Marseille
Pascal Lorne : « La French Tech a oublié une dimension internationale »
Interview Marseille # Informatique # Attractivité

Pascal Lorne fondateur et dirigeant de GoJob Pascal Lorne : « La French Tech a oublié une dimension internationale »

S'abonner

Pascal Lorne, fondateur et dirigeant de GoJob, plateforme de mise en relation de travailleurs et d'entreprises, est un serial entrepreneur. Il a notamment créé l’entreprise marseillaise Miyowa, qu’il a ensuite revendue, en 2011, à l’américain Synchronoss. Il vient de lancer le collectif Aix-Marseille 2.0 et ambitionne désormais de prendre la tête d’Aix-Marseille French Tech dans les prochains mois. Rencontre…

Pascal Lorne a créé la société GoJob, basée à Aix-en-Provence, en 2015 — Photo : DR

Le Journal des Entreprises : Pourriez-vous revenir sur les différentes étapes de votre parcours, réalisé sous le signe de l’international…

P. L. : J’ai toujours été attiré par l’international. J’ai ainsi fait mes études dans une école d’ingénieurs en Allemagne, puis, durant les années 1990, j’ai passé deux années au sein de la filiale brésilienne de Renault en tant que CSNE avant de prendre la direction d’une start-up, Ismap qui a ensuite été revendue à Nokia, en 2002. Après un échec de création, j’ai monté, en 2004, Miyowa, spécialisée dans la création de solutions mobiles d’agrégation de réseaux sociaux et de messagerie. Nous avons notamment permis à MSN ou à Facebook de se positionner sur les téléphones mobiles. Nous nous sommes largement développés à l’international et j’ai revendu l’entreprise en 2011…

Est-il facile de se séparer ainsi d’une entreprise que l’on a créée et qui fonctionne ?

P. L. : Non, en effet, passée l’euphorie, j’ai ressenti beaucoup de tristesse. J’ai ensuite galéré pendant près d’un an et demi, sans savoir que faire… J’ai vraiment arrêté de travailler pendant six mois. Après cette traversée du désert, j’ai eu la chance de rencontrer Laurent Laïk, directeur général de l’entreprise aubagnaise d’insertion La Varappe. J’ai découvert un projet plein de sens et cela m’a touché. J’ai alors décidé de placer 100% de mon patrimoine dans des fonds à impact social, qui investissent notamment dans l’innovation à caractère sociale. Puis, être simplement investisseur ne m’a plus suffit. Je voulais faire quelque chose pour changer le monde et j’ai choisi de monter une nouvelle entreprise avec un sens. Je me suis donc intéressé à l’emploi et j’ai fondé GoJob, une place de marché qui ambitionne de fluidifier le marché du recrutement.

GoJob se positionne ainsi sur le marché de l’intérim…

P. L. : Oui, c’est un marché plus flexible et mieux payé, mais les boites d’intérim sont trop souvent des organismes poussiéreux. Il y a deux ans et demi, j’ai ainsi monté GoJob, une plateforme permettant la mise en relation entre employeurs et intérimaires. Aujourd’hui, trois millions de personnes et près de 2 000 entreprises y sont inscrites et nous contribuons au recrutement annuel d’environ 2 500 salariés. 10% de nos intérimaires sont ensuite recrutés par les entreprises dans lesquelles ils ont travaillé. Tout repose sur la confiance. C’est le moteur d’une place de marché comme la nôtre. Nous avons une forte présence dans les métiers du tertiaire et de la logistique et nous comptons comme clients des sociétés comme la Fnac, la Poste, Eiffage, Vinci ou encore PSA.

Vous venez de créer le collectif Aix-Marseille 2.0 et vous êtes candidat à la gestion du label Aix-Marseille French Tech aujourd’hui animé par l’association Medinsoft. Pourquoi cet engagement ?

P. L. : J’ai été sollicité par de nombreuses personnes et notamment des chefs d’entreprises, dont le regretté Frédéric Chevalier, fondateur de The Camp, afin de reprendre la French Tech. L’équipe initiale n’a pas démérité, mais le concept est resté trop local. On a indiscutablement oublié une dimension internationale, ou encore un accompagnement à la levée de fonds… Il y a également un manque de clarté entre l’association Medinsoft, qui préexistait, et la French Tech. Il faut aujourd’hui changer de braquet.

Quelle serait votre feuille de route ?

P. L. : Elle est claire. Il est nécessaire de faire venir du sang neuf et de sortir du marseillo-marseillais. Tout doit désormais être transparent et nous devons à tout prix éviter les conflits d’intérêt. J’ai constitué une équipe notamment constituée d’Olivier Mathiot, le PDG de Priceminister et membre de France Digitale, de Patrick Siri et Bertrand Bigay, cofondateurs de P.Factory, de Marc Schillaci, fondateur et président du directoire d’Oxatis ou encore de Lionel Minassian, vice-président de The Camp. Avec un budget de 300 000 euros, la French Tech doit avant tout être au service du territoire.

Hormis l’internationalisation et le financement, nous allons nous investir dans l’éducation. Nous ne pouvons pas laisser de côté les écoles d’ingénieurs ou les écoles de commerce du territoire. Nous devons nous assurer que les entreprises puissent intégrer leurs étudiants. Nous voulons par ailleurs lancer un diplôme labellisé French Tech dans les métiers du marketing digital. Comme l’innovation ne peut pas être enseignée de façon théorique, nous envisageons une formation sur le mode du compagnonnage, ce qui n’existe pas encore en France. Au travers de la French Tech, j’aimerais rendre au territoire tout ce qu’il m’a permis de faire durant 25 ans.

Marseille # Informatique # Attractivité