "joué le jeu". Pas suffisant pour gagner la partie cependant.

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