Véritable traumatisme local, la liquidation en mars 2019 de la papeterie Arjowiggins laissait plus de 560 personnes sans emploi dans la commune sarthoise de Bessé-sur-Braye. L’installation prochaine de Kolmi-Hopen sur ce site industriel redonne donc de l’air à tout un bassin économique et de l’espoir à sa population. Le groupe angevin annonce ainsi la création de 150 à 200 emplois dès 2022, avant de monter à 300 salariés au sein de sa future usine sarthoise. 40 millions d’euros sont investis par cette filiale du groupe canadien Medicom, pour accueillir huit lignes de production de gants en nitrile (sans latex) dont les premières livraisons sont prévues au printemps prochain. Un site qui sera unique en France. "C’est une filière industrielle qui n’existe plus en Europe. Ces gants proviennent aujourd’hui d’Asie du Sud-Est", indique Gérald Heuliez, dirigeant du groupe Kolmi-Hopen. Spécialisé dans la fabrication de produits médicaux à usage unique, l’Angevin s’est retrouvé en première ligne au cœur de la crise sanitaire de 2020. L’entreprise a investi massivement pour développer ses capacités de production, et ainsi vu ses volumes quotidiens passer de 350 000 à 3,5 millions d’unités. Une participation à "l’effort de guerre" qui lui a même valu la visite du Président de la République. "Lors de sa venue à Angers, Emmanuel Macron a insisté sur le fait de produire plus en France. Cette phrase m’est restée en tête durant plusieurs jours, d’autant que j’avais déjà l’idée de produire des gants. Nous avons alors étudié la pertinence d’une production française ainsi que son implantation sur plusieurs sites en Pays de la Loire, Hauts-de-France et Nouvelle-Aquitaine", rembobine l’entrepreneur angevin.
Combat collectif
Du côté de la région Pays de la Loire, sa présidente Christelle Morançais suit ce dossier de près, avec en ligne de mire la revitalisation de l’ancienne usine papetière de Bessé-sur-Braye. "Lors de l’inauguration de la seconde usine Kolmi-Hopen à Angers, Gérald Heuliez m’a fait part de son projet d’usine de gants. Un dossier pour lequel il a fallu se battre face à la concurrence des autres sites et faire la preuve de notre détermination absolue à accueillir ce grand projet industriel." Le dossier passe alors entre les mains de Jacqueline Gourault, ministre de la Cohésion des territoires et des Relations avec les collectivités territoriales et élue du département voisin du Loir-et-Cher. De Bercy à Matignon et jusqu’à L’Elysée, le projet Kolmi-Hopen finit donc par s’inscrire au cœur des enjeux de souveraineté nationale et de réindustrialisation soulevés par le contexte sanitaire de 2020. "Nous avons beaucoup travaillé avec Kolmi-Hopen sur le dossier des masques. Leur projet de relocalisation de la production de gants en nitrile, qui ont manqué durant la crise, répondait au double objectif de revitalisation d’un territoire et de reconstruction de notre souveraineté sanitaire", indique Agnès Pannier-Runacher, ministre déléguée à l’Industrie. En déplacement en Sarthe le 26 mai 2021, elle a également rappelé son intérêt pour ce dossier local. "C’est un sujet qui m’a touchée. Nous nous sommes rencontrées avec Christelle Morançais au début de mon mandat pour rechercher des solutions de réindustrialisation pour l’ancien site Arjowiggins. Si le projet a pu aboutir, c’est par l’intelligence collective, au-delà des divergences politiques." L’État va ainsi soutenir l’installation de la future usine à hauteur de 10 millions d’euros, la région Pays de la Loire apportant 5 millions d’euros.Prête à répondre au marché
Au-delà des appuis et de l’union sacrée des politiques, le site de Bessé-sur-Braye possède des atouts qui ont su séduire le porteur de projet. Rachetée en juin 2020 par le groupe canadien Dottori à travers sa filiale Paper Mill Industries (PMI), l’ancienne papeterie s’étend sur 45 hectares et ses installations sont prêtes à l’emploi. "Les bâtiments sont adaptés pour accueillir nos lignes qui sont hautes de 13 mètres et longues de 120 mètres. Les flux d’eau et d’énergie sont également présents sur place. Et surtout, il y a ici une vraie expertise de la production en continu, ce que nous allons faire dans notre usine", explique Gérald Heuliez. Celle-ci s’étendra sur 11 500 m², soit 20 % de la superficie totale du site. Les premières lignes de production devant être installées à l’automne, pour une mise en route au printemps prochain. "Nous prévoyons les premières livraisons de gants en avril 2022. Il est important pour nous de respecter cette échéance. Avec la crise, les fabricants asiatiques de gants nitrile ont fortement augmenté leurs prix. Nous devons donc arriver sur le marché avant qu’ils ne pratiquent des tarifs plus agressifs. Démarrer de zéro aurait été trop contraignant. Le site de Bessé-sur-Braye nous permet donc de gagner 8 mois", révèle le dirigeant.