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Dans les Alpes-Maritimes, les femmes entrepreneuses restent moins nombreuses que dans le reste de la France
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Dans les Alpes-Maritimes, les femmes entrepreneuses restent moins nombreuses que dans le reste de la France

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La situation n’a pas changé : en France, les femmes dirigeantes sont toujours bien moins nombreuses que les hommes, et même encore moins nombreuses dans les Alpes-Maritimes. Une situation dont elles sont en partie responsables, s’imposant souvent elles-mêmes de nombreux freins. Les décomplexer et les encourager à se lancer dans l’entrepreneuriat était le sujet central de la journée "Ose !" à la CCI Nice Côte d’Azur.

De gauche à droite : Betty Seroussi, cofondatrice et dirigeante de Travel Planet ; Fabienne Gastaud, directrice générale de Wit, et Anne-Gaël Bauchet, directrice de l’agence AlterEgaux — Photo : Olivia Oreggia

En France, 30 % des entrepreneurs sont des femmes. Dans les Alpes-Maritimes, elles sont encore moins nombreuses : 26 % seulement sont inscrites au registre du commerce et des sociétés (micro-entreprises comprises). Et elles ne sont que 12 % à la tête de PME ou d’ETI.

Des biais qui se reproduisent

" Dans l’entrepreneuriat, les femmes sont sujettes aux stéréotypes, à des représentations mentales qui pèsent depuis des siècles, c’est très compliqué pour elles, concède Christophe Roux, responsable Création Entrepreneuriat au sein de Bpifrance. Elles peuvent aussi faire face à des freins liés à leur parcours de vie ou professionnel, à des problématiques de parentalité aussi. Malgré les efforts engagés, comme les Plans d’action régionaux pour l’entrepreneuriat féminin, tout cela nous mène à des chiffres peu flatteurs."

Autre chiffre peu flatteur : les entrepreneuses lèvent 40 % de moins que leurs congénères masculins. Elles en seraient en partie responsables, n’osant souvent pas demander de montants plus élevés, n’osant pas se lancer, s’affirmer. Syndrome de l’imposteur oblige. D’où l’événement baptisé "Ose !" qui se déroule dans les CCI de région Sud et, pour la deuxième année consécutive, à la chambre consulaire de Nice, pour décomplexer et encourager à l’entrepreneuriat. Car la gent féminine n’est pas toujours aidée dans ses élans.

"90 % des business angels sont des hommes, il faut avoir cette donnée en tête quand on va demander des financements, explique Anne-Gaël Bauchet, directrice d’Alter Egaux, agence de conseil et formation pour l’égalité professionnelle. Il faut comprendre ce qui va se passer dans le regard des autres, l’anticiper car les mécanismes de ce que l’on appelle la cooptation inconsciente sont très forts. Nous avons tous et toutes des stéréotypes, nous allons tous spontanément vers des gens qui nous ressemblent, cela nous rassure, c’est inconscient, involontaire. Mais il faut interroger cela, sinon on continue à reproduire ces biais les uns derrière les autres et ces biais ont des conséquences."

L’événement Ose ! qui s’est déroulé à la CCI Nice Côte d’Azur a réuni près de 300 femmes autour de l’entrepreneuriat — Photo : Olivia Oreggia

"Ne pas trop se poser de questions"

Le syndrome de l’imposteur, les deux dirigeantes venues apporter leur témoignage ne l’ont jamais connu. Entrée chez Wit en tant que rédactrice technique il y a 33 ans, Fabienne Gastaud dirige aujourd’hui la PME niçoise spécialisée dans la gestion technique et énergétique des bâtiments, et sa centaine de collaborateurs. "Fille de fonctionnaires, rien ne me prédestinait à devenir chef d’entreprise, raconte-t-elle. J’ai fait des études techniques, nous étions peu nombreuses, je me suis donc toujours sentie d’égale à égal avec les garçons. Je ne me suis jamais dit que j’avais de la chance, je ne me suis jamais posé la question. Si je n’avais pas confiance en moi plus jeune, en revanche, j’ai toujours cru en mes compétences et en ma capacité de travail. J’ai toujours eu cet instinct qui me disait "Ose pour ne pas subir". On peut tout oser, tout entreprendre quand on a la motivation."
Même écho auprès de Betty Seroussi, à la tête de Travel Planet (120 M€ de CA), agence de voyages d’affaires et éditeur de solutions à Sophia Antipolis, par ailleurs coprésidente de la French Tech Côte d’Azur. "Quand on tombe dans le monde de l’entreprise, il faut éviter de se poser trop de questions, assure-t-elle. Créer une plateforme technologique quand on vient comme moi du tourisme, n’a pourtant pas toujours été simple. Je suis entrée dans un monde totalement inconnu, avec un langage totalement inconnu. On ne me faisait pas beaucoup confiance. Les fournisseurs, les clients, les entreprises ne me parlaient pas et s’adressaient à mon mari ! Je me suis accrochée et j’ai appris. Quand vous maîtrisez votre sujet, vous avez toute légitimité. Et dans la tech, nous ne sommes que 7 %, les femmes ont donc un boulevard devant elles."

Et Betty Seroussi de préciser, non sans fierté, qu’au sein de Travel Planet, l’équipe de développeurs est composée, pour moitié, de développeuses.

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