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En Auvergne Rhône-Alpes, les professionnels du conseil croulent sous les demandes des entreprises
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En Auvergne Rhône-Alpes, les professionnels du conseil croulent sous les demandes des entreprises

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Dans sa note de conjoncture du 14 juin, la Banque de France a relevé ses prévisions de croissance pour 2021 de +5,5 % à +5,75 %. En Auvergne Rhône-Alpes, les professions du chiffre et du droit sont aux premières loges pour observer la reprise. Ils confirment qu’elle est une réalité, dépassant leurs prévisions.

Ce qui frappe aujourd'hui les cabinets de conseil régionaux, c'est la soudaineté du rebond de l'activité des entreprises — Photo : Pixabay

Le moral est là, et l’activité repart. Début juin, répondant à une enquête sur les conséquences de la crise, une centaine de dirigeants de la région Auvergne Rhône-Alpes étaient 19 % à enregistrer une progression de leur chiffre d’affaires supérieure à 25 %, et 12 % se disaient en suractivité. Une suractivité constatée par les cabinets de conseil régionaux. " L’activité fusion-acquisition à ce jour est absolument incroyable, on a mal du mal à répondre à toutes les demandes ", confirme Marc-André Audisio, associé du cabinet de conseil EY, directeur des activités Auvergne Rhône-Alpes.

Marc-André Audisio — Photo : Franck Dunouau

Une activité en hausse de 50 %

Le cas d’EY n’est pas isolé, tous les cabinets sont concernés. " Nous enregistrons une croissance à deux chiffres entre mai 2020 et mai 2021 ", approuve Marc Roirand, directeur du département droit fiscal au sein du cabinet d'avocats d'affaires Fidal Rhône-Alpes. Un surcroit de demandes de la part des clients historiques mais aussi d’entreprises qui n’étaient pas jusqu’à présent clientes.

Marc Roirand, directeur du département droit fiscal chez Fidal Rhône-Alpes — Photo : Vanessa Strub

" Nous enregistrons 50 % de demandes de plus par rapport à l’avant-crise sur les dossiers de fusions-acquisitions, acquiesce Eric Boucharlat, qui dirige l’activité transaction de Deloitte Finance en Auvergne Rhône-Alpes. Avec une vingtaine de collaborateurs dans son équipe, celui qui conseille les grands groupes, ETI et des fonds de capital-investissement sur leurs opérations d’acquisition, de cession et de refinancement admet une surchauffe : "si une entreprise fait appel à nous pour une opération à conduire très vite, ça ne sera pas simple de répondre à sa demande".

Des déséquilibres et des opportunités

"On vient nous chercher pour les transactions, les transformations, pour la RSE avec les avocats, tout le cabinet est fortement sollicité", décrit Marc-André Audisio, chez EY. La métropole de Lyon semble aussi bénéficier de son attractivité historique envers les biotechs. " Nous voyons revenir des étrangers, des entreprises allemandes, américaines, hollandaises, suisses", se réjouit-il. "Cette crise a clairement déclenché des déséquilibres et donc des opportunités. Et pour cause. Les clients fonds d’investissement ne sont pas mono secteurs et ont pu réallouer leur activité sur ces secteurs non exposés ou peu exposés au Covid comme la santé, l'alimentaire, l'hygiène, la cybersécurité, la tech et le e-commerce. Malgré des chiffres 2020 "pollués", les velléités d’acheter ou de vendre une activité ont été démultipliées ", analyse-t-on chez Deloitte.

Eric Boucharlat — Photo : Deloitte

Certaines priorités s’inversent

Une reprise, mais pas de manière irréfléchie. "On sent une reprise extrêmement vive, poursuit Marc-André Audisio, et l’envie des entreprises de réfléchir à ce qu’elles font, à la façon dont ils se fournissent et produisent. On voit par exemple beaucoup d’entreprises qui veulent se recentrer sur leur cœur d'activité, ce qui crée des actifs à racheter".
"Nous observons un travail de restauration des marges qui concerne les politiques d’achat, la réorganisation des fonctions en interne, la rationalisation des structures juridiques par fusion absorption, observe de son côté Marc Roirand (Fidal), avec aussi des projets qui se construisent autour des nouvelles questions sociétales : RSE, gouvernance éthique, aspects environnementaux".

L’accélération se porte aussi sur la cession ou transmission pour cause de retraite. "Certains dirigeants proches de la retraite projetaient d’avoir encore cinq ans pour voir évoluer la valeur de leur patrimoine, indique Eric Boucharlat. Mais avec ce coup d’arrêt et la crainte de se voir empêcher de vendre, cette reprise d’activité est vécue comme un effet d’aubaine et la volonté de ne pas se faire peur deux fois accélère les cessions."

Les matières premières, facteur de risques

Le risque dans cette période instable ? "La hausse des prix des matières premières, combinée à leur indisponibilité", tranche sans hésiter Eric Boucharlat, qui cite ces business plans établis en mai et totalement obsolètes un mois plus tard. "L’inconnue, c’est la durée de cette surchauffe. Si sur un business plan construit sur quatre ans on a un problème de prix des matières pendant six mois ou vingt-quatre, les implications ne sont pas les mêmes". Le spécialiste estime toutefois que le phénomène ne devrait pas durer deux ans.

N’empêche, les entreprises qui le peuvent garnissent leurs stocks. "Leur grande crainte, ce n’est pas que la matière soit trop chère mais qu’il n’y en ait plus. Dans ce scénario du pire, plus de production, plus de vente : tout s’arrête", décrit Eric Boucharlat.

Peu de PSE, beaucoup de licenciements

Céline Vieu Del Bove — Photo : Aguera Avocats

Ce qui frappe aujourd'hui ces cabinets de conseil, c’est la soudaineté du rebond. "Il y a encore quelques semaines, rien ne pouvait laisser penser un tel rebond de l’activité", confie Eric Boucharlat. " On ne l’avait pas prévu. Au contraire, on prévoyait des restructurations, de l’assistance ou de l’accompagnement aux restructurations. Mais pour l’instant on ne les voit pas ", dit Marc-André Audisio.

Même constat chez Aguera Avocats, cabinet spécialisé en droit du travail dont le fondateur Joseph Aguera a pris sa retraite il y a quelques semaines. " Nous mettons très peu de plans de sauvegarde de l'emploi (PSE) en œuvre, informe Céline Vieu Del Bove, avocate associée. Elle enregistre en revanche "un gros volume de licenciements hors PSE sur des motifs de faute, ainsi que des ruptures conventionnelles".

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