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Serres en friche : un potentiel agricole pour l’horticulture varoise
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Serres en friche : un potentiel agricole pour l’horticulture varoise

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À l’heure de la reconquête du foncier agricole et d’une demande forte de la SICA Marché aux fleurs en approvisionnement, la Chambre d’agriculture du Var a dressé un inventaire des serres inoccupées ou susceptibles de le devenir. Avec 106 hectares en friche, et avec un nombre grandissant d’exploitants approchant de l’âge de la retraite, la chambre consulaire veut y voir un potentiel pour l’installation de nouveaux producteurs.

La Chambre d’agriculture du Var a recensé 106 hectares de serres en friches, principalement sur le territoire de la métropole Toulon Provence Méditerranée, bassin historique de production horticole — Photo : D.Gz/Midjourney

282 sites, représentant 106 hectares de serres, seraient déjà en friche sur le territoire du Var, selon une récente étude réalisée par la chambre d’agriculture du Var. Ces structures, souvent très délabrées, voire en ruine (35 %) ont été installées il y a une cinquantaine d’années et sont situées au cœur des bassins de production horticole traditionnel, la métropole Toulon Provence Méditerranée, et Estérel Côte d’Azur Agglomération, à l’est du département.

Un coût de réhabilitation élevé

Selon cette étude, trois quarts de ces serres en friches, en état de ruine ou fortement dégradées, auraient vocation à être démontées pour permettre de récupérer du foncier agricole abandonné. Le dernier quart, soit une vingtaine de sites, serait susceptible d’être réhabilité, "a fortiori dans une perspective de reprise d’exploitation par un jeune agriculteur, de modernisation, de sécurisation et d’adaptation de l’outil de production au projet du repreneur", complète Marc Hofmann, chef de projet horticole à la Chambre d’agriculture du Var. "Néanmoins, le démontage ou le recyclage des serres, leur réhabilitation ou leur modernisation sont coûteux. Le foncier agricole sur la métropole toulonnaise varie de 80 000 à 100 000 euros l’hectare. Quant au démontage des serres, il avoisine les 60 000 à 80 000 euros par hectare, voire 120 000 à 200 000 euros, et la rénovation atteint 100 000 à 300 000 euros par hectare", indique-t-il.

Pour Marc Hofmann, ces coûts expliquent, en partie, le peu d’engouement pour nettoyer les friches horticoles. Par ailleurs, la spéculation foncière, la faible présence d’agriculteurs en pleine activité en proportion des habitants sur ces zones agricoles, des propriétaires aux faibles moyens, les détournements d’usage ou l’âge des exploitants sont autant d’autres raisons qui peuvent expliquer l’abandon des friches. "Dès lors, des dispositifs financiers seront indispensables pour aider à la rénovation et à la remise en culture de ce foncier agricole et soutenir la production agricole locale", ajoute le chef de projet.

Des transmissions à anticiper

Alors que la population d’exploitants horticoles a déjà baissé de 30 % en 10 ans, en raison notamment de la concurrence internationale, la chambre d’agriculture a mené une enquête complémentaire sur la transmission des serres auprès de 200 serristes varois, de 57 ans et plus (taux de réponse de 33 %, soit 65 serristes). Objectif : anticiper l’avenir et éviter l’apparition de nouvelles friches. "Sur l’ensemble des enquêtés, la très grande majorité a une volonté de transmettre leur exploitation avec, dans 80 % des cas, un repreneur identifié, dont quasi tous dans le cadre familial", souligne Aurélia Grech, conseillère transmission.

Parmi ces repreneuses, Isabelle Brunetto Aubry, qui a décidé de réhabiliter les serres de son père, Pierre Brunetto, à La Londe-les-Maures. Ici, sur 6 000 m² de serres, les œillets, roses sprays et oiseaux du paradis, cultivés jusqu’en 2012, ont laissé la place à des montagnes de ronces et liserons. L’heure est aujourd’hui au défrichage. Viendra ensuite seulement l’estimation de la réhabilitation ou du démantèlement des serres. "Dans un premier temps, nous allons créer une activité pour générer du chiffre d’affaires et ainsi nous donner les moyens d’investir dans les serres. Si nous pouvons obtenir des aides, nous irons plus vite", explique Isabelle Brunetto Aubry, qui mène ce projet, mêlant horticulture, arboriculture, maraîchage et tourisme, avec son mari, Florian.

Si, à première vue, il y a suffisamment de reprises pour que le chiffre de 100 hectares de serres en friches d’ici 10 ans ne soit atteint, il reste tout de même un tiers des exploitants proches de l’âge de la retraite (pour une superficie totale de 14 hectares), qui n’ont pas la certitude de maintenir leur activité. "Ces agriculteurs déclarent ne pas pouvoir démanteler les serres s’ils ne trouvent pas repreneur en raison des coûts élevés et à court terme. Il y a même 5,5 hectares de serres pour lesquels les agriculteurs retraités ou futurs retraités n’ont pas trouvé de repreneur. L’anticipation et la mobilisation collectives pour soutenir et accompagner techniquement et économiquement les transmissions et limiter le développement des friches, est donc nécessaire. Nous devons trouver des solutions pour endiguer ce phénomène", conclut Aurélia Grech.

La SICA Marché aux fleurs, plaque tournante de la fleur coupée

D’autant que "l’horticulture du Var se porte très bien et nous avons besoin de jeunes qui s’installent", insiste Paule Mistre, horticultrice à La Crau, vice-présidente et élue référente sur le territoire Provence Méditerranée. Aujourd’hui, les fleurs coupées du bassin hyérois représentent 300 producteurs, 1 000 salariés et plus de 60 millions de tiges vendues en 2022-2023, pour l’essentiel par l’intermédiaire de la SICA Marché aux fleurs (Société d’intérêt collectif agricole). Elle est la première plateforme de vente en gros de fleurs coupées en France avec 250 acheteurs, grossistes, expéditeurs et fleuristes, qui viennent s’y approvisionner, générant un chiffre d’affaires total de 33 millions d’euros.

Et, pour Paule Mistre, la relève arrive. Au sein de l’Agricampus Var, 99 étudiants se forment du CAP au BTS en horticulture, maraîchage, arboriculture, fleurs coupées et à la production en pépinière.

Var # Agriculture # Écosystème et Territoire # Infrastructures # Transmission