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GeorgesPaul : l’enseigne de mode masculine relève le pari de la croissance
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GeorgesPaul : l’enseigne de mode masculine relève le pari de la croissance

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En 2019, Christine Jutard a fondé GeorgesPaul, une enseigne de prêt-à-porter multimarques pour homme. Avec un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros, ce nouveau réseau de mode relève le pari de la croissance sur un marché à tendance baissière. Outre un positionnement premium, la dirigeante mise sur différents relais de développement : les marketplaces, l’international, une marque propre, etc.

Avec une de ses boutiques installée dans le centre commercial lillois Euralille, sur 150 m², l'enseigne de mode masculine GeorgesPaul bénéficie d’un trafic de près de 17 millions de visiteurs par an — Photo : BAMBAM PRODUCTION - GOOD MURPHY STUDIO

Ex-directrice générale de Pimkie ou encore ex-DRH de Kiabi, Christine Jutard s’est laissée gagner par le virus de l’entrepreneuriat. En juin 2019, elle a racheté deux commerces régionaux de prêt-à-porter, dans l’idée de créer un réseau multimarques de mode masculine, baptisé GeorgesPaul. Face à un marché de l’habillement à la peine, Christine Jutard a fait le pari de se positionner sur le prêt-à-porter multimarques pour hommes, moins concurrentiel et surtout, sur un segment premium. "Les deux créneaux qui fonctionnent dans l’habillement sont soit l’entrée de gamme, soit le premium et au-delà", souligne cette entrepreneuse, forte de 25 années d’expérience dans de grandes enseignes textiles.

Trois ans après le démarrage, ce parti pris a porté ses fruits : l’enseigne lilloise compte huit boutiques en propre, dont cinq d’environ 150 m², situées dans des centres commerciaux (à Lille, Englos, Seclin, Villeneuve-d’Ascq et Arras) et trois de près de 500 m², en centre-ville (Lens, Valenciennes et Mons). L’ensemble réalise un chiffre d’affaires de 10 millions d’euros, avec une soixantaine de salariés. Pour poursuivre son développement, GeorgesPaul table sur plusieurs relais de croissance : le développement d’une marque propre, la présence sur les marketplaces, le développement à l’international…

Deux vagues d’acquisitions

Au moment de se lancer dans l’entrepreneuriat, Christine Jutard a opté pour le format de la reprise. "Je suis davantage une développeuse qu’une créatrice", constate-t-elle. L’entrepreneuse, qui a examiné plusieurs dossiers, avait deux prérequis : reprendre une entreprise en bonne santé, dans un domaine d’activité qui lui plaise. Son choix s’est porté sur deux fonds de commerce positionnés sur le vestiaire masculin : GeorgesPaul à Valenciennes (Nord) et Blondeau, à Lens (Pas-de-Calais). Ces établissements sont chacun centenaires et d’anciens tailleurs, devenus par la suite des boutiques de prêt-à-porter premium pour hommes. Si les deux marques jouissent d’une belle notoriété, une étude a donné une petite longueur d’avance à GeorgesPaul, qui est devenu le nom de ce nouveau réseau de boutiques. L’enseigne, dont la clientèle affiche un âge moyen de 30-35 ans, travaille avec quatre marques principales : Hugo Boss, Eden Park, Ralph Lauren et Tommy Hilfiger.

Ce réseau s’est agrandi en 2022, avec l’acquisition de cinq magasins régionaux de l’enseigne Star Folies, spécialisée dans l’habillement pour homme. La première vague de reprise a été financée grâce à Bpifrance et des partenaires bancaires. Pour la seconde, Christine Jutard a envisagé un temps une levée de fonds. "Il a finalement été possible de la financer en réinvestissant le résultat et avec le soutien de nos partenaires bancaires", détaille-t-elle. Enfin, GeorgesPaul a complété ce maillage avec l’ouverture, en 2022, d’une boutique à Mons, en Belgique.

Une marque propre en réponse à la crise sanitaire

Entre ces deux vagues d’acquisitions, Christine Jutard a dû relever un défi inattendu : celui de la crise sanitaire. S’il a contrarié le calendrier du projet, l’entrepreneuse a réussi à transformer cette période compliquée en opportunité. "En mars 2020, quand les magasins ont fermé, on s’est dit que c’était le bon moment pour réaliser notre site Internet, qui a été lancé en moins de quinze jours", relate la dirigeante. Ce site compte à présent près de 4 000 produits et va représenter cette année 10 % des ventes.

La crise sanitaire a également été l’occasion pour GeorgesPaul de concevoir et commercialiser des vêtements en marque propre. "Durant l’hiver 2020, nous nous sommes retrouvés en rupture de pantalons, en raison des problèmes d’approvisionnement liés à la crise sanitaire. L’idée est alors née de réaliser notre propre chino, co-conçu avec les vendeurs, qui connaissent bien les produits à succès". Ce pantalon a été dessiné par la belle-sœur de Christine Jutard, qui se trouve être styliste modéliste, avant d’être fabriqué en Tunisie. GeorgesPaul renouvelle l’expérience durant l’hiver 2021, avec un pull fabriqué au Portugal.

Le succès de ces produits donne à la dirigeante l’envie de poursuivre l’aventure. "L’idée n’est pas de créer une grande marque, ce n’est pas notre métier. Nous avons cherché en revanche une manière de nous différencier". Le projet prend alors une tournure responsable, avec des vêtements made in France, voire made in Hauts-de-France. "D’ici quelques mois, nous allons lancer la production d’un tee-shirt en coton biologique, fabriqué en France pour le tissage, l’ennoblissement et la teinture, ainsi qu’en Hauts-de-France pour la partie confection, en partenariat avec l’entreprise lilloise Lemahieu". Les prochaines étapes seront la fabrication d’un polo, toujours avec Lemahieu, ainsi que le rapatriement en France de la fabrication du chino et du pull.

Se renforcer à l’international

En parallèle, GeorgesPaul s’est lancé dès 2020-2021 sur le créneau de la seconde main, l’idée étant de cibler des produits de marque premium, en très bon état. "Il n’y a pas particulièrement de demande de la clientèle masculine. Mais quand on leur présente ces produits, les hommes s’y mettent". Il s’agit donc plutôt d’anticiper une tendance de marché et de rendre plus accessibles des produits de qualité, dans un contexte d’inflation. Avec la flambée des prix, notamment dans le domaine de l’énergie, 2023 est une année compliquée, Christine Jutard ne le cache pas. "Les loyers ont augmenté et les factures d’énergie ont été multipliées par deux. Mais cela ne veut pas dire que 2024 sera une année difficile : c’est assez imprévisible. Si on fait bien notre métier, il n’y a pas de raisons que cela ne fonctionne pas."

La chef d’entreprise a encore plusieurs cartes à jouer pour poursuivre son développement, notamment celle des marketplaces comme Zalando, Amazon, Spartoo… "Avec quatre collections par an, aucune marque n’a la totalité de ses produits en ligne. Il y a de la place pour un acteur comme nous". GeorgesPaul mise aussi sur l’international, via l’e-commerce, avec des opportunités identifiées dans des pays francophones ou au Maghreb. "Nous aviserons selon les droits de douane". Enfin, l’enseigne s’est donné trois ans pour réussir son implantation en Belgique, avant de "compléter le maillage via des rachats de boutiques, dans des villes où les grandes marques ne sont plus présentes". L’objectif n’est toutefois pas de développer un réseau de mode d’envergure nationale : "Nous ne faisons pas de course à la croissance. Je tiens à préserver la proximité des équipes, c’est pourquoi nous n’irons pas à plus de deux heures de Lille".

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