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Coronavirus - Pascal Rémy (SNF) : « Nous ne pouvons pas arrêter notre production »
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Pascal Rémy PDG de SNF Coronavirus - Pascal Rémy (SNF) : « Nous ne pouvons pas arrêter notre production »

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Depuis le 18 mars, le groupe chimiste SNF (3,4 Md€ de CA ; 6 500 salariés dont 1 350 à Andrézieux-Bouthéon dans la Loire) est plongé dans une profonde crise sociale. La CGT et la CFDT ont alerté la direction sur « un danger grave et imminent » en lien avec la propagation du coronavirus pour que les salariés puissent faire valoir leur droit de retrait. Mais pour le PDG du leader mondial du polymère pour le traitement de l’eau, la récupération assistée du pétrole et les réactifs pour mines, Pascal Rémy, toutes les mesures ont été prises pour assurer la sécurité des salariés et maintenir ainsi « une activité vitale ».

Pascal Rémy, PDG du groupe chimiste SNF, estime que toutes les mesures ont été prises pour assurer la sécurité des salariés face au risque de transmission du coronavirus — Photo : SNF

Le Journal des Entreprises : Le 18 mars, la CGT et la CFDT vous ont alerté sur « un danger grave et imminent ». Un préavis de grève illimitée a même été déposé par la CGT qui dit que vous n’avez pas pris les mesures adéquates pour protéger les salariés contre le risque de transmission du coronavirus. Que répondez-vous aux syndicats et aux salariés qui ont peur de venir travailler ?

Pascal Rémy : Je comprends les inquiétudes des salariés mais je tiens quand même à souligner que c’est surtout la CGT qui, sur le plan national, demande à toute la chimie d’arrêter de travailler. Chez nous, la CGT relaie simplement les directives nationales. Cela n’a rien à voir avec les mesures que nous avons pu prendre. Et nous estimons que nous avons pris toutes les mesures qui pouvaient être prises.

C’est-à-dire ?

Pascal Rémy : Nous avons commencé dès janvier en disant aux personnes qui revenaient de voyage de ne plus venir. Dès que le gouvernement a annoncé la fermeture des écoles, nous avons eu des salariés qui sont restés chez eux pour pouvoir garder leurs enfants. Nous avons ensuite mis en place le télétravail, même en mode dégradé, pour que les personnels dont la présence sur le site n’est pas indispensable restent chez eux. Nous avons aussi fait en sorte de respecter les mesures barrières en aménageant les horaires des équipes, administratives et en production, pour qu’elles ne se croisent pas. Les salles de contrôles, les vestiaires, les douches ont été régulées en fonction des mesures de distanciation. Nous avons même dédié du personnel pour s’assurer que les mesures sont bien respectées sur l’ensemble du site.

Malgré toutes ces mesures, ne craignez-vous pas de voir des salariés se mettre en arrêt ou faire valoir leur droit de retrait et de vous trouver en situation de pénurie de main-d’œuvre dans les jours et semaines à venir ?

Pascal Rémy : Je ne l’espère pas. Nous avons pris toutes les mesures possibles pour répondre aux directives du gouvernement. Nos salariés ne prennent pas plus de risque en venant chez nous qu’en se rendant dans un supermarché. Nous en avons d’ailleurs beaucoup qui viennent car ils estiment que nous avons mis en place les bonnes mesures pour assurer leur sécurité. Nous avons même des commerciaux qui, n’ayant plus de travail, se sont portés volontaires pour venir en aide sur d’autres postes qui ne demandent pas de qualification particulière. Ces salariés ont compris le caractère vital de notre activité et n’ont aucun problème à venir travailler.

N’aurait-il pas été possible de stopper votre production ?

Pascal Rémy : Nous avons déjà arrêté toutes nos fabrications non essentielles. Seuls les ateliers qui fabriquent des produits pour le traitement de l’eau et quelques industries essentielles comme la pharmacie sont opérationnels. Le traitement de l’eau, qui représente 65 % de l’activité du site, est vital. La quasi-totalité des stations municipales de traitement d’eau en France et une grande majorité des stations industrielles utilisent nos produits. Ces stations ne peuvent fonctionner sans nos produits et une rupture dans l’approvisionnement risquerait d’engendrer une crise sanitaire qui viendrait s’ajouter à la crise sanitaire actuelle. Un rejet des boues non traitées dans les rivières conduirait non seulement à une catastrophe environnementale endommageant la faune et la flore mais surtout à une pollution des rivières utilisées comme prise d’eau potable par les villes en aval.

Ces stations n’ont pas de stock pour voir venir ?

Pascal Rémy : Nous ne connaissons pas précisément les stocks des différents sites en France mais ils se montent au mieux à quelques semaines. SNF est donc contraint de continuer à produire avec une difficulté supplémentaire puisque nos commandes ont augmenté de 60 % depuis le début de la crise. Une croissance qui s’explique par la volonté de nos clients de faire des stocks de précaution. Pour l’instant, nous arrivons à répondre à cette demande avec environ la moitié du personnel encore présent sur notre site d’Andrézieux-Bouthéon. Et c’est vital car nous sommes le seul site français et quasiment le seul site européen - ou en tout cas le plus gros - à fabriquer des produits pour le traitement de l’eau. Les autorités savent très bien que nous sommes essentiels et que nous ne pouvons pas arrêter notre production.


SNF approvisionne les hôpitaux en masque FFP2 et gels hydroalcooliques

Via ses sites chinois, le groupe SNF a commandé des masques FFP2 qu’il redistribue au fur et à mesure de leur réception aux hôpitaux de la région stéphanoise. « À ce jour nous avons distribué 3 500 masques répartis entre le CHU, l’Hôpital Privé de la Loire, la Clinique mutualiste et l’hôpital de Montbrison. Nous venons d’en recevoir aujourd’hui 1 400 de plus que nous allons également distribuer », précise Pascal Rémy. Par ailleurs, SNF a commencé à fabriquer du gel hydroalcoolique, « le facteur limitant étant la disponibilité de l’alcool », précise le PDG du groupe. Les premières distributions de gel aux établissements médicaux ont commencé ce lundi 23 mars.

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