Meurthe-et-Moselle
Hyvia : "Les premiers Renault Master hydrogène sortiront de l'usine lorraine de Batilly début 2022"
Interview Meurthe-et-Moselle # Industrie # Innovation

David Holderbach président de la coentreprise Hyvia (Renault Group/Plug Power) "Les premiers Renault Master hydrogène sortiront de l'usine lorraine de Batilly début 2022"

S'abonner

Le français Renault Group et l’américain Plug Power s’associent pour créer la coentreprise Hyvia, avec pour ambition de "décarboner la mobilité des véhicules utilitaires". Des fourgons Master à hydrogène seront fabriqués par l'usine Renault de Batilly, en Meurthe-et-Moselle, à partir de début 2022. Son objectif : atteindre les 30 % de parts de marché sur le périmètre du véhicule hydrogène d’ici 2030.

David Holderbach est le président de la coentreprise Hyvia, fondée en juin 2021 par Renault Group et l'américain Plug Power — Photo : Hyvia

Quand et comment est née votre coentreprise Hyvia ?

C’est le fruit d’un rapprochement de deux leaders mondiaux dans leurs domaines. Le groupe américain Plug Power (CA 2020 : 337 M$ ; 1 200 collaborateurs), spécialiste de la pile à combustible, souhaitait venir en Europe. Et Renault Group (CA 2020 : 43,5 Md€ ; 170 000 collaborateurs) cherchait un partenaire sur l’hydrogène vert. Les discussions ont débuté à l’été 2020 et la création de Hyvia remonte au 3 juin 2021. Sa raison d’être, c’est la mobilité décarbonée pour les véhicules utilitaires. Nous voulons remplacer les véhicules thermiques par des véhicules Hyvia : des fourgons utilitaires Master électriques auxquels on intègre une pile à combustible, les réservoirs et les auxiliaires nécessaires. Nous prévoyons également la fabrication de stations de recharges, voire d’électrolyseurs, dans notre usine de Flins (Yvelines, NDLR). Aujourd’hui, Hyvia se différencie de la concurrence en ne proposant pas seulement la voiture mais tout un écosystème hydrogène.

Allez-vous baser l’ensemble de votre production d’utilitaires à hydrogène sur le site de Batilly (Meurthe-et-Moselle) ?

Oui, les Master seront fabriqués à Batilly (2 700 employés, 129 000 véhicules assemblés en 2020, NDLR). Le siège et les bureaux d’études d'Hyvia sont à Villiers-Saint-Frédéric (Yvelines), le cœur de l’ingénierie des véhicules utilitaires de Renault.

"Nous sortirons la nouvelle version du Master en moins de douze mois."

Des investissements sont-ils prévus sur le site lorrain ?

Sur la première phase de développement, il n’y aura pas grand-chose. Nos volumes ne seront pas monstrueux dans les premiers mois. Et nous en sommes encore à des phases pilotes avec trois ou quatre voitures ici ou là. En revanche, quand nous remplacerons nos Master, les investissements seront essentiels. D’autant que les nouvelles réglementations Euro 7 (visant à réduire les émissions des nouveaux véhicules, NDLR) devraient tuer le diesel. Comme le Master classique ne pourra plus être vendu, le Master électrique et hydrogène permettra d’assurer la pérennité de l’usine et du projet.

Faut-il s’attendre à une transformation profonde des lignes de Batilly ?

Par la suite, oui. Nous voulons que l’équipement hydrogène soit intégré de manière plus importante. Cela va forcément avoir un impact sur les lignes de production.

Quel est votre calendrier ?

Plusieurs prototypes sont déjà sortis. Mais les premiers Master hydrogène sortiront de Batilly début 2022. Habituellement, il faut compter cinq années pour faire une voiture. Mais comme la pile à combustible et le Master sont déjà sur l’étagère, nous sortirons cette nouvelle version en moins de douze mois. C’est assez redoutable.

Les batteries sont composées de métaux rares et leur fabrication pose des problèmes environnementaux. Y êtes-vous sensible ?

Effectivement, si je veux étendre l’autonomie d’un fourgon Master, je vais devoir mettre une tonne de batterie, ce n’est pas très vertueux. Mais avec notre système, nous réduisons la pile de 80 kilowattheures à 33 kilowattheures, elle est plus petite et consomme donc moins de métaux rares et d’énergie.

"L’écosystème hydrogène est en train de grandir."

Concernant la question de la recharge, quelle est la solution envisagée pour vos futurs clients ?

Nous n’avons pas l’intention d’avoir un réseau de stations Hyvia sur le bord des autoroutes. Donc, quand un client possède cinquante ou cent véhicules, l’installation d’une ou plusieurs stations se justifie. Et c’est à ce moment-là que nous discutons avec lui pour envisager, ou non, une telle installation. Et nous pouvons, aussi, lui fournir l’hydrogène. Notamment de l’hydrogène vert issu des énergies renouvelables.

Qui seront vos clients ?

Nous discutons avec des partenaires de l’automobile mais aussi de l’agroalimentaire. Nous avons également des contacts avec des collectivités locales pour leurs lignes de bus ou leurs bennes à ordures.

Quel est votre objectif à long terme ?

Nous voulons atteindre les 30 % de parts de marché sur le périmètre du véhicule hydrogène à l’horizon 2030.

Il subsiste de nombreuses questions autour du modèle économique de l’hydrogène. Malgré tout, vous considérez toujours cette énergie comme une filière d’avenir ?

Cela fait dix ans que Renault fait sa veille technologique sur l’hydrogène et le groupe est un précurseur sur le véhicule électrique. Et aujourd’hui, il y a une conjonction entre les problématiques environnementales, les nouvelles réglementations CO² et les plans de soutien à l’hydrogène. Il existe une somme de faits et d’actions politiques visant à encourager l’hydrogène car cela a du sens. On le voit : l’écosystème est en train de grandir.

Meurthe-et-Moselle # Industrie # Banque # Automobile # Production et distribution d'énergie # Transport # Logistique # Innovation # Investissement