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La recette anti-crise d'Ansamble France
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La recette anti-crise d'Ansamble France

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Installé sur un rythme de croissance brute d’environ 20 millions d’euros par an, le groupe de restauration collective Ansamble France (3 530 collaborateurs en France pour 260 millions d’euros de CA) est en première ligne face à la pandémie. Mais il ne dévie pas de sa stratégie de croissance externe et accélère ses solutions innovantes.

Les chefs cuisiniers des 700 restaurants collectifs du groupe Ansamble conservent en tout état de cause une forte autonomie de travail — Photo : DR Hervé Le Reste/Ansamble

Agglomérat de sociétés régionales, fondé initialement autour de la société Breizh Restauration et toujours présidé par le fondateur de cette dernière en 1978, le groupe Ansamble France, racheté en 2012 par Elior, est devenu au fil des trois dernières décennies l’un des cinq "majors" français du marché de la restauration collective. Il emploie 3 530 salariés, dont 283 dans son berceau morbihannais et environ 70 au siège social, à Vannes. Le développement d’Ansamble est devenu national tout en conservant son credo d’origine. "Le groupe est assez déconcentré. Ansamble a conservé son ancrage territorialisé. Chaque société régionale a ses propres réseaux de fournisseurs locaux, ses centrales", explique Vincent Gendrot, le directeur général. L’autonomie des quelque 700 restaurants collectifs est valorisée, de même que celle des chefs cuisiniers qui ont une grande latitude sur les recettes. Même la logistique pour assurer la préparation des 5 000 à 10 000 couverts servis par jour est déconcentrée. Pas de plateforme digne de ce nom au siège, qui concentre les fonctions supports, commerciales, marketing, RH et un laboratoire de diététique et de veille sanitaire. Le groupe s’appuie sur 18 cuisines centrales (15 en nom propre), dont celle, historique, de La Chapelle-Gaceline, à La Gacilly.

Une organisation qui libère les ambitions

Cette souplesse de fonctionnement, l’une des marques de fabrique du groupe Ansamble, a très tôt libéré les ambitions du groupe aujourd’hui très présent en Bretagne, mais aussi en Île-de-France, dans les Hauts de France, dans le Centre-Val de Loire, les Pays de la Loire, de la Nouvelle Aquitaine à la région Sud et dans le Grand-Est. La croissance externe est donc au cœur de la stratégie de développement quels que soient les segments. "À chaque fois, nous privilégions l’intégration des salariés issus de ces acquisitions, sur tout le territoire", insiste Vincent Gendrot.

Le dirigeant du groupe reste discret sur ses "cibles" en tant que telles. Adepte de la transparence sur la composition de ses menus, le groupe soigne en revanche la culture du secret dans sa stratégie d’expansion qui est, aussi, directement liée à la force de frappe du groupe Elior, actionnaire majoritaire. Vincent Gendrot indique cependant avec force "ne pas remettre en cause cette politique de croissance brute en raison de la pandémie" même si celle-ci a affecté jusqu’à 70 % du chiffre d’affaires. "Nous nous remettions du deuxième confinement. Nous étions revenus à 60 % du chiffre d’affaires de l’année précédente quand le troisième confinement a été décrété en avril. C’est un nouveau coup dur, car nous allons mécaniquement redescendre à 35 % de l’activité normale, ce qui engendre beaucoup de recours au chômage partiel. Mais si la crise affecte l’existant, il n’impactera pas le développement brut." Et de poursuivre : "Avant la crise, nous étions sur un rythme de croissance forte de plus de 20 millions d’euros développement brut tous les ans sur du multisegment." La restauration collective en crèches et dans les structures scolaires (36 % du chiffre d’affaires) se démarque, surpassant la tendance démographique de fond. "Nous sommes d’ailleurs leader en France sur le segment des crèches. C’est un marché où nous sommes portés par nos développements et notre montée en gamme." Mais c’est surtout le marché de la restauration collective d’entreprise (43 % du chiffre d’affaires) qui porte la forte croissance du groupe avec une montée en gamme là aussi très sensible.

Restauration d’entreprise en pointe

Le marché de la restauration collective souffre souvent d’une mauvaise image. Pour relever ce défi, Ansamble compte beaucoup sur ce créneau des entreprises pour rôder et généraliser sa montée en gamme. Il concentre ses prospects sur le tertiaire et les entreprises socialement engagées, comme le groupe Rocher. "L’industrie n’a pas toujours un positionnement compatible avec notre projet de restauration", tranche Vincent Gendrot. Et d’assumer : "Dans l’industrie, les attentes qualitatives et quantitatives ne sont pas toujours compatibles. C’est un secteur où nous choisissons nos clients."

Dans le tertiaire, Ansamble a conquis de haute lutte des marchés exigeants et fournit ainsi en restauration collective l’Agence de sécurité sanitaire et de l’alimentation/Santé publique France, l’Ademe du Maine-et-Loire, l’Opéra de Paris, l’École de danse de Paris, le siège du groupe Ouest-France à Rennes, le groupe Orange en Bretagne, etc. "Nous avons été les premiers à mettre en place un nutriscore et un carbone-score, rappelle Corinne Mbow, directrice marketing et développement du groupe. Nous avons développé aussi les modules de formation à la cuisine végétarienne depuis une dizaine d’années déjà. La restauration engagée et de plus en plus végétale est une lame de fond."

L’essor du télétravail

Autre lame de fond à laquelle l’entreprise se prépare : l’essor du télétravail. Le segment de la restauration d’entreprise à plus forte valeur ajoutée est là aussi challengé. Non seulement la pandémie bouscule les lignes de croissance actuelles mais sa sortie pourrait préfigurer d’une généralisation durable du télétravail, même si celui-ci devait rester à la marge. "Toute la question est de bien anticiper son ampleur. Or, le télétravail fait beaucoup débat. Sur cette tendance, nous sentons nous-mêmes en interne que le rapport au télétravail est partagé, analyse Vincent Gendrot. Son impact sera très variable d’une entreprise à l’autre, d’un secteur d’activité à l’autre, entre celles qui le généraliseront un ou deux jours par semaine et celles qui privilégieront d’autres options." Sur cette problématique, l’entreprise croit à une démultiplication des solutions de restauration collective en entreprise. Elle prépare son rebond en ce sens (lire par ailleurs).

Au-delà de la RSE

Enfin, le troisième segment (médico-social, personnes âgées, Ehpad) représente quant à lui 20 % du chiffre d’affaires. Il porte moins la croissance structurelle du groupe mais a joué un rôle d’amortisseur. "À la fin du premier confinement, ne restait quasiment plus en activité chez nous que le médico-social, poursuit le directeur général. La petite enfance, l’industrie, les armées ont ensuite heureusement assez vite redémarré." La pandémie aura eu un avantage : redorer l’image de la restauration collective "en remettant en évidence le rôle social de notre métier. On pense notamment au portage de repas à domicile".

Une autre certitude : elle aura confirmé l’importance de développer une solide politique RSE en entreprise. Lutte contre le gaspillage, verdissement des pratiques, souci permanent de la veille sanitaire… Non seulement, ces stratégies permettent d’améliorer l’adhésion des clients et des salariés et de réduire les coûts énergétiques, mais elles permettent aussi d’être mieux armé face aux situations de crises, qu’elles soient sanitaires ou environnementales.

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