Export : "La Chine offre encore de belles opportunités en lien avec les technologies vertes"
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Irène Tchedre directrice Altios pour la Chine et Hong Kong "La Chine offre encore de belles opportunités en lien avec les technologies vertes"

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Le cabinet Altios accompagne les PME et ETI dans leur développement à l’international. Irene Tchedre, sa directrice pour la Chine Hong Kong, livre sa vision du marché chinois, des risques et opportunités qu’il présente pour les entreprises françaises dans un contexte marqué par les aléas de la politique sanitaire chinoise et des risques géopolitiques croissants.

Irène Tchedre, directrice Altios pour la Chine et Hong Kong — Photo : Altios

Vous accompagnez les entreprises françaises et étrangères souhaitant développer leur activité en Chine. Quelle perception avez-vous de la situation ?

Depuis deux à trois ans, la période est compliquée. Les investisseurs rencontrent des difficultés sur le marché chinois, aussi bien en termes de logistique, que de produits et de ressources humaines. Quand je suis arrivée en Chine, en 2013, le modèle de management mis en œuvre par les entreprises étrangères s’appuyait le plus souvent sur un encadrement avec, au sommet, des expatriés sous contrat local et disposant d’avantages importants, relayés par un encadrement intermédiaire chinois. Ce schéma a été perturbé par le Covid. Les expatriés constituant le haut encadrement sont partis, alors que les managers intermédiaires n’étaient pas prêts à prendre le relais. Il en résulte une perte de communication entre les sièges sociaux à l’étranger et les équipes locales, d’autant plus importante qu’elle n’avait pas été anticipée. Pour une entreprise comme la nôtre, cela se traduit par des sollicitations de plus en plus nombreuses afin d’assurer ce rôle d’intermédiaire.

Autre rupture engendrée par la pandémie, il est redevenu compliqué de travailler en direct avec la Chine. Pendant toute la période au cours de laquelle la Chine s’est ouverte au monde, les entreprises étrangères ont pris l’habitude de se passer d’intermédiaires locaux. Par exemple, un fabricant de meubles pouvait effectuer directement son sourcing en Chine, même si ce n’était pas son cœur de métier, car le contexte permettait de le faire. Aujourd’hui, nous repartons sur des modèles anciens : certaines entreprises ferment leurs bureaux de sourcing en Chine pour passer, à nouveau, par des intermédiaires locaux.

Constatez-vous un phénomène de délocalisation ?

Le mouvement était amorcé avant le Covid car la Chine est devenue chère. De ce fait, les gains en termes de salaires ne compensent plus les frais de transport. L’Asie du Sud-Est et l’Afrique orientale sont ainsi devenues des destinations de repli pour les investisseurs en quête de main-d’œuvre bon marché. Le Covid a accéléré cette tendance. Nous sommes passés du 100 % chinois à un modèle associant la Chine et un ou d’autres pays.

En effet, les pays de substitution ne sont pas encore prêts à remplacer complètement la Chine. Mais ils constituent une solution de rechange à un moment où le risque pays s’est considérablement renforcé sur le Chine. Il n’est pas possible de dissocier business et géopolitique. Et, sur ce plan, la Chine a clairement et rapidement perdu les positions qu’elle avait gagnées. Certains investisseurs mettent leurs projets en attente. Nous le constatons même chez les investisseurs chinois, qui perçoivent le risque géopolitique et cherchent à investir en dehors de la Chine pour préserver leurs intérêts.

Quels conseils donneriez-vous à des entreprises françaises souhaitant se développer sur le marché chinois ?

Il faut distinguer deux cas de figure. Très peu d’entreprises présentes sur le marché chinois ont décidé de le quitter du jour au lendemain, car il reste un immense marché à fort potentiel. En revanche, nombreuses sont celles à adopter une position attentiste pour la suite de leurs investissements. Sans y renoncer, elles prennent plus de précautions. Il est également possible d’utiliser une implantation existante en Chine pour servir d’autres pays de la zone, en attendant de voir ce qu’il se passe.

En revanche, pour les nouveaux entrants, c’est plus compliqué. Aujourd’hui, il faut que l’entreprise soit solide pour investir en Chine, car la mise de départ est élevée et les incertitudes sur l’avenir rendent difficile l’estimation du retour sur investissement. La politique de "stop-and-go" sanitaire fait monter l’addition. Par ailleurs, les autorités chinoises se montrent beaucoup plus regardantes sur les investissements étrangers et sélectionnent des activités, porteuses de brevets, de propriété intellectuelle… Toutefois, certains secteurs offrent encore de belles opportunités aux entreprises françaises, notamment tout ce qui permet de produire "vert", toutes les technologies vertes liées à l’environnement, à l’eau, au traitement des déchets, à la mobilité durable etc.

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