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Pierre d'Agrain : « La numérisation change le modèle économique de l’expertise-comptable »
Interview Toulouse # Finance

Pierre d'Agrain associé du cabinet Exco Pierre d'Agrain : « La numérisation change le modèle économique de l’expertise-comptable »

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Pierre d’Agrain est associé et membre du comité exécutif d’Exco, cabinet d’expertise-comptable de dimension nationale qui emploie une centaine de collaborateurs à Toulouse. Il préside aussi la start-up Ubifact et l’association Toulouse Place Financière.

Pierre d'Agrain, associé du cabinet d'expertise-comptable Exco, qui emploie une centaine de salariés à Toulouse — Photo : Exco

Vous présidez la start-up Ubifact, qui lance en ce mois de juin son service d’échange de factures interentreprises. Comment le numérique change-t-il le métier d’expert-comptable ?

Pierre d’Agrain : La numérisation de notre activité a un grand intérêt pour nos clients : les plateformes en mode SaaS facilitent l’accès à leur comptabilité au jour le jour. L’objectif est la réinternalisation de la comptabilité dans les entreprises, pour qu’elle redevienne un outil de gestion et que les dirigeants gagnent en autonomie. La numérisation des factures permet par exemple aux entreprises de s’échanger de la donnée plutôt que du papier. C’est un gain de temps, d’argent et de réduction des délais de paiement. Cela va devenir dès 2020 une obligation pour toutes les entreprises qui travaillent avec les administrations, avec la généralisation de la plateforme d’échange de factures Chorus Pro.

Pour nos cabinets d’expertise-comptable, la numérisation est aussi un changement de business model. Au lieu de vendre des heures de saisie, on vend des abonnements à nos plateformes et des flux d’informations. Cela change aussi notre recrutement, avec un plus haut niveau de compétences pour faire du conseil et du contrôle de conformité. Pour accélérer dans la transformation numérique, nous avons intégré le programme d’accompagnement de l’agence Adocc, qui doit nous aider sur la relation clients, le marketing digital ou encore les réseaux sociaux.

En quoi l’intelligence artificielle s’inscrit dans cette évolution ?

P. A. : Un grand-livre comptable, c’est déjà une belle base de données. Mais si vous travaillez avec 20 000 grands-livres, cela devient du "big data" : on peut envisager d’aller vers l’analyse comportementale, anticiper des flux comptables, créer des alertes client… L’IA peut analyser une facture pour proposer l’écriture comptable la plus pertinente. Demain on pourra sans doute valider a priori les factures, avec une intégration comptable quotidienne, plutôt que d’effectuer des contrôles a posteriori, une fois par mois.

Vous présidez aussi l’association Toulouse Place Financière. Où se situe la Ville rose en matière de financement de l’économie ?

P. A. : Toulouse est très bien pourvue sur l’offre capital-investissement. Mais il manque à notre métropole deux choses. D’une part un tissu d’entrepreneurs. Toulouse a historiquement été portée par de grands groupes et de grands laboratoires de recherche, mais on n’y compte pas assez de familles ayant suffisamment réalisé leur patrimoine professionnel pour participer au financement de petits projets en circuit court.

D’autre part, il manque un guichet unique pour orienter les start-up vers les acteurs pertinents pour financer leur développement, qu’il s’agisse de subventions publiques, de business angels ou d’investisseurs institutionnels. Nous faisons partie du groupement mené par Interfaces pour animer la future Cité des start-up. Un point fort de notre réponse est d’intégrer ce système de guichet unique. Aujourd’hui, en dessous d’un million d’euros de levée, il n’y a quasiment pas d’acteurs financiers qui puissent accompagner les start-up, car ils n’ont pas les moyens de se rémunérer.

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