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Naval Group Brest : « L'international est notre véritable terrain de jeu »
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Éric Balufin directeur de Naval Group Brest Naval Group Brest : « L'international est notre véritable terrain de jeu »

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Bénéficiant d'une conjoncture favorable dans le secteur de la défense, le groupe français de naval de défense Naval Group, qui emploie 2 800 salariés à Brest, en profite pour investir afin de rester compétitif sur des marchés où la concurrence étrangère est féroce. Le point avec Éric Balufin, directeur du site du géant industriel à Brest.

Éric Balufin a pris la direction du site brestois de Naval Group en septembre 2017 — Photo : © Naval Group

Le Journal des Entreprises : Comment se porte le secteur du naval de défense ?

Éric Balufin : Notre analyse du marché nous donne des perspectives de forte expansion dans le monde. Par ailleurs, la loi de Programmation militaire votée l'année dernière a acté des programmes très structurants pour notre activité, avec notamment la décision de programmer la construction d'un nouveau porte-avions et d'un sous-marin nucléaire lanceur d'engins (SNLE) de troisième génération. Notre objectif est donc d'augmenter nos parts de marché à l'international, ce qui est indispensable, car les budgets nationaux ne suffisent plus pour assurer notre croissance, tant dans le domaine de la construction neuve que du maintien en condition opérationnelle.

Comment comptez-vous faire face à la concurrence étrangère, notamment chinoise ?

É. B. : À l'heure actuelle, les Chinois sont capables de sortir une frégate par mois et un sous-marin tous les trois mois pour leur marché intérieur : il serait illusoire de croire qu'ils ne vont pas se tourner vers les marchés export. Pour y faire face, nous nous sommes lancés dans une stratégie de conquête, afin de maintenir notre rang de leader dans le domaine du naval de défense.

« L'international est déjà notre véritable terrain de jeu, mais à terme, nous visons 50 % de notre activité à l'étranger. »

L'international est déjà le véritable terrain de jeu de Naval Group : il représente à ce jour 30 % de notre activité, et il est prépondérant sur le site de Brest, notamment à travers l'entretien des navires que Naval Group a vendus à la Malaisie. Demain et après-demain, ce seront l'Inde et le Brésil, qui nous ont acheté des sous-marins, dont nous allons assurer la maintenance. L'année dernière, près de 300 Brestois ont participé à des missions d'entretien à l'étranger. À terme, nous visons 50 % de notre activité à l'international.

Notre stratégie de conquête passe notamment par un investissement de 21 millions d'euros pour moderniser notre outil de production, en y intégrant les dernières nouveautés technologiques afin de d'augmenter notre performance. En 2018, nous avions déjà investi 14 millions d'euros, quand on tourne habituellement autour de 10 millions d'euros. Cela montre qu'on a une réelle confiance dans notre avenir et dans notre marché.

Comment seront alloués ces 21 millions d'euros ?

É. B. : Essentiellement dans le renouvellement de notre outil industriel et dans la création d'un nouvel atelier multi-spécialités qui abritera en son coeur une zone dédiée aux nouvelles technologies, et notamment à la fabrication additive qui est en train de révolutionner notre métier. Nous sommes notamment en phase de qualification en matière de fabrication additive métallique, qui va par exemple nous permettre de fabriquer des pales d'hélice dans la journée grâce à l'impression 3D, nous donnant de fait un sérieux avantage sur la concurrence.

Vous misez aussi sur le Big data ?

É. B. : Oui, car les navires que Naval Group livre sont bardés de capteurs : l'exploitation des données qu'ils nous fournissent va nous permettre d'anticiper les avaries et les besoins en maintenance. C'est une véritable optimisation des opérations de maintenance qui se profile, ce qui va permettre de rediriger les investissements vers ce qui donne vraiment de la valeur ajoutée pour nos clients. Une équipe R&D d'une soixantaine de personnes travaille actuellement sur ce sujet.

Nous venons par ailleurs de concrétiser une démarche de digitalisation des arrêtes techniques, grâce à laquelle nos personnels disposent de la totalité des données nécessaires sur une tablette et saisissent leurs intervention en temps réel pour gagner encore en sécurité et en efficacité. Nous investissons aussi, bien sûr, dans nos métiers de base, à travers des machines-outils à commande numérique, ainsi que dans la formation pour faire monter nos personnels en compétence. Nous prévoyons également la création d'environ 300 postes en 2019, ce qui représente à peu près 200 recrutements.

Vous n'avez pas de problèmes de recrutement justement ?

É. B. : Pas vraiment, car Naval Group a la chance d'attirer les candidats et le tissu local, en matière de formation, nous permet de recruter des profils allant du technicien jusqu'à l'ingénieur.

Quelle est votre visibilité à l'heure actuelle ?

É. B. : Elle est exceptionnelle, car nous avons la chance de faire le gros de notre activité sur les SNLE : nous avons donc une visibilité sur 20 ans. En décembre, nous avons également obtenu le renouvellement du contrat d'entretien des chasseurs de mines tripartites qui dure 5 ans. Le prochain gros chantier sera celui du prochain arrêt technique du SNLE Le Terrible, qui va démarrer dans le courant de l'année. Mais cette visibilité se mérite : nous avons une très forte responsabilité en termes de performance, de dynamisme et de veille technologique, afin de maintenir un haut niveau de satisfaction pour nos clients.

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