Le groupe gardois Eminence (600 salariés, CA 2020 : 87,7 M€), référence du sous-vêtement français depuis 1944, a retrouvé une deuxième jeunesse médiatique lors de la crise sanitaire. Quand le pays manquait encore de masques en 2020, il a été un des premiers industriels à mobiliser ses usines pour parer à l’urgence, suscitant l’intérêt des plus grandes télés et radios nationales. "Nous avons fabriqué et livré 15 millions de masques, qui ont généré 15 millions d’euros. Cela a permis de compenser en partie les pertes liées à la fermeture des magasins en raison du confinement, qui ont atteint 50 % pour les grands magasins. Au-delà, cela nous a rapprochés des consommateurs, de plus en plus sensibles à l’origine des produits qu’ils achètent", évoque Dominique Seau, PDG d’Eminence.
L’envolée des ventes en ligne
Selon la Fédération française de la maille, dont Dominique Seau est vice-président, le secteur du sous-vêtement a perdu entre 20 à 25 % d’activité en raison de la crise. Pourtant, Eminence est parvenu à déjouer cette tendance, avec un chiffre d’affaires 2020 supérieur à ceux de 2018 et 2019. Le groupe gardois a en effet enregistré une croissance de 50 % de ses ventes en ligne. "Les gens touchés par le fait qu’on produise en France ont acheté sur notre site web. Nous dépassons 20 % du chiffre d’affaires réalisé en ligne pour Eminence, même si notre autre marque Athena est loin de ce score. Ce retour des clients nous a permis d’affiner l’analyse de l’offre. Nous avons réduit nos gammes afin d’accroître le taux de disponibilité des produits. Avec une seule collection annuelle au lieu de deux, nous avons limité les invendus, sans augmenter nos prix, et donc préservé l’activité", poursuit Dominique Seau.
La place prise par l’e-commerce n’est toutefois pas sans conséquences sur l’organisation du groupe. Privé de visibilité en raison de la fermeture prolongée des commerces depuis le confinement de novembre 2020, Eminence a dû engager un plan social, toujours en cours : les 30 emplois concernés sont ceux des équipes officiant dans les grands magasins. "Il est difficile de maintenir une branche perdant la moitié de son chiffre d’affaires sans savoir quand les consommateurs et les touristes reviendront", justifie le PDG du groupe gardois.
Un contrat de licence avec la NBA
L’autre facteur différenciant pour Eminence est sa base de production. L’essentiel de la fabrication se concentre sur ses deux usines situées dans le Gard, à Aimargues et à Sauve, auxquelles s’ajoute un troisième site en Italie. "Nos concurrents ont totalement délocalisé leur production en Asie du sud-est. Nous avons gardé la nôtre en France, avec des relais en Asie et au Maghreb, ce qui réduit notre dépendance aux sous-traitants et a limité les ruptures d’approvisionnement liées la crise. Beaucoup d’acteurs souffrent, mais les industriels prudents, disposant de solutions de rechange comme Eminence, s’en sortent mieux", souligne Dominique Seau.
Le besoin de produits fabriqués en France pousse le groupe gardois à explorer de nouvelles tendances. Les gammes réalisées à partir de matières premières recyclées ou de coton bio trouvent preneurs. "Un boxer Eminence coûte quatre fois plus cher qu’en Asie. C’est un produit pour les gens qui ont les moyens, ou bien qui décident d’acheter moins, mais mieux", estime Dominique Seau. De même, le groupe profite d’un engouement intact pour le sportswear. Il vient de signer un contrat de licence avec la NBA, la fédération américaine de basket, pour produire une collection (pyjamas et sous-vêtements hommes et enfants) arborant les logos des plus grandes équipes.
