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La biotech Domain Therapeutics s’arme pour s’imposer sur le marché de l’immunothérapie
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La biotech Domain Therapeutics s’arme pour s’imposer sur le marché de l’immunothérapie

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La biotech alsacienne Domain Therapeutics vient de boucler une levée de fonds de 39 millions d’euros pour lancer des essais cliniques et poursuivre ses programmes de recherche. Elle se positionne comme l’un des acteurs mondiaux en pointe dans le développement de nouvelles thérapies en immuno-oncologie.

Domain Therapeutics compte des laboratoires dans le parc d’innovation d’Illkirch-Graffenstaden, à Strasbourg, et une filiale au Canada — Photo : Luc Baron

Elle avait été annoncée en 2019 mais Domain Therapeutics a mis du temps à la concrétiser : la biotech alsacienne a bouclé en mai une levée de fonds en série A d’un montant de 39 millions d’euros pour mener des essais cliniques et développer de nouveaux programmes de recherche. Ce qui la positionne comme un acteur clé de la thérapie par immunologie dans le traitement des cancers. L’entreprise de 100 salariés (dix millions d’euros de produit d’exploitation) revendique en effet le plus gros portefeuille mondial de récepteurs couplés aux protéines G (RCPG), des récepteurs "très exprimés à la surface des cellules qui jouent un rôle important dans le mécanisme de résistance de la tumeur", décrit la biotech implantée dans le parc d’innovation d’Illkirch-Graffenstaden, près de Strasbourg, mais aussi au Canada, à Montréal, à travers une filiale de 15 salariés.

Un espoir pour les malades

Domain Therapeutics a l’ambition de découvrir et développer de nouvelles thérapies contre le cancer en ciblant les RCPG. "La chimiothérapie et la radiothérapie entraînent de nombreux effets secondaires lourds pour les patients traités contre des cancers. L’immunothérapie, en revanche, n’a pas d’effets secondaires. Elle est là pour réveiller et réarmer le système immunitaire pour vaincre la maladie", analyse Pascal Neuville, PDG de la biotech Domain Therapeutics.

L’espoir est grand pour la médecine et les malades puisque "les patients qui répondent à ce type de médicaments sont guéris avec une survie sans progression de la maladie au-delà de cinq ans". Pourtant, actuellement, seuls 15 à 30 % des patients traités par immunothérapie répondent bien à ce type de traitement et donc guérissent. L’objectif de Domain Therapeutics est d’accroître ce taux de réponse en ciblant les récepteurs RCPG responsables des mécanismes immunosuppressifs permettant à certaines tumeurs de résister aux immunothérapies. "Le coût d’un traitement d’immunothérapie est d’environ de 100 000 euros par patient et par an. Les cancers actuellement traités le plus efficacement sont le mélanome et le cancer du poumon, en association avec la chimiothérapie", précise Pascal Neuville.

Nouveau modèle économique

Lors de sa création en 2008, la biotech Domain Therapeutics menait ses recherches en direction des maladies rares et neurologiques. "Le modèle d’affaires était alors des collaborations avec les groupes pharmaceutiques (Merck Allemagne, Pfizer, Boehringer Ingelheim, Takeda, etc.) sur des phases de découverte précoce, puis la création d’une société pour chaque produit à développer", se souvient Pascal Neuville. Un modèle qui a généré 70 millions d’euros de revenus pour la biotech alsacienne avec la création de six spin-off.

Un virage s’est opéré il y a quelques années quand les premiers RCPG ont été découverts. "Nous continuons de travailler avec les standards et grands noms de la pharma pour une visibilité et une crédibilité auprès de nos investisseurs", précise le dirigeant. La biotech a notamment obtenu avec Merck KGaA un premier candidat médicament RCPG en immuno-oncologie. Cet accord de collaboration démarré en 2017 peut permettre à Domain Therapeutics de recevoir 240 millions d’euros au total et a abouti en février 2022 à un essai clinique de phase 1 chez des patients aux États-Unis et au Canada. Cependant, la PME "souhaite désormais dédier le maximum de ses ressources à ses propres programmes pour en être propriétaire", précise son PDG.

Des fonds internationaux

Et c’est l’objet de cette dernière levée de fonds réalisée en capital-risque auprès de fonds européens, canadiens et chinois. Aux côtés de l’investisseur Seventure Partners, déjà présent au capital de Domain Therapeutics, cette opération a été menée par trois chefs de file : Panacea Venture, CTI Life Sciences et 3B Future Health Fund, ainsi qu’adMare BioInnovations, Schroders Capital, Omnes, Turenne Capital, Theodorus et Viva BioInnovator. Il s’agit de la troisième levée de fonds de Domain Therapeutics après 2,1 millions d’euros levés en 2008, avec des fonds régionaux notamment, et deux millions d’euros levés en 2012. À cette date, Seventure Partners était entré pour la première fois au capital de Domain Therapeutics. "Ce fonds est l’un des meilleurs fonds français dans les biotech, il a amorcé la pompe, ce qui a pu rassurer et convaincre nos nouveaux actionnaires", souligne Pascal Neuville qui, aux côtés de l’équipe de management, détient 15 % du capital de la société alsacienne.

Viser les États-Unis

La levée de fonds bouclée, le premier essai clinique va pouvoir commencer en octobre, en Belgique et en France. Avec une ambition plus large, celle de lancer des développements cliniques aux États-Unis dans les prochaines années. Domain Therapeutics a déjà un pied en Amérique du Nord avec sa filiale installée à Montréal en 2013 après avoir pris une licence sur une technologie développée par cinq laboratoires canadiens. "Être présent au Canada est utile pour pénétrer le marché des États-Unis. Deux de nos collaborateurs s’occupent du commercial en Amérique du Nord. Nous pourrions recruter un directeur médical sur place pour accélérer notre développement", projette le PDG de Domain Therapeutics.

La présence de l’entreprise alsacienne sur le marché américain avec des développements cliniques sur place permettrait aussi de faciliter la venue de fonds américains, "puisqu’une prochaine levée de fonds serait envisageable une fois entrés sur ce marché", entrevoit Pascal Neuville.

En attendant, la biotech peut financer deux années d’activité, entre essais cliniques et développement de son portefeuille propriétaire de programmes RCPG, qui en compte cinq pour le moment. Elle prévoit une vingtaine d’embauches réparties entre Strasbourg, le Canada et, donc, les États-Unis. Le dirigeant aborde sereinement cette étape avec de moins en moins de difficultés de recrutements "en raison de la visibilité de la société". Les équipes strasbourgeoises bénéficieront même de locaux réaménagés et agrandis à partir du début de l’année 2023, avec des bureaux passant de 300 à 600 m². Domain Therapeutics a en effet racheté deux entreprises du parc d’innovation en 2019-2020 : Prestwick Chemical (26 collaborateurs) et Neurofit (13 collaborateurs), deux ex-filiales de Bionomics, une société biopharmaceutique australienne.

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