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Foodtech : ces start-up lyonnaises à l'appétit dévorant
Enquête Rhône # Agroalimentaire # Innovation

Foodtech : ces start-up lyonnaises à l'appétit dévorant

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De nouveaux entrants lyonnais bousculent la filière de la "foodtech" (nouvelles technologies dans le secteur de l'alimentation). Ce renouveau ne doit rien au hasard, mais a été impulsé par une génération d'entrepreneurs qui propose une autre façon de produire, transformer, distribuer et manger. Portraits de quelques-unes de ces start-up qui chamboulent nos assiettes.

— Photo : Tour Rose

Santé, praticité, convivialité… quel que soit l’argument, toute une filière se réinvente en écho aux nouvelles attentes des consommateurs. Sur le territoire lyonnais, pas moins de 250 start-up entreraient dans le champ des foodtechs, ces entreprises qui bousculent le secteur de l'alimentation grâce aux nouvelles technologies. Donnant naissance à un solide réseau FoodTech. Créée en 2007, Potager City fait figure de pionnière. Spécialisée dans la livraison de paniers de fruits et légumes frais en circuit court, l’entreprise, qui a enregistré 5 M€ de chiffre d’affaires l’an dernier, compte 100 000 clients et emploie 75 salariés.

Avec sa gamme de steaks et de boulettes à base de légumineuses, Hari&Co a levé 2,3 M€

Implantée en région parisienne, Rhône-Alpes, Paca et dans le Bordelais, Potager City poursuit son développement en Alsace, en Bretagne et dans les Hauts-de-France. Pour accompagner cette croissance, 7,5 M€ ont été levés fin 2017. Yoann Alarçon, dirigeant-fondateur, se montre confiant dans son objectif d’atteindre 20 à 25 M€ de chiffre d’affaires en 2021 : « Consommer local et bio était un marché de niche quand nous nous sommes lancés. Aujourd’hui, cela devient la norme et le consommateur crée la demande ».

Avec sa gamme de steaks et de boulettes à base de légumineuses cultivées en France, le Boucher Vert, rebaptisé Hari&Co, vient de franchir un cap. La start-up, créée en 2016 par Emmanuel Brehier et Benoît Plisson, a levé 2,3 M€ pour accélérer son développement en France et à l’international. Hari&Co devrait atteindre 2,5 M€ de chiffre d’affaires cette année en s’ouvrant aux marchés anglais et allemand et en bénéficiant d’un référencement plus large en grande distribution.

Si l’argent coule à flot, il n’est pourtant pas une garantie de réussite. Avec son doggy bag pour éviter le gaspillage et ramener chez soi les restes de son repas au restaurant, TakeAway avait levé 500 000 € mi-2016 pour finalement être placée en liquidation judiciaire un an plus tard. La start-up avait pourtant vendu 750 000 produits en 18 mois, mais la trésorerie a fait défaut pour financer les matières premières et la fabrication.

Décalé ou pratique

En début d’année, Chiche a implanté son atelier de production à Belleville (Rhône). Les deux créatrices, Adeline Cadillon et Coralie Honajzer, ont fait le pari de faire du pois chiche la nouvelle star de l’apéro. « Nous misons sur la convivialité, le côté fun et décalé », affirme Coralie Honajzer. Commercialisés en épicerie et dans quelques surfaces alimentaires, les produits seront bientôt en rayon dans les enseignes bio. Chiche espère vendre 120 000 sachets cette année, c’est-à-dire écouler une tonne de pois chiches par mois, et travaille à élargir sa gamme autour des haricots et des lentilles.

L’entreprise est passée par FoodShaker, l’incubateur de l’Isara-Lyon ouvert à tous les porteurs. « Depuis 2008, nous avons accompagné 32 projets qui ont donné naissance à 21 entreprises pour 5,2 M€ de chiffre d’affaires. Le taux de survie à 5 ans est de 80 % », fait savoir Sylvia Gascon-Cherrier, coordinatrice de l’incubateur qui accueille aujourd’hui 7 projets. Avec le programme Incubateur, les porteurs bénéficient de 12 mois d’accompagnement sur les volets technique, stratégie, marketing… et d’un accès à la halle technologique.

Pour respecter l’environnement, les produits de Vrac'n Roll sont conditionnés dans des bocaux et sacs en tissu consignés

Passée par le programme Boost in Lyon, la société Vrac’n Roll voulait simplifier l’achat en vrac. Les clients commandent en ligne et peuvent ensuite se faire livrer ou retirer eux-mêmes leurs produits. Centrée sur l’épicerie sèche, Vrac’n Roll a étendu son offre jusqu’aux "cookits", des recettes de biscuits pré-préparés. Pour limiter les déchets, les produits sont conditionnés dans des bocaux et sacs en tissu consignés et offerts pendant 2 mois. Les clients choisissent ainsi la juste quantité et rendent les contenants à la commande ou livraison suivante.

L’entreprise de Villeurbanne a séduit 700 clients en région lyonnaise et prépare son déploiement dans toute la France. « La livraison s’effectuera en point relais. Nous finalisons la mise au point d’un sac à dos consigné pour le transport des produits en vrac », commente Sarah Benosman, fondatrice de Vrac’n Roll et ex-consultante en éco-conception.

Voyages culinaires

En bout de chaîne, à l’heure de passer à table au restaurant, les consommateurs sont avides de découvertes et de partage. C’est ainsi qu’à la Tour Rose, dans le Vieux-Lyon, le duo Tabata et Ludovic Mey prépare l’ouverture en fin d’année de son Food Traboule. Sous la verrière d’une grande salle pouvant accueillir plus de 200 convives, 8 box et 4 corners seront aménagés pour faire voyager les papilles avec différents styles de cuisine.

Idem pour La Commune, ouvert fin mars dans le 7e arrondissement, un autre lieu hybride où se côtoient culture, entrepreneuriat et cuisine. Côté restauration, des chefs en résidence testent leur concept culinaire. Tandis que l’événementiel et la communication s’engouffrent à leur tour dans cette niche créant ici la Biennale International du Goût, le Lyon Street Food Festival ou encore le petit dernier, Attable.


Jérôme Zlatoff : « Un milliard d’euros disponibles en Europe »

Jérôme Zlatoff est référent du réseau FoodTech Lyon Aura et responsable Entrepreneuriat et Innovation à l’Isara-Lyon.

Comment analysez-vous l’effervescence de la filière food ?
J. Z. : Aujourd’hui, les tendances sont la transparence, la personnalisation, l’authenticité, l’accessibilité… Et puis, l’argent ne manque pas. En 2015, 6 milliards d'euros ont été investis dans le monde dans les start-up food, soit autant qu’entre 2000 et 2014. Aujourd’hui, c’est un milliard d’euros qui sont disponibles en Europe, principalement pour l’Allemagne, le Royaume-Uni et la France.

Un réseau FoodTech a été créé. Quel est son rôle ?
J. Z. : Nous avons lancé le réseau fin 2016 pour favoriser le développement de start-up innovantes qui s’inscrivent sur l’ensemble de la chaîne de valeurs, de la fourche à la fourchette. Pour les accompagner, nous avons réuni des partenaires afin de faire le pont entre cette filière et l’écosystème économique et entrepreneurial. Et au total, 140 start-up ou porteurs de projet dans notre scope.

Quel bilan sur un an ?
J. Z. : Il y a un an, nous avons diplômé les start-up à fort potentiel afin de les intégrer dans un parcours d’accélération : Baguette Academy, Carbon Bee, Entomovia, Max Daumin, la Ferme Urbaine Lyonnaise, Ici & Là, La Fraîcherie, Monbanquet, Monpotager.com, Véritable Potager et Yes It Is. Plus largement, nous facilitons les échanges avec les grands groupes. Ainsi, en janvier, 31 start-ups et 34 entreprises (Valrhona, Sodexo, Casino Proximité…) se sont rencontrées à l’événement Happy New Food.

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