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Congés payés et arrêt maladie : les entreprises risquent de passer à la caisse
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Congés payés et arrêt maladie : les entreprises risquent de passer à la caisse

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Par trois décisions récentes concernant l’acquisition et le paiement de congés payés, la Cour de cassation revire sa jurisprudence pour mettre en conformité le droit français avec la législation européenne. Des jugements qui pourraient coûter cher aux employeurs.

Les arrêts maladie, même s’ils n’ont rien à voir avec l’activité professionnelle, doivent donner droit à des jours de congé, assure la Cour de cassation — Photo : Mike Fouque

C’est un alignement sur le droit européen qui risque de peser sur les comptes des entreprises françaises. Pour se conformer au droit européen en matière de congé payé, la Cour de cassation juge, dans trois décisions rendues par la chambre sociale le 13 septembre, que les périodes d’arrêt maladie devront désormais donner droit à des jours de congé. Et ce, que le salarié soit atteint d’une maladie ou victime d’un accident, de quelque nature que ce soit, professionnelle ou non professionnelle. Dans la foulée, la plus haute juridiction pose "qu’en cas d’accident du travail, le calcul des droits à congé payé ne sera plus limité à la première année de l’arrêt de travail". De même, elle rappelle que "la prescription du droit à congé payé ne commence à courir que lorsque l’employeur a mis son salarié en mesure d’exercer celui-ci en temps utile".

En se fondant ainsi sur l’article 7.1 de la directive européenne "temps de travail" de 2003 et sur l’article 31.2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, la Cour de cassation opère donc des revirements de jurisprudence qui pourraient coûter cher aux employeurs.

Une facture de 2 milliards d’euros selon le Medef

"Cela représente un surcoût d’au moins 2 milliards par an pour les entreprises", s’étrangle Patrick Martin, nouveau président du Medef regrettant au passage une nouvelle série de mesures qui vient alourdir le coût du travail. Même son de cloche du côté de la CPME. "La Cour de cassation n’hésite donc pas à s’inscrire en faux par rapport à ce qui figure dans le Code du travail. À ce niveau, il ne s’agit même plus d’instabilité juridique mais d’incohérence juridique !", fustige l’organisation patronale qui estime que "les conséquences financières d’une telle décision, basée juridiquement sur un texte européen, approuvé en son temps par la France, seraient désastreuses financièrement pour les entreprises". Elle ne manque pas de pointer du doigt que remettre en cause "le principe considérant que les congés payés s’acquièrent en fonction des périodes travaillées, serait totalement incompréhensible. Et inacceptable."

En outre, la jurisprudence étant rétroactive, l’émergence de nouveaux recours pourrait être à craindre pour les chefs d’entreprise.

Transposition dans le droit français ?

Du côté de la CFDT, on se félicite des décisions de la Cour de cassation : "Voilà maintenant plus de 10 ans que notre législation relative aux congés payés contrevient aux dispositions de l’Union européenne. Tout simplement parce que la France n’a pas pris le soin de transposer complètement l’article 7 de la directive de 2003 dans son droit interne". Elle salue ainsi "des décisions qui vont permettre d’assurer l’effectivité des droits à congés payés des travailleurs. Il est essentiel que les salariés ne soient pas pénalisés par ces périodes d’incapacité de travail imprévisibles et indépendantes de leur volonté".

Reste que ces décisions juridiques n’exemptent pas le législateur français de transposer en interne le droit européen. Dix ans après, il pourrait donc s’y employer prochainement.

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