Coronavirus : Les ports alsaciens, chevilles ouvrières du maintien de l’activité économique
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Coronavirus : Les ports alsaciens, chevilles ouvrières du maintien de l’activité économique

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Pour assurer le maintien de l'activité économique en période de confinement et approvisionner la zone de chalandise au moment de la reprise, les ports alsaciens se mobilisent. Notamment pour assurer l'un des maillons de la chaîne logistique des biens de première nécessité.

Les ports alsaciens, dont celui de Strasbourg, sont mobilisés pour assurer la logistique et le maintien de l'activité économique en période de confinement. — Photo : © Bartosch Salmanski – 128dB

Bordée par le Rhin, l’Alsace est une terre de trafic fluvial. Un trafic d’autant plus surveillé en cette période de crise sanitaire et de pression sur la logistique et les transports. L’activité des ports fluviaux alsaciens contribue à maintenir le rouage de l’activité nécessaire au fonctionnement de la chaîne alimentaire et de produits de première nécessité.

Le transport routier, le plus touché

Le port autonome de Strasbourg (PAS) est le deuxième port fluvial de France en matière de trafic après les ports de Paris. En 2019, 380 000 équivalents vingt pieds (EVP) ont été transbordés à 60 % par camion, à 20 % par le fer et 20 % par la voie d’eau. Le PAS dispose de deux terminaux à conteneurs sur les zones Nord et Sud. C’est là qu’est pris le pouls du trafic depuis le début de la crise. « Après les grèves SNCF qui ont impacté le trafic de fret en fin d’année dernière, nous constations une reprise depuis mi-janvier. Mais depuis début mars, en raison des mesures de confinement en Chine, nous avions déjà commencé à enregistrer un ralentissement », décrit Monique Fischer, directrice générale de Rhine Europe Terminals (CA : 7,50 M€ ; 62 collaborateurs), filiale du PAS en charge de la gestion des terminaux.

À titre de comparaison, quand Rhine Europe Terminals enregistrait 4 000 à 4 500 conteneurs par semaine en mars 2019, tous modes confondus, il en a enregistré 3 700 la première semaine de confinement. « Une baisse directement imputable à l’épidémie de Covid-19 », assure Monique Fischer. « Le mode le plus touché est le transport routier, qui accusait -20 % la première semaine de confinement. 60 % du trafic routier sur le port dessert les entreprises locales qui ont fermé au fur et à mesure. Les rotations journalières sont moins nombreuses. De trois, elles sont passées à une par jour », décrit-elle.

À Colmar, le port assure le fondamental

Le port multimodal de Colmar / Neuf-Brisach (CA : non communiqué ; 27 personnes), géré par la CCI de Colmar, enregistre quant à lui un trafic d’environ 1,5 million de tonnes annuel, principalement en vrac et en colis lourds dont le service a été lancé au printemps 2019. Le trafic se répartit habituellement à tiers approximativement égaux entre le fer, la route et la voie d’eau. « Depuis la période de confinement, cette dernière a légèrement augmenté alors que les deux autres modes ont régressé », explique Christiane Roth, présidente de la délégation colmarienne de la CCI Alsace Eurométropole. L’élue consulaire souligne par ailleurs, que « malgré l’absence de 30 % dans les effectifs du port, l’établissement fonctionne en assurant le fondamental. Nous dépendons de l’activité de nos principaux clients. Certains poursuivent l’activité a minima, d’autres tournent davantage, comme les industries alimentaires ou de premières nécessités ».

Ainsi, Constellium (1 400 collaborateurs sur le site de Neuf-Brisach), l’un des clients les plus importants du port de Colmar, continue de fabriquer les feuilles d’aluminium pour les canettes de boisson tandis qu’Essity (12,2 Md € de CA en 2019, 2 500 collaborateurs en France) doit recevoir sa matière première pour assurer sa production de mouchoirs en papier, d’essuie-tout et de papier toilette à Kunheim. Enfin, selon Christiane Roth, « le port de Colmar manutentionne habituellement peu de conteneurs et est donc peu impacté par la baisse de ce trafic ».

À Mulhouse, le port pour alimenter l'hinterland

Les ports de Mulhouse Rhin (75 collaborateurs), répartis sur trois sites à Ottmarsheim, à l’Ile Napoléon et à Huningue, enregistraient en 2019 un trafic annuel de 7,7 millions de tonnes et de 82 153 équivalents vingt pieds sur les trois modes fer, route et voie d’eau. « Les ports de Mulhouse-Rhin sont un acteur économique important pour le territoire et desservent également l’Allemagne, la Suisse et la Bourgogne Franche-Comté. L’État a demandé de maintenir l'activité des ports. Quoi qu’il arrive, nous aurions poursuivi l’activité, les dockers sont attachés à leur port et veulent travailler. Nous avons un rôle à jouer pour alimenter l'hinterland (zone de chalandise, NDLR) car des entreprises commencent à redémarrer », estime Gilbert Stimpflin, président des ports Mulhouse-Rhin, de la CCI Mulhouse et de la CCI Grand Est.

Auparavant gérés par la CCI de Mulhouse, les ports sont gérés par une Semop, société d’économie mixte à opération unique, depuis début 2020. Un partenariat est en préparation avec « un acteur économique de premier ordre pour apporter du trafic conteneur et des débouchés à l’international », esquisse Gilbert Stimpflin. Alors que cette activité aurait dû démarrer au printemps, l’entrepreneur entrevoit un report de ce partenariat à l’automne.

Gérer les demandes de stockage

Par ailleurs, un autre aspect logistique à gérer est la réception d’importations qui proviennent encore des grands ports maritimes comme Anvers. « Les conteneurs arrivent pleins mais les entreprises destinataires sont parfois fermées et les conteneurs ne sont pas vidés. Il faut donc progressivement gérer les demandes de stockage de conteneurs pleins. Ainsi, les compagnies maritimes observent de près leurs conteneurs pour jongler avec des disponibilités entre les pleins et les vides », souligne Monique Fischer, de Rhine Europe Terminals.

Si les ports asiatiques, qui avaient eux aussi drastiquement ralenti leurs activités commencent à reprendre les exportations, ce sont désormais les flux d’exportations des entreprises alsaciennes qui sont impactés. Rhine Europe Terminals, qui se voit « comme un maillon de la chaîne logistique », poursuit son activité « car dans ces conteneurs se trouvent des composants essentiels à la chaîne de production des biens de première nécessité dans l’agroalimentaire et la pharmaceutique », précise Monique Fischer.

Une activité qui se poursuit avec le moins d’interaction possible pour respecter les gestes barrières et les mesures sanitaires. Pour ce faire, Rhine Europe Terminals compte notamment sur son système sans contact mis en place en 2019 dans une logique de dématérialisation des procédures à l’entrée des deux terminaux strasbourgeois. Encore peu utilisé par les transporteurs, le système Fast Gate propose pourtant aux conducteurs de s’enregistrer à distance pour éviter les contacts. Les transporteurs continuent d’être formés à distance à cette opération digitalisée pour inciter leurs conducteurs à prendre le pli.

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