Philippe Chaumes (Excent) : « Les machines déplacent les compétences humaines »
Interview # Industrie # Innovation

Philippe Chaumes cofondateur et dirigeant du groupe Excent Philippe Chaumes (Excent) : « Les machines déplacent les compétences humaines »

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Concepteur et intégrateur de solutions industrielles, Excent (650 collaborateurs ; CA : 64 M€ en 2017) annonce une croissance sur les trois prochaines années, l’ouverture de trois nouvelles filiales en Europe en 2018 et une montée en puissance de son activité de création de produits propres.

Philippe Chaumes, cofondateur et dirigeant du groupe Excent. — Photo : ©Juliette Jaulerry/ Le Journal des entreprises

Le Journal des Entreprises : Excent a démarré en 1990 avec deux personnes. Vous êtes aujourd’hui 650 et visez les 1000 salariés dans trois ans. Comment avez-vous fait pour grandir ?

Philippe Chaumes : J’ai démarré avec mon associé Philippe Albero il y a 27 ans, avec l’idée simple de faire du conseil en ingénierie industrielle. Aujourd’hui, nous conseillons toujours nos clients sur l’optimisation de leurs process industriels, mais nous sommes aussi des concepteurs et intégrateurs de solutions. Nous avons gagné en technicité. Nous avons commencé à nous déployer en suivant nos clients : nous les avons suivis dans leur évolution géographique et dans l’évolution de leurs activités. La croissance organique nous a permis d’investir et de grandir progressivement, avec le soutien de nos banquiers. L’entreprise est restée 100 % privée.

De la croissance externe, aussi ?

P.C. : Nous avons aussi réalisé une opération de croissance externe en 2006 avec l’acquisition de la société Serta (secteur automobile, une centaine de salariés, ndlr). Nous sommes en phase de croissance et prévoyons de passer de 65 à 100 M€ de chiffre d’affaires d’ici deux à trois ans, avec un effectif qui doit atteindre le seuil psychologique des 1 000 salariés. Une taille plus confortable qui nous permettra d’être accompagnés plus facilement, financièrement parlant. Car nous prévoyons des besoins de trésorerie importants. Aujourd’hui, nous sommes ouverts à la croissance externe pour élargir notre champ de compétences. Pourquoi pas dans le domaine de la cybersécurité et de la sécurité des data.

Vous concevez aussi des produits propres. Dans quels domaines ?

P.C. : Dans l’ensemble de nos activités, l’aéronautique représente 50 % de notre chiffre d’affaires, avec Airbus et Safran comme clients principaux. Nous avons aussi des clients dans le ferroviaire, le spatial, l’événementiel (conception d’un globe intelligent lors de la Cop 22 à Marrakech), le militaire et l’éolien. Nos trois grands métiers sont le support à l’industrie, la livraison de projets clés en main et la création de produits propres.

« L’usine du futur n’est plus du futur, nous y sommes déjà. »

Ce troisième axe va prendre de plus en plus d’importance. Un effectif permanent de huit personnes est dédié à cette activité, mais nous allons passer rapidement à une vingtaine. Exemple de produits que nous créons : des tubes polyéthylène dédiés à l’acheminement du gaz. Cette année, nous allons tester notre fourche de moto eXcentive, à l’occasion des 24 heures du Mans. Ce nouvel élément mécanique représente une belle avancée pour la performance des motos. Nous étudions aussi une solution anti-vol pour les câblages des éclairages publics.

Le chariot JaXson a été présenté au dernier salon du Bourget. Pouvez-vous nous le décrire ?

P.C. : Ce produit illustre parfaitement le savoir-faire et les compétences de notre entreprise. A force d’observer nos clients industriels aéronautiques, souvent organisés en différents sites, et d’étudier leurs besoins, nous avons pu imaginer une solution adaptée et transversale, et donc économique : le smart trolley JaXson est un chariot qui permet l’intégration des nacelles de moteurs d’avion.

C’est un outil transversal, qui accompagne le produit pendant tout son cycle de vie, depuis la production jusqu’à la maintenance. Nous finalisons le premier de série de la version finale, mais déjà 14 exemplaires de la version T, plus petite, ont été vendus à Safran. Le développement de ce produit a nécessité un investissement d’1 million d’euros. Ce chariot n’est pas uniquement destiné à l’aéronautique et sa plus grande version pourra soulever jusqu’à 15 tonnes.

Comment définissez-vous l’usine du futur ?

P.C. : L’usine du futur n’est plus du futur, nous y sommes aujourd’hui ! Nous sommes embarqués dans cette vague depuis déjà un certain temps, avec notamment nos solutions de robotique et de cobotique (robots collaboratifs, ndlr) déjà développées pour nos clients. Finalement, l’industrie du futur c’est l’association d’un nombre incalculable de nouvelles briques technologiques. L’impression 3D, la réalité augmentée, les objets connectés sont inévitables. Nous sommes toujours en veille sur ces technologies. Mais notre force, c’est d’offrir une solution transversale à nos clients.

Quelles sont les problématiques liées à ces transformations ?

P.C. : La protection des données et, de façon plus large, la cybersécurité, font partie des grands enjeux à maîtriser. On nous interpelle d’ailleurs beaucoup sur ce thème. Sur les conséquences humaines liées à l’intelligence artificielle, il est faux de dire que les machines remplacent les hommes. Elles ne font que déplacer leurs compétences et entraînent l’arrivée de nouveaux métiers.

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