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Qui est Saïd Chabane, le patron du Sco d'Angers ?
Angers # Agroalimentaire # Sport

Qui est Saïd Chabane, le patron du Sco d'Angers ?

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Dirigeant du groupe agroalimentaire sarthois Cosnelle, président du Sco d'Angers - club de football de Ligue 1 -, repreneur d'Angers Télé, élu à la CCI sarthoise... Pour Le Journal des Entreprises, Saïd Chabane évoque avec son franc-parler ses différentes activités.

Saïd Chabane, dirigeant du groupe agroalimentaire sarthois Cosnelle et président du club de football Sco d'Angers — Photo : DR

Le Journal des Entreprises : Vous êtes à la tête du groupe de charcuterie-salaison Cosnelle dans la Sarthe depuis 20 ans. Vous êtes également patron de club de foot et de média en Anjou. Quel est le lien ?

Saïd Chabane : Tout est lié. Et tout est affaire d'opportunités. Ma première participation au Sco date de juin 2011. Ça s'est déclenché autour d'un verre... J'ai d'abord pris 10 % du club, puis je suis devenu président en décembre suivant avec 63 % des parts. J'en détiens aujourd'hui 93 %. Je suis passionné de foot mais sans plus. Il ne faut pas trop de passion dans la vie, un minimum, mais pas trop.

La reprise d'Angers Télé, effective depuis avril dernier, est aussi une opportunité. On était le plus gros actionnaire privé de la chaîne auparavant. On utilise les images de la chaîne pour communiquer sur le club, sur nos activités et puis sur le territoire. Les mêmes images sont produites pour Angers Télé et Onzéo (chaîne officielle de 10 clubs français NDLR) et sur Canal Sat, une télévision sur laquelle on n'est pas actionnaire, mais partenaire

Les choses ont changé au Sco avec votre arrivée...

S.C. : Il y a un actionnaire, Bertrand Baudaire des restaurants La Boucherie, qui a 6 %. 1 % est partagé entre l'association et une trentaine de porteurs qui sont des supporters actionnaires. Avant notre arrivée, il y avait 930 actionnaires... Car en 1993, lors de la montée, pour un abonnement acheté c'était une action offerte. Ce qui était sympathique, mais en termes de gestion et d'organisation, ça coûtait 4.500 euros d'envois et 12.000 euros de frais d'avocat pour mettre en place l'AG. On a balayé tout ça pour une gouvernance plus simple. Reprendre une affaire qui est réglée au cordeau où la seule chose à faire c'est maintenir le cap dans la monotonie et dans la routine, ce n'est pas mon truc...

Le budget du club a triplé depuis 2011. Quelle est la part des droits audiovisuels ?

S.C. : Quand je suis arrivé, on était à 8-9 millions d'euros de budget annuel. On a fait la montée à moins de 11 millions, la première année de Ligue 1 à 22 millions, et cette année nous sommes à 26 millions d'euros. Les droits audiovisuels représentent entre 60 et 65 % de notre budget. Ce qui est trop. Notre ambition est de descendre en dessous la barre des 50 %. C'est possible, ça dépend de ce que vous offrez à vos partenaires. Il y a la partie grand public où vous avez besoin de mettre une tarification acceptable, si vous voulez avoir du monde. Après vous avez la partie réceptive et partenaires qui doit être de qualité pour attirer.

Sur la saison dernière, 50 % des clubs de Ligue 1 étaient en déficit. Pas le Sco. Vous êtes bon gestionnaire ?

S.C. : Ce n'est pas une question d'être bon gestionnaire mais de dépenser ce que vous avez et non ce que vous n'avez pas ! En Ligue 1 ou Ligue 2, vous adaptez votre structure au championnat dans lequel vous évoluez. Mais même déficitaires, les grands clubs sont là. Ceux qui ont des déficits sont des clubs avec des fonds propres colossaux, qui ont été dans le vert plusieurs années. Être dans le rouge ne les met pas en difficulté. Vous prenez des risques à un moment donné quand vous avez assez de fonds propres et que vous avez les moyens de répondre à un coup dur. La plupart des clubs sont toujours là avec les mêmes actionnaires.

>> A lire également : notre interview de Saïd Chabane avant la saison 2019-2020 de Ligue 1

Thierry Gomez vient d'arriver à la tête du Mans FC dont vous avez été partenaire. Reprendre le club n'a jamais fait partie de vos projets ?

S.C. : J'ai été partenaire du club manceau pendant 8 ans, avant l'extinction du club (NDLR en 2013). La question d'une reprise ne se posait pas, il y avait un président en place. Quant à l'arrivée de Thierry Gomez - que je ne connais pas -, c'est une bonne chose... à condition qu'on le laisse travailler et qu'on respecte les engagements pris.

Des travaux seront engagés prochainement au stade Jean Bouin sur la tribune Colombier ce qui devrait diminuer de 20 % la capacité d'accueil. Vous avez pensé à jouer au MMArena ?

S.C. : Il n'y aura pas de baisse de capacité (NDLR 17.000 places) sur cette année. Ce sera sur la saison 2017-2018. Il y aura un manque à gagner, on va perdre 6 mois d'exploitation sur la tribune Colombier. Par contre on gagnera en capacitaire et en confort à la suite. Quant au MMArena, on a essayé d'y jouer, mais on n'a pas pu ! Je sais qu'une équipe de CFA 2 peut y jouer 13 matches et que nous, on avait une équivalence de 70.000 euros de coût. Donc, je ne vais pas jouer au MMArena. Il est vide, il est bien, il prend l'air. Mais s'ils pouvaient le mettre sur des roulettes, on est preneur !

Vous êtes dirigeant de club de foot et industriel de l'agroalimentaire comme Noël Legraët qui était aussi maire de Guingamp... La mairie d'Angers, vous y pensez ?

S.C. : La seule chose qui est certaine c'est qu'à partir du moment où j'ai choisi la voie de l'économique, je ne peux pas choisir celle du politique. C'est clair, définitif et éternel. J'apporte ma contribution à Angers à travers nos actions sociales, une notoriété pour la ville et c'est déjà pas mal. Aujourd'hui, j'ai 100 % de la clientèle et je ne suis pas assez fou pour aller vers la politique et perdre 50 % de cette clientèle ! Et puis, je n'ai pas la patience pour faire de la politique et je ne veux pas me planter. Donc je reste à faire ce que je sais faire.

Qu'est-ce qui a changé à Angers Télé depuis que vous en avez pris les rênes ?

S.C. : Avec le passage d'une SEM à une société privée, le budget a diminué. Il est passé de 800.000 à un peu moins de 600.000 euros (NDLR dont la moitié en subventions). L'objectif est d'aller chercher 300.000 euros de pub. On est déjà bien avancé, on a revu la gamme produits en mixant certaines offres avec le Sco. Sur la programmation, Le temps d'antenne consacré au Sco reste le même, 30 %. Avec du neuf. Les soirs de match, on a un plateau en direct de Jean Bouin. J'aime bien le live, il n'y a pas de parachute.

Et avec l'équipe ?

S.C. : Le journaliste fait son article, le chef d'entreprise dirige et les commerciaux vendent. Je ne vais pas demander à un journaliste avant qu'il écrive son article qu'il soit rentable et vendu... Je leur prends la tête quand il le faut, on discute des choses pour décider d'avancer dans un sens. Mais je ne peux pas être derrière eux tous les matins et tous les soirs, à faire du flicage. Quelqu'un qui a peur n'est plus lui-même.

Vous n'êtes pas un homme de média contrairement aux deux autres candidats à la reprise de la chaîne. Vous avez essuyé des critiques, ça vous touche ?

S.C. : Parce que je ne suis pas un homme de média, je n'ai pas le droit de reprendre une télé locale ? La concurrence, elle est rude dans mon métier de base, l'agroalimentaire. Mais c'est de la concurrence. Et là j'ai l'impression que ça tourne autour de l'homme. Je pense qu'il y a de la place pour tout le monde. Chacun doit pouvoir avancer par la qualité des hommes qu'il met sur le terrain, par la qualité des émissions qu'il va produire, par la qualité de l'image. La différence se fait là, pas par les insultes et les attaques personnelles. Je dis à mes équipes, ne vous concentrez pas là-dessus, laissez-moi tout prendre et gardez votre énergie pour ce que vous faites.

Parlons de vos activités agroalimentaires. Comment est structuré le groupe Cosnelle ?

S.C. : Le groupe fêtera ses 20 ans, si tout va bien, en octobre 2017. Hors football, le chiffre d'affaires est de 90 millions d'euros. Sur la partie industrielle il y a 450 salariés, 800 en tout. Il y a Cosnelle à Cherré dans la Sarthe, c'est la première société créée en 1997, Province et Traditions, Pays Normand, ACR qui est une société qui gère tout le personnel d'animation commerciale. Et après vous avez Prestige's qui est l'outil industriel en lui-même, où il y a cinq usines et une plateforme logistique. Toutes ces entreprises sont détenues par la holding Sofico dont je suis l'actionnaire principal.

Ce sont toujours les rillettes qui tirent le chiffre d'affaires ?

S.C. : Non, on fait plus de jambons que de rillettes. Par jour, on produit actuellement entre 2.500 et 3.000 jambons. Un peu plus de 70 % de la production est destinée aux marques distributeur. Et ça va augmenter.

Les marges dans la charcuterie-salaisons diminuent...

S.C. : Elles ne diminuent pas, elles fondent ! On a des usines de plus en plus performantes, de plus en plus grosses et le marché n'évolue pas à la même vitesse que nos outils. Le problème de la taille critique avance au fur et à mesure que nos clients avancent. Aujourd'hui ces derniers fusionnent, se regroupent, se rachètent. Les abattoirs, nos fournisseurs, font la même chose et nous, on est trop atomisé au milieu. On s'appauvrit d'année en année. Ou alors il faut être tout petit et avoir des marchés de niche, pour nous c'est trop tard.

Vous allez donc nous annoncer des choses dans peu de temps ?

S.C. : Je ne dis pas que je vais annoncer des choses dans pas longtemps, mais les choses vont avancer. Chez moi, chez d'autres. Ceux qui vont s'entêter, ceux qui diront « c'est le bien de famille, je le laisse à mes enfants », moi je leur dis bon courage. Je ne suis pas dans cette optique-là. Ça ne sera pas un cadeau à donner à nos enfants, compte tenu de ce que l'on vit aujourd'hui et de la façon dont le marché évolue. Demain, soit je rachète, soit on me rachète. Et puis autant avoir 10% dans un groupe que d'avoir 100 % dans une tombe !

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