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Depuis Aurillac, Biose prend son essor sur le marché de la microbiologie
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Depuis Aurillac, Biose prend son essor sur le marché de la microbiologie

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Spécialisé depuis 1951 dans la production de bactéries, Biose Industrie (280 salariés, 44 M€ de CA en 2022) prend son essor en même temps que le marché des thérapies basées sur le microbiote. Pour conforter sa place de leader mondial, le sous-traitant auvergnat investit massivement dans son outil industriel basé dans le Cantal.

Biose Industrie a investi 40 millions d’euros dans son site de production à Aurillac — Photo : DR

Au cœur du Cantal, se cache un discret champion du microbiote, Biose Industrie. En six ans, le groupe spécialisé dans le développement et la production de souches micro-biologiques pour l’industrie pharmaceutique, a connu une ascension fulgurante. De 10 millions d’euros de chiffre d’affaires en 2016, Biose est passé à 33 millions d’euros en 2021, et a clôturé l’année 2022 à 44 millions d’euros. Au cours des prochaines années, l’entreprise table sur un rythme de croisière de 30 % à 40 % de croissance par an. Avec des effectifs qui devraient également suivre une courbe ascendante, soit 80 recrutements par an en moyenne. Entre 2016 et 2022, le groupe est ainsi passé de 60 à 280 salariés.

Une entreprise tirée par les avancées de la médecine

Ce bond en avant de l’entreprise auvergnate, fondée en 1951, s’explique d’abord par les progrès de la médecine. "La découverte du séquençage au début des années 2000 et l’arrivée des Big Data ont permis de comprendre que notre corps abritait de très nombreuses bactéries, et que celles-ci avaient un rôle majeur sur notre santé", explique Adrien Nivoliez, qui a pris la tête du groupe en 2017. Ces deux découvertes ont ouvert, dans les champs de la médecine et des biotechnologies, un cycle d’une dizaine d’années, consacré à la R & D, la création de sociétés innovantes, et la réalisation d’études cliniques.

Si des compléments alimentaires à base de bactéries existaient depuis longtemps sur le marché, des médicaments ciblant des maladies de peau, des cancers, l’obésité et bien d’autres pathologies sont désormais en cours de développement. Et devraient prochainement être commercialisés. Pour preuve, un premier candidat médicament est en cours d’enregistrement aux États-Unis. Parmi les clients de Biose, on compte ainsi par exemple l’américain Evelo Biosciences, qui développe un candidat médicament capable de traiter des inflammations, comme le psoriasis. Mais aussi la biotech Bloom Science, qui travaille sur des solutions thérapeutiques agissant contre les maladies neurologiques. Ou encore le coréen GI Biome, qui réalise des essais cliniques pour un médicament candidat contre les cancers solides.

Virages stratégiques

Parallèlement à ces évolutions de la médecine, le groupe cantalien a opéré deux virages stratégiques qui se sont avérés payants. Fondé en 1951, à la suite de la découverte d’une variété de souche probiotique par des pharmaciens et microbiologistes du territoire, Biose Industrie était initialement spécialisé dans la fabrication de médicaments à base de bactéries vivantes. Jusqu’au milieu des années 2000, l’activité de l’entreprise a reposé sur la production et la commercialisation de produits issus de brevets enregistrés entre les années 1950 et 1960.

En 2007, une situation financière précaire, doublée d’un plan social, pousse l’entreprise à prendre un premier tournant, en se positionnant plus spécifiquement sur les thérapies du microbiote, et en réinvestissant fortement dans la R & D. Neuf ans plus tard, en 2016, elle entame une nouvelle évolution et se transforme en façonnier clinique et industriel. Elle devient sous-traitante pour l’industrie pharmaceutique. Elle ne vend plus de médicaments, mais développe et produit des micro-organismes pour le compte de start-up, principalement, qui travaillent à l’émergence de ces nouvelles solutions thérapeutiques.

Développement de l’outil industriel

Ce développement soutenu est aussi directement lié aux efforts d’investissement considérables du groupe dans son outil industriel. En 2020, l’entreprise a levé 30 millions d’euros, en faisant entrer la société d’investissement Cathay capital à son capital, aux côtés de l’actionnaire historique et ancien dirigeant, Stanislas Desjonquères. L’année suivante, Biose a également reçu le soutien de l’État, à travers le plan de relance, à hauteur de cinq millions d’euros. Et un million d’euros de la Région. Des fonds qui lui ont permis d’investir 40 millions d’euros sur son site auvergnat. Trois nouvelles unités de production — dédiées aux études cliniques de ses clients pour la première, et à la production de substance active pour les deux suivantes — ont déjà vu le jour. La dernière unité, équipée d’un fermenteur de 5 000 litres devrait être opérationnelle courant février 2023. "Nous disposons actuellement des capacités de production les plus importantes du marché", s’enorgueillit Adrien Nivoliez.

En parallèle, la société, qui réalise 53 % de son chiffre d’affaires outre-Atlantique — le marché américain concentre environ 60 % des entreprises spécialisées dans le microbiote —, a ouvert en 2020 une filiale à Boston et est en train d’y finaliser l’installation d’un laboratoire de recherche et développement. Et d’ores et déjà, le groupe prépare la suite. "Une nouvelle tranche de 60 à 80 millions d’euros d’investissement est en cours d’étude pour le cycle de 2023 à 2026 ", fait savoir Bertrand Claux, le directeur des ressources humaines de Biose.

Des investissements nécessaires afin de consolider la position de leader du groupe auvergnat. Car le nombre d’acteurs sur ce marché en plein développement est en croissance. Et ses concurrents, eux aussi, mettent les moyens. Ces deux dernières années, le suisse BacThera et l’américain Arranta Bio ont par exemple investi environ 90 millions d’euros chacun dans leurs capacités de production.

Un riche écosystème

Et si le choix d’implantation de Biose Industrie en surprend parfois certains, c’est que l’expertise d’Aurillac dans la microbiologie est encore pour beaucoup méconnue. La cité cantaloue rassemble des savoir-faire historiques dans le secteur. Une quinzaine d’entreprises sont aujourd’hui spécialisées dans ce domaine. Parmi elles : le laboratoire LIP, le producteur de levures et bactéries Lallemend, ou encore le laboratoire d’analyses alimentaires Agrolab’s. Un pôle d’excellence est même en cours de création. Objectif : accompagner la croissance des entreprises de la filière. "Nous voulons recréer de l’activité en microbiologie, avec un rayonnement a minima au niveau national, précise Adrien Nivoliez. Et faire d’Aurillac une ville de référence connue et reconnue dans la microbiologie."

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