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La brosserie Julio change de dimension
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La brosserie Julio change de dimension

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La brosserie Julio change de dimension. Après avoir acheté l’un de ses concurrents basé en Bourgogne, la PME vient d’emménager dans de nouveaux locaux beaucoup plus vastes à Treillères (Loire-Atlantique). Son ambition : booster sa marque grand public Andrée Jardin, miser sur le développement à l’international et multiplier par trois son chiffre d’affaires en trois ans.

Jean-Baptiste Julio, dirigeant de la Brosserie Julio, entreprise fondée en 1947 — Photo : David Pouilloux

On n’imagine pas à quel point il y a des brosses partout et à quel point tout, ou presque, peut être brossé. "Depuis la création de l’entreprise, en 1947, par mon grand-père, nous avons 5 000 références de brosses, raconte Jean-Baptiste Julio, troisième génération de la famille, aux manettes de l’entreprise depuis une dizaine d’années avec son frère François-Marie. Le chiffre d’affaires était de 500 000 euros, en 2011. Nous l’avons multiplié par six depuis, soit 3 millions d’euros." Le développement stupéfiant de l’entreprise Julio, artisan industriel de la brosserie, a poussé les deux frères à déménager tout récemment du côté de Treillères. "Nous avions 600 m2 à la Chapelle-sur-Erdre, rapporte le jeune dirigeant. Maintenant, nous avons de la place pour nous développer avec 2 000 m2. Il fallait préparer l’avenir…"

La success story de l’entreprise Julio repose sur le choix stratégique de se diversifier vers des produits grand public au moment où les deux frères ont pris les rênes de l’entreprise en 2011. "La Brosserie Julio était il y a dix ans un fabricant de brosses pour l’industrie, des brosses sur-mesure, en petites séries", explique Jean-Baptiste Julio. La marque faisait à 100 % du B to B, et s’est retrouvée en danger lorsqu’un gros industriel, le fabricant de rotatives d’imprimerie Goss, a fermé son site nantais des Batignolles, en 2009.

Une dimension esthétique et durable

Au lieu de fermer boutique, les frères envisagent l’avenir avec la diversification. Ingénieur de formation, Jean-Baptiste Julio a un atout dans sa poche : il est fan de décoration et de design. "Une entreprise, c’est aussi l’expression de soi, de nos envies, estime-t-il. Et l’expression maximum de notre savoir-faire." Avec son frère, il visite le salon international maison & objet, à Paris. "Il fallait adresser un autre marché que l’industrie, de plus en plus de difficultés à l’époque, rappelle le dirigeant. Nous avons fait appel à un couple de designers nantais, Mr et Mrs Clynk afin qu’ils donnent des formes contemporaines à nos produits, que ce soit de beaux objets que l’on a envie de sortir de nos placards et de montrer. Nous avions conscience que l’on ne pourrait pas fabriquer les brosses les moins chères. En revanche, on s’est dit que l’on allait fabriquer les plus belles. Nos brosses, nos balais et balayettes sont des objets du quotidien. On tenait à ce qu’ils aient une dimension esthétique et durable, qu’ils soient de vrais objets de décoration."

Boutique Andrée Jardin, à Nantes. Elle sert également de showroom — Photo : David Pouilloux

Un magasin show-room à Nantes

La diversification est lancée sous la marque Andrée Jardin, imaginée à partir du prénom et du nom de jeune fille de la grand-mère. "Une femme formidable qui a participé au développement de l’entreprise familiale." La qualité des produits et leur durée de vie, ainsi qu’un design soigné, font le succès de la marque auprès d’une clientèle ayant soif d’authenticité et bénéficiant d’un certain pouvoir d’achat. Une opération de croissance organique réussie : rapidement, le B to C prend l’ascendant dans le chiffre d’affaires. "La marque Andrée Jardin représente les trois quarts de notre chiffre d’affaires aujourd’hui, dit-il. Nous avons un site de vente en ligne et nos produits sont distribués en boutiques, chez des détaillants."

La marque vient également d’ouvrir son propre magasin, à Nantes, dans le quartier Graslin, qui sert également de show-room et de bureaux pour une partie de l'équipe. Une échoppe qui participe au chiffre d’affaires de la PME de 22 salariés. Les références de la marque Andrée Jardin se retrouvent principalement dans l’univers de la cuisine et de la salle de bains : brosses pour les casseroles, pour la vaisselle, brosses à cheveux, à dos, pour les ongles, la barbe… "Nous avons bien développer notre gamme de produits pour la maison et toute la famille." Un kit brosse, éponge et produits pour les baskets promet de cartonner chez les ados.

Fabrication d’une brosse pour les moules qui permet de les séparer les unes des autres — Photo : David Pouilloux

Des brosses pour les moules, les Petits beurre Lu et le curé nantais

Dans les ateliers de Treillères, où les salariés et les machines ont trouvé davantage d’espace, les produits destinés à l’industrie conservent néanmoins une bonne place. "Nous n’avons pas laissé tomber cette activité, précise le dirigeant, nous avons même renforcé le commercial." Comme à l’origine où le grand-père fabriquait et livrait lui-même des brosses pour les chantiers navals, la Brosserie Julio fournit un grand nombre d’industriels locaux. "Nous fabriquons les pinceaux qui caressent les biscuits Petits Beurre pour y déposer la dorure, commence le dirigeant. Nous concevons des brosses pour les maraîchers, des brosses qui relèvent les feuilles des poireaux avant l’arrachage. Nous avons aussi des brosses pour séparer les moules de bouchot les unes des autres quand elles sont en essaims compacts. Nous fournissons des brosses qui lissent le dessus des fromages curés nantais, à Pornic. Pour Tipiak, nous fabriquons les brosses qui travaillent le couscous pendant la cuisson."

Le développement stratégique de la brosserie Julio repose également sur un joli coup de croissance externe réalisé voilà un an tout juste. La brosserie Cardot, en Saône-et-Loire, n'a pas de successeur dans la famille. "Une très belle maison spécialisée dans les brosses métalliques, créée en 1880, relate Jean-Baptiste Julio. La dernière en France de ce type. Si on ne la rachetait pas, ce savoir-faire français, ce patrimoine industriel, aurait disparu." Le duo de frères s’offre l’entreprise moyennant un investissement de 500 000 euros. "En un an, nous réalisons déjà des bénéfices, sourit le dirigeant. Nous avons rapatrié l’outil industriel ici à Treillères. Cette marque complétait notre offre pour l’industrie."

Sous la marque Cardot, la brosserie Julio fabrique des brosses métalliques pour les autotamponneuses — Photo : David Pouilloux

Des brosses pour les autotamponneuses

Les poils des brosses Cardot ne sont en effet pas en crin de cheval, fibre de cactus, d'agave, de noix de coco ou en soies de porc, contrairement à celle de la marque Andrée Jardin, mais en acier et laiton. Pour des brosses destinées aux ateliers de l’industrie automobile, nucléaire, navale, où l’on a besoin de brosser les soudures ou de décaper des plaques de métal. "La marque Cardot nous a offert des synergies avec ce que l’on savait faire avec nos brosses industrielles pour l’agroalimentaire." Parmi les usages étonnants des produits Cardot, on trouve par exemple, les brosses des autotamponneuses qui permettent de faire passer le courant au niveau du sol.

La brosserie Julio est reliée aux industriels de son territoire, aussi bien en tant que fournisseurs que client. "Notre souhait était de fabriquer des produits en local avec des matériaux travaillés près de chez nous, notamment le bois, chêne, hêtre, frêne, essentiellement français", explique le patron. La brosserie Julio fait appel pour ses manches et supports en bois dans lesquels sont implantées les touffes de fibres à Baudry, une menuiserie du Maine-et-Loire.

Brosses Andrée Jardin, du made in France qui plaît à l'international — Photo : David Pouilloux

Une excellence française qui plaît à l'international

Autre point fort sur le plan commercial de cet artisan du made in France ? "Pour une clientèle française, européenne ou américaine, cela a beaucoup de sens d’acheter un produit issu d’une entreprise historique, avec trois générations qui se suivent, et dotée d’un savoir-faire rare."

Comme le géant du luxe Hermès, la brosserie Julio bénéficie du label d’état Entreprise du patrimoine vivant, qui reconnaît l’excellence d’un savoir-faire d’exception, très apprécié à l’international. Aujourd’hui, Julio exporte dans une vingtaine de pays, en particulier aux États-Unis, en Scandinavie, en Australie ou au Japon. "L’export représente 30 % de notre chiffre d’affaires, on vise les 50 % d’ici à trois ans avec une montée en puissance de notre marque Andrée Jardin et un triplement global de notre chiffre d’affaires", fixe Jean-Baptiste Julio. Parions que la stratégie pour y parvenir sera au poil.

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