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Éolien en mer : le parc des Îles d’Yeu et Noirmoutier sur de bons rails
Pays de la Loire # Industrie # Innovation

Éolien en mer : le parc des Îles d’Yeu et Noirmoutier sur de bons rails

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Alors que le premier parc éolien en mer français, celui de Saint-Nazaire, sera livré en fin d’année, celui des îles d’Yeu et Noirmoutier entre dans une phase pré-opérationnelle. Les grands donneurs d’ordre ont rencontré l’écosystème industriel vendéen début octobre et les derniers recours juridiques sont sur le point d’être purgés. Le point sur un chantier à 2 milliards d’euros.

Vendée énergie entre au capital d’Éoliennes en mer des Îles d’Yeu et Noirmoutier le 6 octobre 2022 — Photo : David Pouilloux

La venue du président de la République Emmanuel Macron à Saint-Nazaire, pour visiter le parc éolien de Saint-Nazaire, en septembre dernier, a marqué d’une pierre blanche la quasi-fin de chantier du premier parc éolien en mer français. À quelques milles marins de celui-ci, le second parc éolien marin des Pays de la Loire est lui en phase imminente de construction, et devrait être livré et entrer en service en 2025, si tout se déroule comme prévu. "Les permis de construire ont été validés et ils ne sont pas suspensifs, déclare Christelle Céleste, en charge des relations extérieures des Éoliennes en mer services, le consortium qui pilote la réalisation du parc éolien des îles d’Yeu et Noirmoutier, et celui de Dieppe Le Tréport. Nous pourrions commencer les travaux, mais nous choisissons d’attendre que les deux derniers recours contre le parc soient purgés juridiquement. C’est une façon de respecter les opposants au parc. En fin d’année, nous avons bon espoir de pouvoir lancer les travaux." Au moment où les Chantiers de l’Atlantique viennent d’être choisis pour construire la sous-station électrique de ce parc et de celui de Dieppe - Le Tréport, en Normandie, on prend soin de ne brusquer personnes.

De l’électricité pour 800 000 personnes

Frédéric Grizaud, directeur d’Atlantique Offshore Energy, la division dédiée aux Énergies Marines de Chantiers de l’Atlantique. 250 entreprises participent à la construction d’une sous-station électrique — Photo : David Pouilloux

Comme celui de Normandie, le parc vendéen comptera 62 éoliennes de 8 Mégawatts de Siemens Gamesa Renewable Energy, soit une puissance de 496 Mégawatts. Il produira suffisamment d’électricité pour 800 000 personnes, soit un peu plus que la population vendéenne. En dépit de ses performances, de son utilité en période de crise énergétique et de la flambée des prix de l’électricité, les exploitants et les industriels ont tous perçu les réticences ou les oppositions à la construction du parc de Saint-Nazaire, que ce soit de la part de riverains, de pêcheurs, d’associations environnementales ou de certains élus. L’acceptabilité des projets d’éolien en mer est ainsi une préoccupation majeure des acteurs de ce second projet d’éolien en mer en Pays de la Loire. Les industriels ont d’ailleurs été réunis par Alain Lebœuf, le président du Conseil général de Vendée, pendant deux jours début octobre, au sein de l’institution, un moment où il a signé l’entrée de la collectivité au capital. "Les retombées économiques sur le territoire sont très importantes pour l’acceptabilité du projet", estime Alain Lebœuf, dont la collectivité a investi 3,5 millions d’euros dans le projet via la SEM Vendée énergie. Il ajoute : "Ce projet n’est pas un projet qui s’est posé ici, c’est un projet concerté, précise l’élu vendéen. C’est une chance pour la Vendée qui bénéficie de 274 km de cotes. Et nous sommes un vrai partenaire."

Un territoire très pro business

Vendée énergie est une société d’économie mixte détenue en partie par le Conseil départemental de Vendée. Elle est en actionnaire minoritaire (0,5 %) de la SAS Éoliennes en mer Îles d’Yeu et Noirmoutier (EMYN), le consortium qui rassemble Ocean Winds (co-entreprise ENGIE et EDP Renováveis), Sumitomo Corporation et de la Banque des Territoires. "Ce soutien direct d’un élu comme Alain Lebœuf et d’une collectivité est important pour la réussite du projet et pour sa perception auprès du public, souligne Marc Hirt, directeur général d’Ocean Winds France. Tous les élus ne s’engagent pas autant. " Du côté de l’élu, très volontariste, on ne perd pas de vue l’intérêt en termes d’emplois pour ce "territoire très pro business", souligne lui-même Alain Lebœuf.

La bonne méthode restait à déterminer. Arnaud Ringeard, président de la CCI de Vendée, a déjà "sensibilisé" 850 entreprises locales afin qu’elles soient informées de la "possibilité de participer à cet immense chantier". Avec les travaux d’installation, de construction, de logistique, marine et terrestre, de maintenance durant 25 ans, une constellation d’entreprises pourrait réaliser du chiffre d’affaires. "Il faut les mettre en face des bonnes personnes et que les industriels leur expliquent ce dont ils ont besoin et ce qu’ils attendent d’eux, poursuit Marc Hirt. La filière industrielle française doit être renforcée dans ce contexte de très forte croissance de l’éolien en mer. Ocean Winds tient à aider les acteurs de l’économie locale à trouver les bonnes relations avec les industriels de rangs 1."

Des speed datings industriels

Le 6 octobre, signature du contrat entre Chantier de l’Atlantique, Ocean Winds et EMYN - EMDT pour deux sous-stations électriques — Photo : Bernard BIGER - Bernard 8ABernard BIGER

Organisé par le patron du département, la journée dédiée aux rencontres entre industriels de rangs 1 (Chantiers de l’Atlantique, Siemens Gamesa, Louis Dreyfus TravOcean & Prysmian PowerLink, DEME Offshore, Jan de Nul Group, Eiffage Smulders, EMYN…) et plus d’une centaine de sous-traitants vendéens a pris l’allure d’un speed dating industriel où plus de 130 rendez-vous, en face-à-face, ont été programmés. "Nous avons référencé nos fournisseurs pour la construction de la sous-station de Saint-Nazaire, reconnaît Frédéric Grizaud, directeur d’Atlantique Offshore Energy, la division dédiée aux Énergies Marines de Chantiers de l’Atlantique, située à Saint-Nazaire. Ils ont un temps d’avance, mais il n’est pas trop tard pour se faire référencer auprès de nous pour celle notamment des Îles d’Yeu et Noirmoutier. Nous leur donnons le bon contact. Ils doivent nous expliquer ce qu’ils savent faire et en particulier ce qu’ils ont déjà fait dans le domaine de l’éolien et de l’offshore. En moyenne, 250 entreprises travaillent pour nous pour la construction d’une sous-station." Une seule sous-station en construction génère 1 million d’heures de travail aux Chantiers de l’Atlantique, à cela s’ajoutent les heures de travail dans les ateliers des sous-traitants et sur le parc lui-même…

Décarboner l’énergie

Image de synthèse du futur parc éolien des Îles d'Yeu et Noirmoutier : 62 éoliennes de 8 mégawatts — Photo : EMYN

Le parc dans son entier représente un investissement de 2 milliards d’euros. Symboliquement, il a fait l'objet d'un financement participatif via Enerfip d'un montant d'1 millions d'euros, ce qui a permis à 958 citoyens de s'associer au financement d'une étude d'impact sur le milieu marin. Parmi les gros investisseurs, on découvre le Japonais Suminoto Corporation, une société mondiale de négoce et d’investissement, très actif dans ce secteur avec 5 parcs en Europe. Elle détient des participations dans trois parcs éoliens offshore en Belgique (Northwind, Nobelwind et Northwester 2) et deux projets au Royaume-Uni (Galloper et Race Bank), et désormais deux en France, celui des Îles d’Yeu Noirmoutier et Dieppe Le Tréport, à hauteur de 29, 5 %. "Notre partenariat tient à notre volonté de décarboner l’énergie, explique Ken Kageyama, directeur général de l’unité Infrastructure business. Nos activités, ainsi que nos relations avec nos parties prenantes, se sont développées dans le monde entier, dans 66 pays. Notre mission est de promouvoir une croissance responsable au sein de la société."

La Banque des territoires, filiale de la Caisse des dépôts, finance notamment les projets des collectivités. Au travers d’Éoliennes en mer Participations, elle est entrée à hauteur de 9, 75 % dans le capital de ce projet vendéen. "La participation à la construction ou à la maintenance de ce parc peut engendrer une croissance très forte pour une entreprise locale, remarque Emmanuel Legrand, Directeur du département Transition Énergétique et Écologique chez Banque des Territoire. S’il y a besoin d’agrandissement de l’immobilier d’entreprises, nous serons là pour les accompagner."

"La filière européenne et la filière française en particulier démontrent sa fiabilité technique et sa compétitivité commerciale, souligne Paolo Cairo, président des sociétés Éoliennes en mer des îles d’Yeu et Noirmoutier (EMYN) et de Dieppe Le Tréport (EMDT). Leur ancrage dans les territoires, avec les industriels et le soutien des institutions, est déterminant pour la réussite de ces projets." Quant aux ambitions françaises, en matière d’éolien en mer, elles ont été fixées par le président de la république : 40 gigawatts et 50 parcs à l’horizon 2050. En Vendée, et ailleurs, les industriels ont du pain sur la planche.

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