Le mystère planait depuis sa création en août 2020. Après plus d’un an de R & D, Alsatex (trois collaborateurs) a lancé le recyclage d’un premier produit cet automne. La société, fondée par Ulrich Jahn, ancien directeur de Freudenberg Performance Materials à Colmar (Haut-Rhin), désormais à la retraite, est hébergée au sein du Pôle textile Alsace (73 membres entreprise) à Mulhouse (Haut-Rhin). Elle est spécialisée dans le recyclage de matériaux issus de l’industrie textile.
La start-up est incubée au Semia, l’incubateur public de la Région Grand Est, depuis septembre 2021. Elle effectuait jusqu’alors essentiellement du conseil à la transition environnementale pour les entreprises du textile. Désormais, elle "effiloche les chutes de production d’un matériau textile à base de polyéther sulfones (PES) produit dans la région pour le transformer en fibres de rembourrage pour un fabricant de coussins allemand, proche de la frontière", explique Pauline Carion, la présidente. Pour cette première commande d’une dizaine de tonnes, Alsatex a fait appel à deux sous-traitants, membres du Pôle textile Alsace.
Effilochage et extrusion
Pour étudier la fiabilité de ces fibres, la start-up s’est alliée au Laboratoire de physique et mécaniques textiles (LPMT), une unité de recherche de l’Université de Haute Alsace à Mulhouse. Prochaine étape, dont le calendrier n’est pas encore connu, transformer ce PES en fil recyclé.
La petite société ne compte pas s’arrêter là. Elle veut se lancer sur une seconde activité productive en 2022. Il s’agira d’extrusion, une technique qui consiste à faire fondre la matière qui est ensuite compressée pour passer dans une filière qui donne la forme souhaitée au produit final. Elle est mieux adaptée à certains rebuts industriels qui "ne peuvent pas être effilochés car la matière serait détruite par le procédé", explique Pauline Carion.
Privilégier les circuits courts
Pour cette activité, Alsatex va investir au 1er semestre 2022 entre 500 000 et 750 000 euros dans une machine actuellement développée en partie en collaboration avec la plateforme technologique de l’université de Lorraine Plastinnov à Saint-Avold, en Moselle. La machine pourra produire du granulé, notamment pour les plasturgistes du Grand Est. Pour la partie R & D, Alsatex s’est déjà fourni en matière première auprès du fabricant de masques haut-rhinois Barral (CA prévisionnel 2021 : 4 M€, 15 collaborateurs), à Rouffach qui récupère ses masques grand public en textile non-tissé de polyester-polyamide.
À l’avenir, Alsatex entend continuer à se fournir en matière première auprès des industriels de la région et à revendre en local ses produits finis. "Il faut que cela fasse sens du point de vue écologique, explique Pauline Caron, si on diminue un impact pour en rajouter un autre avec le transport routier, la démarche perd tout son intérêt." Pour développer ses activités, Alsatex a obtenu une bourse de la Région Grand Est de 30 000 euros pour les start-up et une bourse French Tech de Bpifrance de 30 000 euros elle aussi.