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Le gestionnaire de barriques H & A mature sa stratégie avec les spiritueux
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Le gestionnaire de barriques H & A mature sa stratégie avec les spiritueux

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Pionnier dans la gestion et la logistique de parcs de barriques de vin, le Groupe H & A créé en 2004 par Richard Hardillier et Florent Arrouy, poursuit son développement. Avec près de 50 % de parts de marché en France et présent dans 30 pays, H & A gère 750 000 barriques. Son implantation dans de nouvelles régions viticoles s’accompagne de nouveaux cycles de vie des fûts pour le marché des spiritueux.

Le Groupe H & A créé en 2004 par Richard Hardillier et Florent Arrouy a fait évoluer son modèle vers la smart économie. — Photo : Anne Cesbron

Il faut imaginer un voyage au long cours, une traversée des océans. Passée par les chais d’un grand cru en France, une barrique en chêne centenaire rejoint le Portugal pour y élever du porto. Et puis, la voilà qui embarque à bord d’un navire pour rejoindre les Indes, ou encore l’Afrique où l’attendent d’autres breuvages. "Nous l’achetons neuve, nous la recyclons, nous la remettons à disposition d’un autre vin… On lui fait faire le tour du monde. Elle le mérite et nous, économiquement, en la louant plusieurs fois, nous diluons nos marges, ce qui permet à nos clients de payer moins cher", résume Richard Hardillier, président du Groupe H & A, spécialisé en gestion et logistique de parcs de barriques de vin, qu’il a créé en zone franche, à Lormont en 2004 aux côtés de Florent Arrouy. Le premier chiffre d’affaires s’établissait à un million d’euros.

En dix-huit ans, les fondateurs désormais basés à Bordeaux ont constitué leur trésor de guerre : un parc de 750 000 barriques, neuves et de seconde main, qui fait du groupe le leader de la gestion de fûts pour les domaines viticoles. En France, une barrique sur deux est gérée par H & A. "Nous étions partis, à l’origine, sur un métier axé sur la finance et la revente. Pour un château, les barriques représentant le premier poste de charges après les salaires", rappelle le dirigeant qui avance une autre donnée constitutive : le coût de la barrique est supérieur à un euro ramené à chaque bouteille d’un grand cru ou assimilé.

De la finance à l’usage

Les principes de l’économie circulaire ont rapidement amendé le projet de départ. "Il faut revenir à la genèse de cette barrique fabriquée en chêne pédonculé, un bois rare qui sert à la marqueterie, qui a été assemblé par un maître tonnelier. Notre mission a été de donner une seconde vie à ces ouvrages extraordinaires, dépréciés après seulement quelques années en chais. Nous ne pouvions plus les considérer comme des consommables. Nous avons transformé notre modèle économique, de la finance à l’usage. Notre métier s’inscrit désormais dans la smart économie", poursuit Richard Hardillier.

La clientèle de H & A Location soutient la démarche. En 2013, le groupe franchit le cap du millième client pour un chiffre d’affaires de plus de 100 millions d’euros. Entre-temps, H & A et ses 50 collaborateurs ont créé des filiales en Espagne, aux États-Unis et en Italie.

De nouveaux cycles de vie

La clé du succès réside désormais en deux mots : bonification et différentiation. "Une barrique qui a connu les plus grands vins, à Saint-Émilion, en Bourgogne, du merlot, du cabernet, c’est un trésor à partir duquel, on peut faire ensuite un grand whisky ou un grand rhum, c’est extraordinaire. Je n’ai rien inventé. Néanmoins, auparavant les barriques récupérées venaient d’Amérique où elles avaient fait les bourbons. Elles apportaient de la sucrosité. Aujourd’hui on recherche plus de subtilité, d’élégance", spécifie-t-il. Cette valeur ajoutée, acquise avec le temps et les vinifications successives, a pris la forme d’un quatrième cycle de vie pour les barriques depuis trois ans. Ce sont 75 000 barriques en 2022 sur la dernière année d’activité qui ont ainsi été remises en service dans les spiritueux. "Les gens ne cherchent plus des whiskies vendus à 15 euros la bouteille en grande surface, mais du terroir, de la différentiation. Lorsque vous pouvez dire que votre whisky a été fait avec une barrique qui a élevé du merlot, exposé sud sur un terrain argilo calcaire, et le plus grand pinot pour ensuite être avinée avec du porto, ce n’est plus du marketing, c’est un whisky absolument unique", s’enthousiasme le dirigeant.

Le groupe bordelais a ainsi en sa possession des centaines de milliers de barriques qui participent de ce cercle vertueux, lequel à l’échelle du groupe a représenté plus de 400 000 euros de chiffres d’affaires en 2021 (80 salariés). Et le marché amplifie le mouvement. "Sociologiquement tous les alcools forts aujourd’hui cherchent à devenir des alcools bruns. D’un rhum blanc à un rhum brun, la différence est simple : de 5 dollars on passe à 15 dollars. Entre les deux il y a barrique, c’est tout", martèle le dirigeant.

Stabiliser les coûts

Le groupe réalise 50 % de son chiffre d’affaires à l’international et a passé le cap des 100 millions de dollars aux États-Unis en 2021. "L’axe stratégique est de continuer à adresser le spirit et développer des cycles complémentaires", indique Richard Hardillier qui annonce qu’il va très prochainement augmenter la fréquence de ses voyages dans les milieux des spiritueux écossais et irlandais. "Développer le spirit, c’est stabiliser les coûts. Il n’y a pas de notion de millésime. Dans le milieu du vin, notamment dans nos climats océaniques, on peut passer de 52 à 12 hectolitres du fait du gel par exemple. C’est très violent et cela impacte tout le monde. Avec le spirit, on lisse ces coûts, le marché souffre de moins d’à-coups", explique-t-il. Cette offre de service a également séduit le marché dynamique du Bourbon qui recherche de plus en plus ces barriques "de finish" et pour lequel H & A a ouvert en 2020 une agence à Louiseville dans le Kentucky.

Le Groupe H & A estime avoir fait ses preuves dans le vin et disposer du plus grand parc de fûts au monde. Ainsi structuré pour engager des cycles supplémentaires de locations et capable de se projeter en fonction des barriques neuves qui entrent dans son giron, le bordelais fonce vers le milliard d’euros réalisé d’ici 4 ans.

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