Fin janvier, tout juste de retour de Davos, en Suisse, où elle était en compagnie du président de la République, Emmanuel Macron, la présidente de la région Pays de la Loire, Christelle Morançais, est passée des montagnes helvètes à la mer pour donner une conférence de presse sur le bilan et les perspectives du Grand Port Maritime de Nantes Saint-Nazaire. Pour cela, elle a enfilé sa casquette de présidente du conseil de surveillance de l’institution. "Partout où je vais, je suis la VRP du Grand Port Maritime, déclare-t-elle. Ce déplacement à Davos m’a convaincue qu’il faut porter une vision qui conforte notre territoire à l’échelle européenne et mondiale."
Une nouvelle génération de parcs éoliens
Le Grand Port Maritime, porte d’entrée de notre région, est évidemment un atout clé de notre territoire, atout qui le relie à tous les continents. En 2023, le trafic total du port s’élève à 28,4 millions de tonnes (Mt) dont 21 Mt à l’import et 7,3 Mt à l’export. "Il faut défendre et préserver le trafic maritime, qui est son cœur de métier, et ce malgré le contexte d’une très forte concurrence à l’international, poursuit Christelle Morançais. Le second axe consiste à accélérer la transition énergétique du grand port, qui dépend encore aujourd’hui largement des énergies fossiles." Michel Puyrazat, président du directoire par intérim de Nantes Saint-Nazaire Port, confirme : "10 % des énergies fossiles consommées en France passent par notre port." Elles représentent aujourd’hui les deux tiers de son trafic.
La décarbonation s’impose donc au menu du port. Et ce, dans un contexte de baisse impérative des émissions de CO2 et de développement des énergies renouvelables, avec l’objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2050. Moins de gaz ? Moins de pétrole ? Moins de CO2 ? Le changement de modèle économique du port s’opère déjà et s’opéra en premier lieu du côté des énergies marines renouvelables, de l’éolien en mer en particulier. "Nous avons construit un premier parc éolien en mer, au large de Saint-Nazaire, et un second est en route, celui d’Yeu-Noirmoutier, dont le port assurera la partie installation", précise Christelle Morançais. Le futur ? Un troisième parc, probablement, mais avec la technologie de "l’éolien flottant" qui incarne la nouvelle génération de parcs éoliens en mer, implantés loin des côtes. En appui de cette perspective, le vaste projet Eole (réaménagement des quais pour accueillir l’éolien flottant de grande dimension et de forte capacité) vise d’ailleurs à "redimensionner l’infrastructure existante" afin de "satisfaire aux exigences des industriels de la filière", moyennant un investissement de plusieurs dizaines de millions d’euros.
30 000 t d’hydrogène vert
Un autre axe de transition du port se situe du côté de l’hydrogène vert, à travers un projet porté par le champion nantais de l’hydrogène bas carbone, Lhyfe. Il est localisé à Montoir-de-Bretagne. Le projet consiste en l’implantation d’ici à 2028 d’une activité de production industrielle et de distribution d’hydrogène renouvelable ou bas carbone et d’e-carburants dérivés. La future unité industrielle de 250 MW (soit une production annuelle de 30 000 tonnes par an d’hydrogène renouvelable) contribuera à la "décarbonation du complexe industrialoportuaire et, plus largement, du transport maritime", souligne-t-on du côté du grand port.
Par ailleurs, Nantes Saint-Nazaire Port poursuit sa coopération avec EDF pour le développement, dans l’estuaire de la Loire, d’une filière de production de carburants d’aviation durables synthétiques. Le projet industriel se nomme Take Kair. Il est piloté par l’énergéticien français. Pour l’ensemble des partenaires, il représente un investissement de 750 millions d’euros. Il contribuera, à horizon 2028, à la décarbonation du transport aérien et de l’industrie, en cohérence avec les feuilles de route nationales et territoriales. Tous ces projets s’inscrivent par ailleurs en cohérence avec le programme "Zone Industrielle Bas Carbone" (ZIBaC), soutenu par une multitude d’acteurs locaux et nationaux. Et, en adéquation avec ce programme, un projet de captage, de transport et de séquestration de CO2 est mené par Elengy. Dénommé GoCO2, comme Grand Ouest CO2, il est soutenu par la Région des Pays de la Loire et par Nantes Saint-Nazaire Port et mobilisera un programme d’investissement de 1,7 milliard d’euros sur sept ans.
Le foncier, un relais de croissance
Reste que le grand port maritime n’est pas seulement un acteur du transport maritime, c’est aussi un propriétaire foncier des plus importants. À mi-parcours du projet stratégique 2021-2026, la valorisation du domaine foncier et la conduite de projets immobiliers logistiques et tertiaires font partie des relais de croissance identifiés par l’équipe dirigeante.
Dans la veine de la décarbonation, située à l’Est et au Nord du terminal méthanier de Montoir-de-Bretagne, une première centrale solaire au sol a été mise en service en janvier 2023. Avec ses 14 000 panneaux solaires au sol disposés sur une surface de 9 hectares, cette centrale, exploitée par Engie Green, aura une capacité de 7,6 MW d’électricité. Par ailleurs, un second projet, porté par l’énergéticien Amarenco, sur une surface de 13,9 ha, à l’ouest du terminal méthanier, est en cours d’études administratives.
Un avenir pour le hangar 12
Parmi les projets qui concernent l’immobilier, les Nantais seront aux premières loges. Nantes Saint-Nazaire Port souhaite insuffler une nouvelle vie à d’anciens sites portuaires, situés en cœur de la Cité des Ducs de Bretagne. "Le site du quai marquis d’Aiguillon, en bord de Loire, situé à mi-chemin entre le quartier en pleine évolution du Bas-Chantenay et le cœur de ville, a ainsi fait l’objet d’un appel à manifestation d’intérêt, rappelle Michel Puyrazat. Le hangar 12 laissera place à un bâtiment nouveau, exemplaire sur le plan environnemental et qui contribuera au développement économique du Bas-Chantenay et à la mise en valeur du patrimoine portuaire. Le projet lauréat sera désigné dans le courant de l’année 2024."
D’autres projets de valorisation immobilière sont par ailleurs à l’étude sur le secteur de l’île de Nantes, cœur battant du renouvellement urbain de la métropole nantaise. Ils viendront en renfort de l’activité classique du port, le transport maritime, qui verra "l’ouverture de trois nouvelles lignes commerciales en 2024", précise Michel Puyrazat.
Côté investissements, après une année 2023 à 32 millions d’euros, ce sont 33,5 millions d’euros que le port investira en propre sur l’ensemble de ses projets cette année. Mais la Région, ainsi que l’État, abonderont de 32,5 millions d’euros de subventions chacun ce budget dans le cadre du plan Etat-Région 2023-2027. Au total, via d’autres investissements, quelque 112 millions d’euros viendront alimenter les projets de transformation du grand port dans les années à venir.
