Pouvoir d’achat, plein-emploi, environnement : ce que le gouvernement Borne prépare pour les entreprises
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Pouvoir d’achat, plein-emploi, environnement : ce que le gouvernement Borne prépare pour les entreprises

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Les dossiers économiques en tête des priorités du gouvernement d’Élisabeth Borne. À l’occasion de son discours de politique générale à l’Assemblée nationale, la Première ministre a décliné les grands chantiers qui l’occuperont dans les prochains mois. Sur le haut de la pile : le pouvoir d’achat, la baisse du chômage et la transition écologique.

Elisabeth Borne devant l'Assemblée nationale, le 6 juillet 2022, pour son discours de politique générale — Photo : DR

Pas de ruptures dans la continuité. Au terme d’un discours de politique générale de 90 minutes devant l’Assemblée nationale, la Première ministre a déroulé la méthode et les priorités de son gouvernement, en ce début de second quinquennat Macron. Une prise de parole sans grandes surprises au niveau économique : Élisabeth Borne a repris à son compte les grandes lignes du programme présidentiel.

Le pouvoir d’achat en haut de la pile

"Premier défi" sur la table de la chef du gouvernement : le pouvoir d’achat. Sans entrer dans le détail du projet de loi présenté ce jeudi, elle en a rappelé les principales propositions, égrenées au compte-gouttes ces dernières semaines : prolongation du bouclier tarifaire sur le gaz et l’électricité (a priori, jusqu’à la fin de l’année) ; baisse des charges pour les travailleurs indépendants (à hauteur de 550 euros par an au niveau du Smic, avait promis le camp présidentiel) ; triplement du plafond de la "prime Macron" (jusqu’à un maximum de 6 000 euros, aux dernières nouvelles) ; revalorisation des prestations sociales (dont la prime d’activité) ; ou encore "aider les travailleurs pour lesquels la voiture est une nécessité" (un serpent de mer, annoncé depuis la mi-mars).

Clin d’œil au Medef, Élisabeth Borne assure également plancher sur les moyens de rendre le logement plus accessible et "abordable". L’organisation patronale ne cesse de mettre en avant cette problématique pour contourner la délicate question des revalorisations salariales. Mais sur ce point aussi, la Première ministre a eu un mot : "Le pouvoir d’achat est un combat collectif. Chacun doit y prendre sa part, et notamment les entreprises qui dégagent des marges. Au moment où l’inflation est forte, j’attends des employeurs qui le peuvent, qu’ils prennent leurs responsabilités. Nous pouvons, nous devons aller plus loin en la matière."

Le plein-emploi "à portée de main"

Au-delà de l’urgence du moment, le "pouvoir d’achat durable" dépendra, à plus long terme, du plein-emploi et de la transition écologique, a assuré la chef du gouvernement devant les députés.

Le premier est un objectif "à notre portée", a assuré Élisabeth Borne. L’ancienne ministre du Travail a même semblé se féliciter des difficultés de recrutement des entreprises. La situation actuelle "a des vertus : elle impose aux employeurs d’améliorer les conditions de travail, de questionner leur mode de management et d’œuvrer à l’attractivité de leurs métiers. Avec le plein-emploi, les travailleurs retrouvent le pouvoir de négocier", a-t-elle insisté.

Pour faire encore baisser le nombre de chômeurs, l’exécutif entend surtout simplifier leur accompagnement (transformation de Pôle emploi en "France Travail") et développer l’insertion (réforme du RSA). Au niveau de l’enseignement, l’objectif des "prochaines années" est de "former un million de jeunes dans les métiers d’avenir, dont la moitié dans le numérique".

Au passage, la réforme des retraites n’est pas enterrée : "Oui, nous devrons travailler progressivement un peu plus longtemps." Mais il s’agira aussi de "prendre en compte les carrières longues et la pénibilité, [de] veiller au maintien dans l’emploi des seniors". En contrepartie, Élisabeth Borne promet d’améliorer les conditions de travail "par l’innovation, la technologie, l’évolution des carrières, […] [pour] faire en sorte que nos compatriotes ne finissent plus leur carrière briser".

Une transition écologique "radicale", mais sans décroissance

Quid de la transition écologique ? En apparence, elle reste une ligne directrice du nouveau gouvernement. Sauf que le projet de loi d’urgence sur le déblocage des projets d’énergies renouvelables, promis pour cet été, ne semble plus à l’ordre du jour. À la place, Élisabeth Borne annonce "une vaste concertation en vue d’une loi d’orientation énergie-climat. Filière par filière, territoire par territoire, nous définirons des objectifs de réduction d’émissions, des étapes et des moyens appropriés", a-t-elle expliqué. Avant d’ajouter cette phrase cryptique : "Les dirigeants des grandes entreprises doivent montrer l’exemple et leur rémunération dépendra de l’atteinte des objectifs environnementaux."

Pour le reste, l’exécutif officialise sa volonté de renationaliser EDF, de manière à "renforcer sa capacité à mener, dans les meilleurs délais, des projets ambitieux et indispensables pour notre avenir énergétique", notamment dans le nucléaire. Le mix de l’atome et des renouvelables, voulu par Emmanuel Macron, est donc confirmé. De même que plusieurs mesures : poursuite de l’aide à la rénovation des bâtiments (MaPrimeRénov') avec un objectif de 700 000 logements par an ; ouverture de l’accès aux véhicules électriques par le biais de la prolongation des aides à la conversion et la création d’un "système de location de longue durée à moins de 100 euros par mois" (promesse de la campagne présidentielle) ; décarbonation de l’industrie, à travers les fonds déjà annoncés dans le plan France 2030.

Dans tous les cas, l’écologie défendue par Élisabeth Borne impliquera des "transformations radicales dans la manière de produire, de nous loger, nous déplacer, consommer… Mais je l’affirme : je ne crois pas un instant que cette révolution climatique passe par la décroissance. Au contraire, ce sont des innovations, des filières nouvelles, des emplois d’avenir." Autre ligne rouge à cette politique verte : dans les secteurs en mutation, "chaque transition ira de pair avec un accompagnement pour la formation et la reconversion" des salariés.

Une baisse des impôts de production, au nom de la souveraineté

Dernier axe économique présenté par Élisabeth Borne : la "souveraineté". C’est en son nom qu’elle réitère la volonté de l’exécutif de baisser à nouveau les impôts de production en 2023. Cette suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée (CVAE) devrait représenter un gain de près de 8 milliards d’euros pour les entreprises, avant tout pour les grands groupes, les ETI et les PME de plus de 500 000 euros de chiffre d'affaires.

La souveraineté sera aussi au cœur d’une "nouvelle loi de programmation militaire". Elle devrait donner de la visibilité à l’industrie de la défense. Un autre projet, "d’orientation et d’avenir pour l’agriculture", est également annoncé. Lui visera, entre autres, à "faire émerger une nouvelle génération" d’exploitants, tout en veillant à une "juste rémunération" des acteurs. Pour le reste, la Première ministre renvoie, là encore, au plan d’investissement France 2030 et à ses "50 milliards d’euros pour l’innovation, la recherche et la réindustrialisation"… une somme a priori surestimée, puisque cette stratégie a été, en réalité, dotée de 34 milliards fin 2021.

Voilà pour la feuille de route. Reste à régler la question de sa mise en œuvre. Confrontée à une majorité relative à l’Assemblée nationale, Élisabeth Borne a insisté, tout au long de son propos, sur sa volonté de "bâtir ensemble". C’est-à-dire associer "plus que jamais" les partenaires sociaux aux futures réformes, mais aussi trouver "des majorités de projet", texte par texte, dans l’hémicycle. Une gageure au vu des premiers chahuts qui auront ponctué ce discours de politique générale.

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