Après trois années de "rattrapage" faisant suite à la crise sanitaire de la Covid-19, l’emploi des cadres devrait opérer un retour à la normale en 2024 dans le Grand Est, selon l’Association pour l’emploi des cadres (Apec), pour croître de 1 % cette année et s’établir à 14 230 recrutements contre 14 120 l’an passé. "Les perspectives de recrutement de cadres dans la région sont moins bien orientées et formalisent la prudence des entreprises compte tenu des aléas et des incertitudes pesant sur la croissance", estime Florence Heitz, déléguée régionale Apec Grand Est depuis le mois d’octobre 2023.
L’Alsace concentre la moitié des recrutements
Les prévisions en région épousent celles escomptées au niveau national où une croissance de 2 % est espérée. Dans le Grand Est, le territoire alsacien concentrerait plus de la moitié (51 %) des recrutements devant la Lorraine (32 %) et la Champagne-Ardenne (17 %). Les secteurs de Strasbourg, Obernai-Molsheim, Haguenau, Metz et le nord de la Moselle restent les plus dynamiques. "Mulhouse pourrait tirer son épingle du jeu dans les prochaines années avec l’implantation de nouvelles entreprises, sa proximité avec la Suisse et des prix de l’immobilier beaucoup moins élevés que dans le reste de l’Alsace", observe Florence Heitz.
Le Grand Est se démarque avec un nombre élevé de créations de postes de cadres (3 130 en 2023) en raison du poids de l’industrie sujette à de nombreuses transformations structurelles. Autre spécificité de la région : la part d’embauches dans les ETI et grands groupes qui s’élève à 45 %, contre 38 % dans le reste du pays, par rapport aux PME.
Dans le Grand Est, des cadres majoritairement masculins et plus expérimentés
Au niveau des fonctions, les cadres commerciaux (19 %) et les cadres en études-R & D (16 %) sont les plus prisés tandis que le secteur de l’informatique s’inscrit dans une dynamique de long terme. Les hommes sont également davantage représentés (65 %) que les femmes (35 %). Le panel dressé par l’Apec relève aussi que plus d’un tiers des recrutements (35 %) concerne des cadres possédant plus de 10 ans expérience, contre 25 % au niveau national.
Si l’optimisme demeure au sein de l’organisme, Florence Heitz rappelle que le marché de l’emploi reste soumis à une croissance économique incertaine notamment face à "un contexte géopolitique anxiogène" et la hausse des taux d’intérêt. "Il faut remonter 30 ans en arrière pour trouver trace de destructions d’emplois cadres", souligne-t-elle.
Au Luxembourg, des seniors prêts à finir leur carrière en France
En revanche, des difficultés de recrutement persistent pour 7 entreprises sur 10, au niveau national comme dans le Grand Est, ce qui nécessite une part d’ingéniosité selon l’Apec. "En Alsace, par exemple, on a un taux de chômage très bas dans certains secteurs. Nous incitons les entreprises à effectuer un pas de côté en matière de recrutement, à regarder les CV différemment", indique la directrice régionale.
L’emploi des seniors est aussi un des défis de l’Apec qui accompagne les entreprises dans le développement de leur attractivité et la rédaction d’offres d’emploi. "On perçoit un soubresaut dans le nord mosellan où des cadres ayant fait l’essentiel de leur carrière au Luxembourg se projetteraient à revenir travailler en France, en acceptant de gagner moins mais en bénéficiant d’une meilleure qualité de vie en allégeant leurs trajets quotidiens", relève Florence Heitz. Une tendance qui commence aussi à s’observer dans le sud de l’Alsace chez certains travailleurs frontaliers en Suisse.
