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Lamotte garde le cap pour braver les vents contraires de l’immobilier
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Lamotte garde le cap pour braver les vents contraires de l’immobilier

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Le promoteur immobilier rennais Lamotte intégrera en janvier 2024 son nouveau siège social à La Courrouze, au sein du plus grand immeuble en bois tertiaire de Bretagne. Alors que le secteur de l’immobilier est en pleine crise, Lamotte enregistre une année 2023 plutôt stable. Il poursuit ses projets de diversification et travaille à la baisse des prix pour rester à flot et conserver ses équipes.

Jean-Marc Trihan, président du Groupe Lamotte. Avec ses équipes, il quittera son siège historique du boulevard Magenta en janvier 2024 — Photo : Virginie Monvoisin

Le Bois Lilas sera bientôt son nouveau QG. En janvier 2024, le groupe immobilier rennais Lamotte va quitter son siège historique du centre-ville. Il va s’installer au sein de cet immeuble de 6 900 m² à Saint-Jacques-de-la-Lande, dont il est le promoteur. Un immeuble de bureaux pas comme les autres, qui fait figure de nouvelle vitrine pour le savoir-faire du Rennais : c’est le premier immeuble tertiaire de grande hauteur construit en bois en Bretagne. Montant de l’investissement : 15 millions d’euros. Situé dans l’écoquartier de La Courrouze, il est un modèle de construction répondant aux enjeux éco-urbains de demain et à la volonté des promoteurs et investisseurs de réduire leur empreinte carbone. À peine terminé, il est commercialisé en totalité. Lamotte louera une partie de l’ensemble à l’entreprise de l’énergie P & T Technologie (40 salariés), qui déménagera de Vern-sur-Seiche. Le reste est loué à Sector Alarm, en pleine croissance, et à la nouvelle filiale de Lamotte dédiée au flex-office, We Flex (lire par ailleurs).

Diversification depuis dix ans

Ce nouveau concept de bureaux partagés occupe en effet 2 000 m² de Bois Lilas et témoigne de la stratégie de diversification engagée par le groupe immobilier pour se développer. "Depuis dix ans, nous avons initié une démarche de diversification de nos produits, relate Jean-Marc Trihan, président du Groupe Lamotte. Nous développons des résidences services seniors au niveau national, avec notre filiale Espace et Vie (26 résidences), et aujourd’hui des projets de coliving avec Fo’lo, et de coworking avec We Flex". Cette diversification des activités s’est accompagnée dans le même temps d’une diversification géographique. Lamotte a commencé à poser ses valises en Loire-Atlantique il y a vingt ans, puis en Aquitaine il y a une dizaine d’années.

"Notre développement géographique est maintenant fait, estime Jean-Marc Trihan. Nous sommes implantés dans cinq grandes régions : la Bretagne, les Pays de la Loire, l’Aquitaine et l’Occitanie, la région parisienne, et le Rhône-Alpes. Notre objectif est de stabiliser ces structures." C’est-à-dire pas d’implantation prévue pour l’instant dans l’Est ou le Nord. "Il y a là-bas des professionnels aguerris, cela ne sert à rien en ce moment. D’autant qu’en Bretagne et région parisienne, il y a encore l’envie et le besoin de construire. À Paris notamment, la demande est colossale. Dans les autres régions, il y aurait obligation de le faire mais les élus n’ont pas l’envie. Les promoteurs construisent donc contre vents et marées."

Et dans le contexte actuel, teinté d’inflation, de hausse des prix de l’énergie, de coûts élevés de construction, de contraintes environnementales et architecturales drastiques, ajoutés aux taux d’intérêt en hausse, la promotion doit plutôt essayer de rester à flot. C’est en tout cas ce qui guide la stratégie de Lamotte actuellement.

Le groupe, qui emploie 880 collaborateurs (dont 550 pour la gestion de ses résidences seniors), s’apprête à clôturer une année 2023 équivalente à 2022, autour de 350 millions d’euros de chiffre d’affaires. Il aura livré 800 logements cette année et vendu 40 000 m² de bureaux. Lamotte tient donc pour l’instant le choc face à la conjoncture. Et c’est sans doute en grande partie grâce à cette diversification de ses activités, qui lui permettent de garder du volume.

Une crise structurelle

Pour 2024, Lamotte n’envisage pas d’accélérer, mais plutôt "de faire attention à de qu’on va faire, confie Jean-Marc Trihan. L’objectif est de maintenir nos équipes et notre savoir-faire, davantage même que de maintenir notre chiffre d’affaires. Ce sera dur sur l’année qui vient mais nous gardons le cap sur notre activité pour pouvoir rebondir quand la crise sera passée". Le dirigeant évoque une crise "structurelle". Selon lui, "le monde de la promotion s’apprête à vivre une crise similaire à celle des années 1990 plutôt que similaire à celle de 2008. Les prix des logements sont trop élevés. On est 20 % trop cher", dit-il pour expliquer la crise du logement que traverse le secteur. "Dans un second temps, ce sera au tour de l’immobilier tertiaire de connaître la crise", entrevoit-il. Pas très réjouissant, même s’il se dit "optimiste". Pour sortir de la difficulté, Jean-Marc Trihan estime que l’ensemble des acteurs de l’immobilier va devoir aller dans le sens d’une baisse des prix. "La baisse des volumes va être significative, donc tout le monde va, de fait, devoir baisser ses prix. Nous allons devoir acheter des terrains moins cher, être plus rigoureux en termes de conception, mieux acheter nos travaux, maîtriser nos frais généraux, et s’il faut, baisser nos prix". Le programme est annoncé.

Logements et tertiaire

Lamotte est d’autant plus vigilant sur ses projets qu’il réalise 70 % de son activité promotion dans le logement. Après avoir livré au premier semestre 2023 un emblématique programme en centre-ville de Rennes, avec une partie réhabilitation (Inside), le groupe poursuit son développement en dehors de ses terres historiques. Il réalise, par exemple, 200 logements dans les Hauts-de-Seine à Bagneux (Le Temps sur Mesure), 500 logements dans le Val-d’Oise à Sarcelles (Le Cèdre Bleu) ou encore 20 000 m² en co-promotion avec Bati-Nantes sur L’île de Nantes (Loire-Atlantique) avec logements, hôtellerie, commerces… Lamotte porte également un projet de 23 000 m² de bureaux et services dans le quartier de Viasilva au nord de Rennes. "Il s’agit d’une nouvelle forme de bâtiment tertiaire qui regroupera des entreprises, des restaurants, des services, des animations, une crèche", souligne Jean-Marc Trihan, conscient des évolutions nécessaires pour répondre aux nouveaux besoins et modes de travail.

À l’écoute de l’évolution des modes de vie

"Les entreprises cherchent de plus en plus des espaces mixtes entre bureau traditionnel et flex-office", remarque le dirigeant, qui a appliqué ce principe à son futur siège social. De même, les modes de vie évoluant, le coliving fait partie des forts développements pour Lamotte. Son concept de résidences services gérées pour étudiants et jeunes actifs, nommé Fo’lo, a vu le jour à Saint-Malo en juin et deux autres programmes sont en construction à Rennes et Bordeaux (avec logements, espaces de convivialité ou de coworking, salle de sport, lounge...). "Nous devrions en avoir cinq d’ici à cinq ans. Sur le plan économique, cela stabilise nos entreprises car ce sont des produits récurrents moins sujets aux aléas", indique le dirigeant, qui croit au "promoteur-exploitant". C’est d’ailleurs ce qui fait le succès de ses résidences services pour senior Espace & Vie, qui représentent 10 % du chiffre d’affaires et vont croître de plus en plus. "Nous en ouvrons 4 à 5 par an. C’est différenciant, notamment sur des territoires où nous sommes moins connus, car nous répondons à un besoin grandissant : celui du logement des plus de 80 ans, dont la démographie va exploser en 2030".

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